Les Phéniciens ont-ils inventé le modèle commercial européen ?

Les Phéniciens sont connus comme les grands navigateurs et commerçants de l’Antiquité méditerranéenne. Pline l’Ancien allait même jusqu’à les créditer de l’invention du commerce. Ils nous ont par ailleurs transmis une innovation fondamentale, l’alphabet, via son usage en Grèce. Les Phéniciens levantins et leurs descendants puniques de Méditerranée occidentale firent la fortune de villes comme Tyr ou Carthage, essentiellement grâce au commerce maritime. Qui étaient-ils et en quoi leur modèle de commerce de longue distance peut-il encore nous intéresser ? Géographiquement, ce sont d’exacts précurseurs des Génois et Vénitiens médiévaux en Méditerranée… Ils y ont imposé une forme de commerce en bien des points apparentée à celles pratiquées par les diasporas orientales… Mais ils auraient finalement construit un type de commerce de longue distance surtout fondé sur une imbrication étroite entre marchands et pouvoir politique. C’est une forte interaction privé/public qui marquera aussi, quinze siècles plus tard, la spécificité des marchands italiens au 13e siècle, puis néerlandais ou britanniques à partir du 17e. Alors les Phéniciens, commerçants orientaux classiques ou précurseurs du modèle commercial européen ?

L’origine des Phéniciens reste incertaine. Ils semblent issus du peuple cananéen qui, dès le 3e millénaire avant notre ère, peuplait la côte orientale de la méditerranée. Au carrefour des influences maritimes (Crète, Chypre) et terrestres (Égypte, Mésopotamie), ce peuple pratiquait déjà un commerce important. Un peu après 1200 av. J.-C., la région aurait été envahie par des peuples non sémites, dits « Peuples de la Mer », parmi lesquels les Philistins se seraient établi au sud de la côte, donnant ainsi son nom à la Palestine. Les villes côtières cananéennes auraient été touchées par cette invasion. Prises alors entre Philistins et Israélites au Sud, Araméens au Nord-Est, établies sur une bande de côte étroite allongée entre littoral et montagne libanaise, quelques cités côtières auraient cependant conservé leur indépendance. Communiquant peu entre elles (car installées sur des plaines séparées par des falaises), peu incitées à former un État puissant, ces cités se seraient naturellement tournées vers la mer pour assurer leur prospérité, essentiellement à partir du 9e siècle.

Cette chronologie traditionnelle est cependant aujourd’hui contestée (Moore et Lewis, 1999). Il n’en reste pas moins que la vocation commerçante des Cananéens est attestée. Dans la région où ils habitaient, la ville d’Ougarit, située un peu plus haut que la côte libanaise, serait peut-être déjà active au 14e siècle, à coup sûr au début du 12e, comme intersection des trafics mésopotamiens et anatoliens avec l’Égypte, comme centre de construction navale profitant des bois de la montagne libanaise, comme cité artisanale voué aux textiles teints. Elle serait à l’origine de la future organisation commerciale phénicienne, partiellement inspirée du karum (confrérie marchande) mésopotamien. Un agent de la couronne, rémunéré de ses services par l’octroi d’un domaine, y serait associé à d’autres commerçants dans une guilde aux ramifications multiples à l’étranger. Le financement des expéditions commerciales serait à la fois public et privé mais plusieurs produits stratégiques comme le cuivre et le grain feraient l’objet d’un monopole royal. Enfin les grands commerçants d’Ougarit entraîneraient dans leur dépendance une foule de petits commerçants vassalisés : véritables chefs d’entreprise, ils se seraient aussi vu confier par la couronne des fonctions d’administration locale et de collecte des impôts.

C’est avec Hiram, vers 950, que l’essor commercial de la première grande cité phénicienne, Tyr, devient réalité. Désireux de « contrôler les routes commerciales du continent asiatique » (Aubet, 1993, p. 35) ce souverain engage un premier partenariat avec Israël, les Phéniciens exportant des biens de luxe mais aussi leurs techniques de construction (de bateaux notamment) contre blé, cuivre et argent. Cette alliance lui donne accès aux routes caravanières joignant l’Arabie, la Syrie-Palestine et la Mésopotamie. Ultérieurement les commerçants d’Israël et de Tyr auraient travaillé ensemble en mer Rouge et dans l’océan Indien tandis qu’un karum phénicien s’installe en Samarie et de plus petits établissements sont créés en Galilée. Ce premier partenariat reste cependant par trop terrestre alors que l’avenir des Phéniciens est d’abord maritime.

Cette orientation maritime des Phéniciens est de fait visible dans la topographie de leurs cités : bâties sur des îles, presqu’îles, longs promontoires, criques protégées, les villes phéniciennes sont d’abord des mouillages propices à la navigation, bien protégés mais aussi susceptibles d’être rapidement évacués (Gras, Rouillard et Teixidor, 1995). Si la forme des bateaux est imparfaitement connue, la technique phénicienne de navigation ne fait aucun doute : capacité à voguer de nuit en s’aidant de la Petite Ourse, établissement de mouillages relais sur les côtes, navigation en haute mer… Auteurs de perfectionnements techniques pour la construction des navires (notamment l’usage du bitume pour assurer l’étanchéité des coques), les Phéniciens auraient même réalisé, d’après Hérodote, un premier tour complet de la côte africaine (utilisant le canal égyptien du Nil à la mer Rouge), à la demande du roi Nechao d’Égypte, vers l’an 600 avant notre ère. Moins légendaire, la reconnaissance de la côte africaine atlantique par le carthaginois Hannon vers 425 montre une audace de naviguer nouvelle pour l’époque.

Mais le but de cette navigation n’est jamais la conquête militaire. Dotés d’une faible armée, n’établissant pas de colonie étendue mais plutôt des entrepôts commerciaux liés aux temples qu’ils construisent auprès de leurs mouillages, les Phéniciens orientaux créent rapidement des relais à Chypre et dans les îles grecques, mais aussi en Méditerranée occidentale : Utique sur la côte tunisienne serait du 12e siècle avant notre ère tout comme Gadès (Cadix) sur la côte atlantique espagnole et Lixus sur la côte atlantique marocaine. Les Phéniciens apportent dans ces régions leurs produits artisanaux (pacotille mais aussi tissus teints de pourpre), leur huile (mais ils transportent aussi du bois du Liban et d’autres produits moyen-orientaux) et ils en tirent d’abord les métaux précieux (or, argent, fer, cuivre, étain et plomb) utiles aux échanges ultérieurs, à leur orfèvrerie et à la fabrique d’armes. Point capital, ils ne font pas eux-mêmes la conquête des mines et semblent plutôt offrir un débouché nouveau et régulier aux activités locales autochtones d’extraction et transformation des métaux. Ainsi en Andalousie ils obtiennent facilement l’argent de la région de Huelva en offrant à la fois des biens manufacturés en échange mais aussi en contribuant à l’amélioration des techniques locales. Ils transforment souvent sur place les métaux obtenus. Ils se greffent donc intelligemment sur les proto-économies locales qu’ils abordent, inaugurant ainsi une pratique commerciale vouée à un grand avenir en Méditerranée, avec notamment Gênes et Venise au Moyen Âge.

Chronologiquement le commerce phénicien est d’abord contrôlé par le souverain de la ville d’origine des navires. Homère mentionne ces échanges qui s’assimilent clairement à la logique de la réciprocité, du « don » et du « contre-don » scellant une alliance entre souverains. Mais à partir du 10e siècle, le commerce semble échapper au pouvoir politique, dépassé par l’intensité des trafics et l’émergence d’une classe de marchands agissant pour leur propre compte. Si l’on en croit les sources grecques (de fait partiales), le commerce phénicien traditionnel s’accompagnerait d’opérations beaucoup plus contestables telles que le rapt de femmes ou le trafic d’esclaves, pratiquées par des commerçants en marge de la cité.

Le rôle des temples et de la religion dans les implantations commerciales phéniciennes ne saurait être sous-estimé. L’apparente confusion entre temples et entrepôts vient du fait que les dieux des populations proche-orientales de l’antiquité sont souvent personnifiés comme marchands (Enlil en Mésopotamie) ou comme artisans (Melqart en Phénicie). Par ailleurs les marchands réunis en guildes déifient leurs patrons mythiques, auxquels ils pensent devoir leurs techniques de travail et qu’ils décrivent souvent comme des divinités punissant ceux qui s’écartent du droit chemin. En ce sens la crainte des dieux garantirait des pratiques commerciales régulières. Mais l’impact économique du religieux ne s’arrête pas là. Pour Silver (1995), les restrictions religieuses et les consignes de comportement, non seulement rendraient solidaires les marchands mais encore les pousseraient à des stratégies de monopole. L’appartenance à une « confrérie » protégée par un dieu assurerait également que certaines techniques ne se diffusent pas à l’extérieur par crainte de représailles divines (stimulant donc l’innovation). Enfin il est possible que la diffusion des cultes phéniciens dans les régions d’implantation ait constitué la pierre de touche des alliances commerciales recherchées en soudant les différents partenaires autour d’un même dieu, à l’instar de pratiques caractéristiques de maintes diasporas asiatiques. Dans le même esprit, Moore et Lewis n’hésitent pas à assimiler les temples, avec leurs branches locales, aux multinationales modernes, dans la mesure où les relations commerciales et financières avec le temple fondateur restent toujours importantes et régulières (1999, pp. 98-99).

Mais l’essor commercial phénicien n’est pas seulement dû à des causes internes. C’est la conquête assyrienne du 9e siècle qui va lui donner l’impulsion décisive. Conscients du potentiel que représente Tyr, les souverains de Ninive décident de ne pas la soumettre militairement et de lui confier leur approvisionnement en métaux précieux. Moyennant un contrôle par des inspecteurs assyriens implantés sur place, les ports phéniciens sont alors encouragés à développer leur commerce. Tyr doit aller chercher de plus en plus loin les métaux précieux nécessaires à l’effort de guerre de son puissant suzerain. La ville phénicienne développe ainsi ses implantations à Chypre (riche en cuivre). Israël ne lui fournissant plus les céréales nécessaires, Tyr s’implante aussi en Afrique du nord et commence à en faire le grenier à blé qu’elle deviendra pour les Romains quelques siècles plus tard… Ces nouveaux circuits commerciaux doivent être sécurisés, entraînant des implantations en Sicile, puis en Sardaigne (par ailleurs riche en plomb et en argent). De proche en proche Tyr développe ses ramifications jusque dans la péninsule ibérique.

Le véritable tournant de l’histoire du peuple phénicien se situe en 814 avant notre ère, date probable de fondation de Carthage par la princesse Elissa. Fuyant le roi de Tyr qui avait fait assassiner son époux, elle échoue sur le rivage qui surplombe aujourd’hui Tunis et y fonde un établissement. Payant tout d’abord un tribut aux autochtones pour le sol, Carthage s’émancipe rapidement et prend la main sur l’ensemble des établissements phéniciens de méditerranée occidentale.  Dès le 7e siècle elle les multiplie : accentuant les liens avec les Étrusques, elle crée Ibiza en 654, elle domine l’ouest de la Sicile et la Sardaigne, vers 540. Ce sont surtout la côte nord-africaine (où Carthage établit un mouillage formel tous les quarante kilomètres environ) et les comptoirs ibériques qui passent sous sa domination. La cité punique va dès lors défendre jalousement à tout navire extérieur la navigation dans cette partie de la méditerranée. Contrôlant les « colonnes d’Hercule » (actuel détroit de Gibraltar) et les îles de Malte et Lampedusa au sud de la Sicile, elle n’hésite pas à couler tout navire étranger surpris dans ses eaux. Carthage multiplie les établissements, y compris fortifiés comme Monte Sirai en Sardaigne. Elle contribue, par ses achats, au développement de la région métallifère de Tartessos en Andalousie. Elle établit ses citoyens, dont la situation économique et sociale était médiocre, dans les comptoirs et villes nouvelles qu’elle crée : l’ « empire de la mer » devient une réalité dès le milieu du 6e siècle.

Contrairement aux Phéniciens orientaux, les Carthaginois pratiquent alors progressivement une politique de puissance. Ils occupent ainsi l’intérieur de l’actuelle Tunisie, influençant grandement les cultures locales et créant une culture mixte qui marquera durablement l’Afrique du Nord. Ils forment une armée qui, quoique le métier des armes soit tenu en suspicion par la culture punique, va rapidement s’imposer comme force à part entière dans la vie publique. Carthage se met à faire étalage de sa force, notamment en Sardaigne où elle échoue cependant dans sa tentative de soumettre les autochtones. Confrontée à la progression du commerce grec en Espagne et en Europe continentale, elle affronte en 540 les Phocéens établis à Marseille. Hamilcar Barca réalise une véritable conquête militaire au cœur de l’Espagne, entre 237 et 228. La suite est connue : face à la puissance romaine montante, Carthage ne pourra faire illusion très longtemps. En se noyant dans les terres, en substituant à l’atout commercial le recours aux armes, le plus spectaculaire réseau marchand de l’Antiquité s’est ainsi en partie auto-détruit… Ignorant finalement la postérité commerciale et maritime qui serait la sienne…

AUBET M.E., 1993, The Phoenicians and the West, Cambridge, Cambridge University Press.

DECRET F., 1977, Carthage ou l’Empire de la mer, Paris, Seuil.

GRAS M., ROUILLARD P., TEIXIDOR J., 1995, L’Univers phénicien, Paris, Hachette.

MOORE K., LEWIS D., 1999, Birth of the Multinational – 2000 years of ancient business history from Ashur to Augustus, Copenhagen, Copenhagen Business School Press.

SILVER M., 1995, Economic Structures of Antiquity, Westport, Greenwood Press.

L’histoire-tunnel en diapositives : l’Atlas historique d’Edward Quin

Dans mon précédent billet, j’évoquai la scission qui s’était peu à peu faite, à partir du 16e siècle, entre la géographie ancienne et la géographie moderne. Les Grandes Découvertes rendirent rapidement obsolètes la géographie des Anciens, qui devenait ainsi un outil pour l’histoire. C’est ainsi, par exemple, qu’après Abraham Ortelius, Pierre Bertius publiait en 1618 un Theatrum geographiæ veteris, dans lequel il reproduisait l’édition en grec et en latin de la Géographie de Ptolémée avec les annotations de Mercator, ainsi que d’autres œuvres, comme la Table de Peutinger ou l’Itinéraire d’Antonin. La compilation d’œuvres cartographiques passées, d’abord sans ordre chronologique, mettait en lumière le progrès des connaissances cartographiques européennes et aboutit à la « géographie triomphante » du 19e siècle déjà évoquée. Mais ce croisement de l’histoire et de la géographie fut l’occasion d’une autre innovation : l’atlas historique [Hofmann, 2000 ; Goffart, 2003].

Le principe fondamental d’un ouvrage géographique dont le feuillettement même supplée la narration historique a été utilisé pour la première fois en 1651, dans le livre de Philippe de La Rue, La Terre Sainte, mais à une échelle très modeste, puisqu’il n’est composé que de six cartes, ordonnées selon le temps, de l’Exode jusqu’à « la Sourie [Syrie] d’aujourd’hui ». On retrouve le même procédé en 1705 dans le livre de Nicolas de La Mare, Traité de police, où l’auteur retrace en huit plans l’histoire de la ville de Paris, de l’époque romaine au présent. Le premier Atlas explicitement qualifié d’« historique » parut en 1705, à Amsterdam, d’un auteur anonyme, « M.C««««« », probablement Zacharie Châtelain, un huguenot ayant fui la répression de la fin du règne de Louis XIV. Toutefois, si le titre est nouveau, le contenu ne l’est guère et n’est constitué que d’une présentation conventionnelle des pays du monde. En 1705 également, parut une double carte intitulée Theatrum historicum ad annum christi quadringentesimu, « Théâtre historique en 400 de l’ère chrétienne », divisée en une Pars occidentalis et une Pars orientalis. Elle était l’œuvre de Guillaume de L’Isle (1675-1726). Comme celui-ci l’annonçait en marge, « cette carte doit être accompagnée de quelques autres, qui serviront toutes ensemble à faire voir l’état du monde connu dans les différents temps » ; mais une mort quelque peu prématurée n’a pu permettre l’achèvement de cet atlas. Dans les années 1730-1740, le cartographe Johann Matthias Hase (1684-1742), ou Johannes Hasius, réalisa plusieurs ouvrages géographico-historiques qui s’apparentent à des atlas. En 1739, il publia à Nuremberg une Regni Davidici et Salomonaei descriptio geographica et historica, una cum delineatione Syriae et Aegypti pro statu temporum sub Seleucidis et Lagidis regibus mappis luculentis exhibita, et probationibus idoneis instructa ; et en 1742, Phosphorus historiarum, vel Prodromus theatri summorum imperiorum : « Lumière de l’histoire, ou Prodrome du théâtre des plus grands empires ». Témoin également de cette dynamique historico-cartographique, un manuscrit conservé à la Bibliothèque nationale de France, daté de 1747 et attribué à Gilles Robert de Vaugondy (1688-1766), qui s’intitule Atlas des révolutions du globe [*]. L’ouvrage est composé de 66 cartes occupant chacune une double page et couvrant l’Eurasie, de l’Espagne à la Corée. La réalisation en reste cependant assez grossière avec de nombreuses fautes. Enfin, notons, également à l’état de manuscrit, l’œuvre de Michel Picaud de Nantes, par ailleurs inconnu, réalisée en 1763 sur la base d’un mémoire rédigé par un certain Dupré un Atlas des révolutions de l’univers représentées en trente cartes, et qui mériterait une étude approfondie.

Les atlas historiques se multiplièrent au cours du 19e siècle et s’imposèrent comme un genre en soi, bien établi aujourd’hui. Christian Grataloup dans Lieux d’histoire a souligné l’intérêt à étudier ce type d’ouvrages pour le discours géohistorique dont ils sont porteurs [Grataloup, 1996]. Parmi les atlas du début du 19e siècle, l’un se démarque par l’originalité du traitement graphique. Publié en 1830, il a été réalisé par Edward Quin (1794-1828). Le dessein de l’auteur est clairement de proposer un nouveau support à l’enseignement de l’histoire grâce à un ensemble de cartes réalisées à la même échelle afin de montrer la continuité d’un récit mondial qui est celui de l’extension de la domination européenne.

« L’idée directrice de ce volume est de présenter l’histoire connue du Monde comme un tout, plutôt que sous la forme de fragments ; et comme un ensemble cohérent et uniforme, au lieu de parties dessinées selon des proportions variables, et des plans différents, voire opposés.

Quel a été le système commun dans l’instruction de la jeunesse en ce qui concerne cette partie du savoir humain ? Habituellement, on met dans les mains d’un jeune étudiant une Histoire de la Grèce, une autre de Rome, peut-être une de l’Angleterre, et parfois un ou deux volumes d’Histoire universelle, qui, de par son caractère compressée, n’a que peu d’intérêt. Il arrive même que ces récits puissent être accompagnés de quelques cartes, chacune dessinée selon une échelle différente, et se rapportant à une période différente. Et après avoir traversé cette courte formation, dont il est à craindre qu’elle comprenne tout ce que le plus grand nombre des écoliers reçoit, quelles idées de l’histoire du Monde l’écolier garde-t-il ? […]  En bref, quelle idée générale peut-il avoir des grandes lignes de l’histoire, quand son attention a été dirigée seulement vers un ou deux points de la surface terrestre, et ce durant une période donnée ?

Il n’est pas souhaitable de sous-évaluer ou de rejeter le fait de présenter à la jeunesse des histoires magnifiques et animées de la Grèce antique et de Rome. Mais dans le même temps, il faut concéder que les passages intéressants ne sont que des fragments, et que si l’attention de l’élève est occupée complètement ou en partie avec eux, il est probable qu’il ne conçoive qu’une idée très imparfaite ou erronée de l’histoire universelle. »[1]

Pour pallier cet enseignement fragmentaire, à la fois discontinu et difforme, Edward Quin proposait une série de vingt-et-une cartes réalisées selon la même échelle, mais partiellement couvertes de nuages noirs selon une logique de dévoilement afin de montrer l’élargissement progressif de la Civilisation, confondue avec une histoire européenne. Les choix graphiques explicitent cette dichotomie civilisation / barbarie :

« Il y a toujours eu, à chaque âge du monde, des parties de la terre non pas inconnues, mais classées, par leur manque de civilisation, de gouvernement régulier, et aux limites connues et reconnues, sous le terme général de pays barbares. Telle était la Scythie durant toute l’Antiquité, tel est l’intérieur de l’Afrique aujourd’hui.

Maintenant, en distinguant les royaumes successifs de la terre dans nos cartes par des couleurs appropriées, il était évidemment impossible d’assigner une couleur distincte à ces parties. Les couleurs que nous avons utilisées généralement pour désigner et distinguer un État ou un Empire d’un autre, et à montrer leurs limites respectives et l’étendue de leur domination, étaient inutilisables pour les déserts peuplés de tribus n’ayant aucune forme stable de gouvernement, ou d’existence politique, ou de limites territoriales connues. Ces types de pays cependant, nous les avons couverts de la même manière à toutes les périodes par un ombrage olivâtre, que l’œil de l’étudiant repérera vite sur les marges de toutes les cartes, et qui désigne à travers toute l’œuvre, les pays barbares et non civilisés auxquels nous avons fait allusion. »[2]

L’atlas se présente ainsi :

Quin, 1830, An Historical Atlas

Figure 1. L’Atlas historique animé (cliquez pour agrandir), légende des cartes en annexe, David Rumsey Map Collection.

L’animation donne à voir l’atlas comme aucun feuilletage ne pourrait le faire et révèle véritablement l’intention de son auteur : un discours géohistorique du monde. Le terme de « géohistoire » n’est pas un abus ici ; l’auteur lui-même souligne sa volonté de combiner les deux disciplines, ce qui est au demeurant le propre des atlas historiques :

« Chaque carte successive combine donc, en un seul regard, à la fois la Géographie et l’Histoire de l’âge auquel elle se réfère, montrant par son étendue les limites du monde connu, et par ses couleurs les empires respectifs en lesquels le monde est distribué. » [3]

Reste l’originalité même de cet atlas, à savoir le choix de masquer une partie des cartes par des nuages. L’auteur s’en explique dans la préface :

« En faisant ainsi, nous n’oublions pas que les faits réels de la géographie de la terre à ces périodes sont les mêmes qu’aujourd’hui, que la Chine et l’Amérique existaient autant à l’époque de Cyrus qu’à présent, bien qu’inconnues de la plus grande partie des êtres humaines civilisés. Aussi, nous ne devons pas omettre ces pays de nos cartes, bien qu’ils n’eussent pas d’existence, et pourtant nous n’avons pas à les montrer, comme formant une partie du monde connue à l’âge délimité. »[4]

Cette présentation appelle deux critiques. La première est inspirée de la réflexion séminale de Christian Grataloup, à l’orée de Lieux d’histoire :

« L’intention est de ne point se satisfaire d’une sorte de projection de diapositives : l’Histoire produisant de nouvelles configurations géohistoriques que des images, des cartes, enregistrent et donnent à voir. Peut-être les configurations mêmes sont-elles des facteurs de ces changements comme elles peuvent l’être des permanences. Cette hypothèse de l’espace en tant qu’acteur, nous allons l’éprouver. »[5]

La géographie n’est pas simplement l’« œil de l’histoire », pour reprendre l’expression d’Abraham Ortelius, elle ne se limite pas au travail cartographique et à la simple localisation des lieux de l’histoire. La spatialisation doit au contraire aboutir, parfois par l’abstraction et par l’expression schématique, à une véritable géographicisation de l’analyse historique, c’est-à-dire à la mise en lumière des différents facteurs (espaces, milieux, territoires) et des différents acteurs (individus, groupes sociaux, États…) qui constituent le système spatial d’un lieu. De ce point de vue, un atlas historique est un outil pratique, mais il n’est que cela.

La deuxième critique s’appuie sur la réflexion d’un autre géographe, James M. Blaut, développée dans The Colonizer’s Model of the World. L’Atlas historique de Quin fournit en effet une magnifique illustration de ce que Blaut a appelé l’« histoire-tunnel », fondée sur une logique dedans/dehors.

« C’est l’idée que le Monde a un intérieur et un extérieur. Jusqu’à présent, l’histoire mondiale a été, pour l’essentiel, l’histoire de l’intérieur. L’extérieur a été, généralement, considéré comme sans importance. L’histoire et la géographie historique, telles qu’elles ont été enseignées, écrites et pensées par les Européens jusqu’à l’époque de la Seconde Guerre mondiale, et encore (comme nous le verrons) à bien des égards aujourd’hui, se situent, en quelque sorte, dans un tunnel de temps. Les murs imaginaires de ce tunnel sont les limites de la Grande Europe. L’histoire consiste à chercher, dans un sens ou dans l’autre, à l’intérieur de ce tunnel temporel européen et à décider de ce qui arrive, où, quand et pourquoi. “Pourquoi” évidemment implique des connexions avec des événements historiques, mais seulement les événements qui se situent dans le tunnel européen. À l’extérieur de ces murs, tout semble réduit à une tradition immuable, sans temps, sans changement. J’appellerai cette manière de penser “la vision historique tunnel”, ou tout simplement “l’histoire tunnel”. »[6]

Au final, l’Atlas historique de Quin est autant un document pour l’historiographie globale que pour l’histoire globale. D’une part, il montre comment s’est écrit un Grand Récit de la civilisation européenne, un « roman civilisationnel » qui continue de former l’arrière-plan de l’appréhension occidentale de l’histoire du Monde. D’autre part, ce récit cartographique participe de l’histoire globale elle-même comme discours justificateur de l’impérialisme européen. Ce billet complète donc bien le précédent dans l’étude de la place de la cartographie européenne dans ce « vol de l’histoire » dénoncé par Jack Goody [Goody, 2010].

Alors bien sûr, aujourd’hui, ce document doit être pris avec la distance qui s’impose et qui sied à l’historien. Deux siècles, ou presque, après, cet atlas est un objet d’histoire. L’Europe a tourné la page de la colonisation. C’est un fait. Pourtant, comparons un instant ce récit géohistorique aux programmes actuels de collège.

Classe de sixième
I. L’Orient ancien
II. La civilisation grecque
III. Rome
IV. Les débuts du judaïsme et du christianisme
V. Les empires chrétiens du haut Moyen Âge
VI. Regards sur les mondes lointains
Classe de cinquième
I. Les débuts de l’islam
II. L’Occident féodal, XIe – XVe siècle
III. Regards sur l’Afrique
IV. Vers la modernité, fin XVe – XVIIe siècle
Classe de quatrième
I. L’Europe et le monde au XVIIIe siècle
II. La Révolution et l’Empire
III. Le XIXe siècle
Classe de troisième
I. Un siècle de transformations scientifiques, technologiques, économiques et sociales
II. Guerres mondiales et régimes totalitaires (1914-1945)
III. Une géopolitique mondiale (depuis 1945)
IV. La vie politique en France

Dans le détail, le contenu de l’enseignement est bien sûr différent, mais dans ses grandes lignes, si on laisse de côté l’histoire du 20e siècle qui ne peut pas être prise en compte dans la comparaison, le récit s’inscrit dans la même logique. On observe même des reculs, comme l’attention portée aux invasions mongoles et à la « pax mongolica » ; lorsqu’on voit toute l’importance accordée aujourd’hui à un événement comme la mort de Tamerlan en 1405 [Darwin, 2007], on peut émettre ne serait-ce qu’un regret…. Tout juste, a-t-on fait un peu de place à des « regards », c’est le terme utilisé, vers l’extérieur du tunnel : la Chine, l’Afrique. Et pourtant, ce petit pas de côté a été critiqué, l’Inspection générale a été attaquée, accusée de brader l’histoire nationale[7]. Ceci rappelle, il y a près d’un demi-siècle, les difficultés à mettre en œuvre le programme de terminale de 1957, modifié en 1959, qui était défini par l’étude de plusieurs civilisations : le monde occidental, le monde communiste européen, le monde musulman, le monde de l’océan Indien et de l’océan Pacifique, le monde africain noir. Ceci avait été l’occasion pour Fernand Braudel de rédiger un chapitre de manuel, « Une grammaire des civilisations » [Braudel, 1963], qui connut un regain de notoriété après sa réédition à part en 1987. Mais à l’époque, ce programme fut rapidement allégé des questions portant sur les civilisations extra-européennes dès 1966-1967 pour des raisons soi-disant d’évaluation [Legris, 2010].

On prend alors conscience de l’ampleur de la tâche pour ceux qui voudraient renouveler l’enseignement de l’histoire en France, ouvrir les fenêtres et y faire entrer un peu de globalité ; et pas seulement par l’extrémité du temps présent : la mondialisation est un processus beaucoup plus ancien et les intrications des sociétés, multiséculaires. L’histoire globale se doit de dissiper ces nuages qui continuent d’obscurcir notre vision pour permettre la « déclosion du monde » [Mbembe, 2010].

Annexe : légende des cartes

1) Carte recouverte de nuages montrant la terre connue de la Création jusqu’au Déluge, 2348 av. J.-C. (1646 Anno Mundi). Première période. L’Éden est montré à travers les nuages avec le mont Ararat et la Terre de Nod.

2) Carte recouverte de nuages montrant la terre connue du Déluge, 2348 av. J.-C., jusqu’à l’Exode des Israélites, 1491 av. J.-C. (de 1656 A.M. à 2513). Deuxième période. Au travers des nuages, la carte montre en couleurs les empires et les pays: l’Empire Assyrien, la Syrie, Canaan et l’Égypte.

3) Carte recouverte de nuages montrant la terre connue de l’Exode des Israélites, 1491 av. J.-C., jusqu’à la fondation de Rom, 753 av. J.-C. (de 2513 A.M. à 3251). Troisième période. Au travers des nuages, sont visibles en couleurs les régions précédentes ainsi que l’Asie Mineure, la Grèce et l’Italie.

4) Carte recouverte de nuages montrant la terre connue de la fondation de Rome, 753 av. J-C., jusqu’à la mort de Cyrus, 529 av. J.-C. (de 3251 A.M. à 3475). Quatrième période. Au travers des nuages, est visible en couleurs la Méditerranée, de l’Italie jusqu’à la Perse.

5) Carte avec des nuages laissant voir la terre connue de la mort de Cyrus, 529 av. J.-C., jusqu’à celle d’Alexandre de Macédoine, 323 av. J.-C. (de 3475 A.M. à 3681). Cinquième période. En couleurs avec l’Empire macédonien en cramoisi.

6) Carte avec des nuages laissant voir la terre connue de la mort d’Alexandre de Macédoine, 323 av. J.-C., jusqu’à la partition de l’Empire, 301 av. J.-C. (de 3681 A.M. à 3703). Sixième période. En couleurs avec la plus grande partie en bleu montrant l’étendue de l’Empire.

7) Nuages laissant voir la terre connue de la partition de l’Empire d’Alexandre, 301 av. J.-C., jusqu’à la fin de la Troisième Guerre punique. Septième période. En couleurs s’étirant de l’Espagne et du Maroc jusqu’à la Chine. La Grande Muraille de Chine est visible.

8 ) Nuages laissant voir la terre connue de la fin de la Troisième Guerre punique, 146 av. J.-C., jusqu’à la naissance du Christ (de 3853 A.M. à 4004). Huitième période. En couleurs s’étirant de l’Irlande et du Maroc jusqu’à la Chine. L’Empire romain est visible en jaune, l’Empire parthe en vert, l’Hindoustan en gris et la Chine en marron clair.

9) La Terre connue des Européens visible à travers des nuages de la naissance du Christ jusqu’à la mort de Constantin, 337 apr. J.-C. En couleurs de la Scandinavie et du Maroc jusqu’à la Corée.

10) La Terre connue des Européens visible à travers des nuages de la mort de Constantin, 337 apr. J.-C., jusqu’à la division de l’Empire romain en deux, à la mort de Théodose, 395 apr. J.-C. En couleurs, couvrant de la Scandinavie et du Maroc jusqu’à la Corée. L’Empire romain d’Occident et l’Empire romain d’Orient sont montrés par des couleurs différentes.

11) La Terre connue à travers des nuages de la division de l’Empire romain en deux, à la mort de Théodose, 395 apr. J.-C., jusqu’à la dissolution de l’Empire d’Occident, 476 apr. J.-C. Onzième période. L’Empire romain d’Occident est maintenant identifié en pourpre comme les « Nations nordiques ».

12) Le monde connu à travers des travers de la dissolution de l’Empire d’Occident, 476 apr. J.-C., jusqu’à la mort de Charlemagne, 814 apr. J.-C. Douzième période. Trois empires sont identifies: l’Empire de Charlemagne (jaune), l’Empire grec (jaune-vert) et l’Empire mahométan (vert).

13) Le monde connu montré à travers des nuages de la mort de Charlemagne, 814 apr. J.-C., jusqu’à la dissolution de son empire, 912 apr. J.-C. Treizième période. Des pays en Europe commencent à émerger et la masse terrestre au-dessus de la Scandinavie est montrée pour la première fois.

14) Le monde connu montré à travers des nuages de la dissolution finale de l’Empire de Charlemagne, 912 apr. J.-C., jusqu’à la Première Croisade, 1100 apr. J.-C., Quatorzième période. La carte est dominée par l’Empire germanique, les États mahométans et la Chine. Le Groenland peut être vu dans le coin supérieur gauche.

15) Le monde connu montré à travers des nuages du commencement des Croisades, 1100 apr. J.-C., jusqu’à la division de l’Empire mongol, à la mort de Kubilaï, 1292 apr. J.-C. Quinzième période. L’Empire de Kubilaï khan, en vert olive, domine plus de la moitié de la carte, s’étendant de la Hongrie jusqu’à la Mongolie et la mer de Chine.

16) La carte dépliée montre des nuages aux angles et décrit le monde connu depuis la division de l’Empire mongol, 1294 apr. J.-C., jusqu’à la découverte de l’Amérique, 1498 apr. J.-C. Seizième période. L’Afrique est montrée en entier pour la première fois et la côte oriental de l’Amérique, du Newfoundland jusqu’au bord septentrional de l’Amérique du Sud. Les Indes occidentales sont montrées en bleu.

17) La carte dépliée montre des nuages aux angles et décrit le monde connu depuis la découverte de l’Amérique, 1498 apr. J.-C., jusqu’à la mort de Charles V de Germanie, 1551 apr. J.-C. Dix-septième période. L’Amérique du Sud et les parties orientales et méridionales de l’Amérique du Nord ne sont plus couvertes de nuages. Les Philippines sont aussi visibles.

18) Des nuages sont seulement visibles en bordure de la carte, qui décrit le monde connu depuis la mort de Charles V de Germanie, 1558 apr. J.-C., jusqu’à la restauration des Stuarts en Angleterre, 1660 apr. J.-C. Dix-huitième période. L’Australie est incluse ainsi que les baies d’Hudson et de Baffin (avec d’importantes distorsions). La partie septentrionale de la Sibérie a été découverte.

19) Le monde entier est visible, sans nuage, pour la première fois. Les divisions politiques sont montrées depuis la restauration des Stuarts en Angleterre, 1660 apr. J.-C., jusqu’à l’indépendance des États-Unis d’Amérique, 1783 apr. J.-C. Dix-neuvième période. La région septentrionale du Canada n’a pas été explorée et a été laissée en blanc.

20) Le monde connu depuis l’indépendance des États-Unis d’Amérique, 1783 apr. J.-C., jusqu’à la plus extension de l’Empire français, 1811 apr. J.-C. Douzième période.

21) Le monde connu depuis la plus grande extension de l’Empire français, 1811 apr. J.-C., jusqu’à la fin de la paix générale, 1828 apr. J.-C. Vingt-et-unième période.


Bibliographie

Blaut J.M., 1993, The Colonizer’s Model of the World. Geographical Diffusionism and Eurocentric History, New York, The Guilford Press.

Braudel F., 1963, « Une grammaire des civilisations », in Baille S., Braudel F. & Philippe R., Le Monde actuel. Histoire et civilisations, Paris, Belin, pp. 143-475 ; réédition : Braudel F., 1987, Grammaire des civilisations, Paris, Arthaud/Flammarion.

Darwin J., 2007, After Tamerlane. The Global History of Empire, Londres, Allen Lane.

Goffart W.A., 2003, Historical Atlases. The First Three Hundred Years, 1570-1870, , Chicago/Londres, University of Chicago Press.

Goody J., 2010, Le Vol de l’histoire. Comment l’Europe a imposé le récit de son passé au reste du monde, trad. de l’anglais par F. Durand-Bogaert, Paris, Gallimard [éd. orig. 2006].

Grataloup C., 1996, Lieux d’histoire. Essai de géohistoire systématique, Montpellier, GIP / Reclus.

Hofmann C., 2000, « La genèse de l’atlas historique en France (1630-1800) : pouvoirs et limites de la carte comme “œil de l’histoire” », Bibliothèque de l’école des chartes, Vol. 158, N°1, pp. 97-128.

Legris P., 2010, L’Écriture des programmes d’histoire en France (1944-2010). Sociologie historique d’un instrument de politique éducative, thèse de doctorat, Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, disponible sur le site Hal-SHS.

Mbembe A., 2010, Sortir de la grande nuit, Paris, La Découverte.

Quin E., 1830, An Historical Atlas, Londres, L.B. Seeley & Sons.


Notes

[1] Edward Quin, 1830, An Historical Atlas, Londres, L.B. Seeley & Sons, p.1.

[2] Ibid.

[3] Ibid., p. 2.

[4] Ibid., p. 1

[5] Christian Grataloup, Lieux d’histoire. Essai de géohistoire systématique, GIP Reclus, Montpellier, 1996, p. 9.

[6] James M. Blaut, 1993, The Colonizer’s Model of the World. Geographical Diffusionism and Eurocentric History, New York, The Guilford Press, p. 5.

[7] Patricia Legris, « L’introduction controversée des civilisations extra-européennes dans les programmes d’histoire », sur le site Aggiornamento Histoire Géographie.

La géographie triomphante du 19e siècle : Louis Vivien de Saint-Martin

Au début du 19e siècle, même si le monde était déjà globalement reconnu, le sentiment fut très vif d’un immense progrès des connaissances géographiques européennes et c’est en faveur de celui-ci que le géographe danois installé en France Conrad Malte-Brun (1775-1826) plaidait avec énergie en 1807 lorsqu’il créa les Annales des voyages, de la géographie et de l’histoire. Dans l’éditorial du premier numéro, il soulignait l’étendue très vaste des connaissances contemporaines, tout en regrettant un certain retard de la géographie française en matière de publication, et défendait la nécessité de promouvoir l’activité géographique :

« Les préjugés des Anciens ont disparu ; les bornes qui resserraient le Monde, sont tombées de toutes parts ; il n’y a plus de Colonnes d’Hercule ; la fabuleuse Inde et l’obscure Thulé ne sont plus les extrémités de la terre. Plus hardi, plus actif, l’esprit humain embrasse, dans une seule et vaste idée, toutes les contrées du Monde, avec toutes leurs productions variées et avec les innombrables Nations qui les habitent. »[1]

Cependant, on peut penser avec Paul Claval que cette « histoire de la géographie comme épopée de la découverte de la Terre » a quelque peu souffert de son lien avec l’entreprise coloniale (Claval, 2007) et demeure aujourd’hui quelque peu ignorée. C’est le cas par exemple du géographe Louis Vivien de Saint-Martin (1802-1897), qui reprit l’entreprise de Conrad Malte-Brun, en dirigeant à partir de 1840 les Nouvelles annales des voyages et des sciences géographiques.

Vivien de Saint-Martin

Figure 1. Vivien de Saint-Martin, par Alexandre Quinet (fin 19e siècle), BNF.

On lui doit l’œuvre peut-être la plus emblématique de cette « histoire géographique », l’Histoire des découvertes géographiques des nations européennes dans les diverses parties du monde. Entamée en 1845, elle resta cependant inachevée, étouffée par l’ampleur du sujet.

« Cette activité infatigable que l’homme d’Europe porte dans toutes les voies ouvertes à la curiosité humaine, a eu en effet l’Univers entier pour théâtre. Tout ce que l’homme peut rechercher et découvrir, tout ce qui lui est donné de savoir et de connaître, l’Européen a voulu le rechercher et le savoir. Sa pensée audacieuse s’est élancée dans les incommensurables profondeurs du monde immatériel, son regard a sondé les espaces infinis où gravitent les astres, ses pas ont sillonné dans tous les sens l’habitation terrestre que Dieu lui a donnée pour domaine. Les mers qui couvrent de vastes parties du Globe ont été pour lui d’impuissantes barrières ; des constructions flottantes, œuvres de son génie, l’ont transporté vers les contrées et sous les climats qui semblaient lui devoir rester à jamais étrangers. Il n’a été arrêté ni par les glaces du pôle ni par les feux du tropique ; sa curiosité, qui semble s’accroître à chaque découverte, l’a conduit partout où habitent d’autres hommes. Il a recherché sous chaque climat les productions du sol pour en enrichir sa propre patrie. Il a mesuré et décrit tous les pays qu’il a visités. Il s’est élevé sur les plus hautes montagnes pour y observer les phénomènes de l’atmosphère qui nous enveloppe ; il est descendu dans les entrailles mêmes de la terre pour en connaître la formation et en rechercher l’origine. La Nature tout entière, dans sa vaste étendue et dans son infinie diversité, est ainsi devenue pour l’Européen un immense champ d’études qu’a fécondé sa haute intelligence, et dont les limites se reculent incessamment devant lui.

Parmi toutes les nations et toutes les races qui partagent avec l’Européen l’habitation du Globe, lui seul donc a porté sa pensée et ses investigations au-delà des bornes étroites de sa contrée natale. Les peuples mêmes les plus anciennement civilisés de l’Asie, les Hindous et les Chinois, n’ont jamais étendu leurs connaissances bien loin au-delà des mers ou des montagnes qui les bornent : pour eux, tout l’univers est dans leur patrie. La patrie de l’Européen, c’est le monde. »[2]

« Au milieu de la variété de tons et de tableaux qu’il comporte, ce magnifique ensemble a néanmoins son unité qui est en même temps pour l’esprit une direction et un point de repos : cette unité, c’est le résultat même de ces explorations multipliées dont il faut raconter les incidents ; c’est la connaissance du Globe terrestre. C’est là le lien commun qui réunit et fait converger vers un même centre les innombrables rayons de ce cercle immense. Suivre à la fois dans le temps et dans l’espace la marche quelquefois lente et comme assoupie, quelquefois brusque et rapide, des événements de toute nature, des voyages, des recherches, des explorations et des découvertes qui ont élevé graduellement les connaissances géographiques des nations savantes au point où elles sont arrivées aujourd’hui ; montrer d’une manière impartiale quelle a été la part de chaque peuple dans ce résultat final ; faire ressortir la mutuelle influence des grandes découvertes géographiques sur le progrès de la civilisation générale et du progrès des civilisations sur l’avancement des découvertes, et rechercher quelle action exerce cette double cause sur le bien-être individuel des peuples et sur la destinée générale de l’humanité ; étudier de ce point de vue et l’histoire géographique de la Terre dans son ensemble le plus général, et successivement celle de chaque région en particulier ; exposer enfin, comme dernier résultat, le tableau bien complet des notions de toute nature que l’Europe possède aujourd’hui sur les pays et les peuples des autres parties du Monde qu’elle a découvertes ou explorées, c’est-à-dire sur l’Asie, l’Afrique, le Nouveau-Continent et l’Océanie : tel est le plan qui nous paraît convenir à un travail de cette nature ; tel est celui que nous nous sommes tracé. »[3]

En 1874, Vivien de Saint-Martin reprit son projet initial et publia un Atlas dressé pour l’Histoire de la géographie et des découvertes géographiques depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos jours. Composé de 13 cartes, il retrace l’évolution des connaissances géographiques depuis Homère, et donne tout à la fois à voir une histoire de la cartographie et une certaine histoire de l’Europe. Les quatre cartes suivantes sont extraites de cet ouvrage (David Rumsey Map Collection).

Vivien de Saint-Martin_1874_Monde héroïque

Figure 2. Géographie aux temps héroïques de la Grèce (Planche Ibis), d’après Homère et Hésiode.

Vivien de Saint-Martin_1874_Monde connu des Anciens

Figure 3. Le monde connu des anciens au deuxième siècle de notre ère (Planche V), d’après Ptolémée, même si celui-ci n’est pas nommé.

Vivien de Saint-Martin_1874_Monde connu au XIIIe

Figure 4. Le monde connu au XIIIe siècle (Planche VIII), que Vivien de Saint-Martin considère comme étant la juxtaposition de « trois grandes coupes historiques » : « l’Empire Mongol, qui comprenait la majeure partie de l’Asie ; le Monde Arabe, ou Monde Musulman, embrassant le Sud-Ouest de l’Asie et les parties alors connues de l’Afrique ; le Monde Chrétien, c’est-à-dire l’Europe moins les parties orientales envahies par les Mongols ».

Vivien de Saint-Martin_1874_Planisphere

Figure 5. Planisphère, sur la projection de Mercator (Planche XII), qui représente le monde actuel, c’est-à-dire tel qu’il est connu à la fin du XIXe siècle. On notera que la carte est centrée sur le Pacifique, ce qui est relativement fréquent à l’époque, contrairement à ce qu’on pourrait croire aujourd’hui, et ce qui atténue en partie l’eurocentrisme de l’auteur.

Cependant, si l’œuvre de Vivien de Saint-Martin apparaît aujourd’hui comme une des œuvres emblématiques du discours eurocentriste du 19e siècle, à quand peut-on faire remonter cette vision du monde ? On retrouve là un des débats historiographiques majeurs de l’histoire globale [Blaut, 1993 ; Goody, 2010], et je tenterai de montrer ici que l’histoire de la cartographie peut apporter un certain éclairage.

Le discours triomphaliste de la géographie du 19e siècle est une amplification de la césure entre « géographie ancienne » et « géographie moderne » formalisée au siècle précédent, mais dont l’origine se trouve au 15e siècle, marqué par deux événements contraires : la redécouverte de la Cosmographie de Ptolémée d’une part, la « découverte de l’Amérique » d’autre part. Si le titre du livre du grand géographe grec était connu, on n’en trouvait aucun manuscrit dans la Chrétienté latine. Aussi l’enthousiasme fut-il grand au début du 15e siècle lorsque des exemplaires de la Cosmographie [Le titre Géographie fut traduit par Cosmographie car le mot même de « géographie » n’était pas usité, car quasi inexistant en latin. Il n’a commencé à devenir commun en français qu’au fil du XVIe siècle.] de Ptolémée commencèrent à circuler en Europe sur la base du manuscrit grec que Manuel Chrysoloras avait apporté à Florence en 1397 en provenance de Byzance et de la traduction en latin que réalisa Jacopo Angeli vers 1409. Toutefois, celle-ci ne comprenait aucune carte. Le plus ancien exemplaire d’un manuscrit latin avec des cartes est celui conservé à la bibliothèque de Nancy, qui fut copié en 1418 sur ordre du cardinal Fillastre de Reims après le concile de Constance, mais dont les cartes ne furent ajoutées qu’en 1427. De même, la première édition imprimée de Ptolémée, qui date de 1475, à Vicence, ne comporte pas les cartes, au contraire de l’édition de Bologne de 1477 (Edson, 2007).

Pourtant, paradoxe de l’histoire, cet opus majeur de la géographie antique, en soi sans doute déjà dépassé pour décrire le monde du 15e siècle, est réapparu un siècle à peine avant les Grandes Découvertes. Or celles-ci ont profondément modifié la vision européenne du globe et ont rendu le texte de Ptolémée quasiment obsolète. Dès 1482, de nouvelles cartes, représentant le Nord de l’Europe, sont ajoutées ; et dans l’édition de Strasbourg de 1513, on compte ainsi vingt « nouvelles cartes » (tabulæ novæ). Un demi-siècle plus tard, la séparation introduite entre « ancien » et « nouveau » est accentuée par Abraham Ortelius dont son Theatrum orbis terrarum (1570). Celui-ci, en effet, ne comprend plus que des cartes du monde contemporain, tandis que les cartes anciennes sont regroupées à part dans un ouvrage publié ultérieurement, le Parergon (1579). On notera d’une part, le sous-titre de l’ouvrage : Veteris geographiæ aliquot tabulæ, « Quelques tableaux d’ancienne géographie » ; d’autre part, l’invention (déguisée en reprise) de l’aphorisme : Historiæ oculus geographia, « la Géographie est l’œil de l’Histoire », sous-entendu : la géographie ancienne. Entre-temps, cette disjonction avait déjà conduit Ortelius à publier en 1578 un livre des correspondances toponymiques entre passé et présent, la Synonymia geographica. À partir de là, les ouvrages se multiplient. En 1618, Pierre Bertius publie un Theatrum geographiæ veteris, dans lequel il reproduit l’édition en grec et en latin de la Géographie de Ptolémée avec les annotations de Mercator, ainsi que d’autres œuvres, comme la Table de Peutinger et l’Itinéraire d’Antonin, dont la valeur de documents historiques est évidente. Dix ans plus tard, en 1628, Bertius publie une Geographia vetus ex antiquis et melioris notæ scriptoribus (« Géographie ancienne d’après les meilleurs auteurs antiques »). En 1768, Jean-Baptiste Bourguignon d’Anville publie à son tour une Géographie ancienne abrégée.

Parallèlement à cela, les géographes publièrent des ouvrages de « géographie moderne » tenant compte des connaissances accumulées au fil des explorations. Ce fut précisément le mérite de Bourguignon d’Anville de blanchir les cartes modernes en les expurgeant de toute information héritée et non actualisée. Le clivage ne fit ainsi que s’accroître. Loin de toute « renaissance », la comparaison entre les anciens et les modernes affirmait la grandeur de ces derniers et révélait par l’image cartographique le progrès européen et la domination de l’Europe sur le Monde. Les géographe du 19e siècle croient triompher en parvenant à un horizon aperçu dès le 16e siècle. La « grande divergence » avant d’être réelle fut imaginée et s’ancre dans une modification de la conception spatiale européenne (Besse, 2003).

Bibliographie

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Claval P., 2007 (2e éd.), Épistémologie de la géographie, Paris, Armand Colin.

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Malte-Brun C., 1807, « Discours préliminaire sur la nature et le but de cet ouvrage », Annales des voyages, de la géographie et de l’histoire, tome 1, n° 1, pp. 3-15.

Vivien de Saint-Martin L., 1845, Histoire des découvertes géographiques des nations européennes dans les diverses parties du monde, Paris, Arthus-Bertrand.

Vivien de Saint-Martin L., 1874, Atlas dressé pour l’Histoire de la géographie et des découvertes géographiques depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos jours, Paris, Hachette.


Notes

[1] Conrad Malte-Brun, « Discours préliminaire sur la nature et le but de cet ouvrage », Annales des voyages, de la géographie et de l’histoire, 1807, tome 1, n° 1, p. 6.

[2] Louis Vivien de Saint-Martin, 1845, Histoire des découvertes géographiques des nations européennes dans les diverses parties du monde, Paris, Arthus-Bertrand, tome 2, préface, pp. ix-x. À noter qu’il n’existe pas de tome 1, et que la préface du tome 2 définit donc l’objet de l’œuvre.

[3] Louis Vivien de Saint-Martin, 1845, Histoire des découvertes géographiques des nations européennes dans les diverses parties du monde, Paris, Arthus-Bertrand, p. xx.

Climat : du mythe eschatologique à la (chaude) réalité

Tout est déjà écrit. Nous allons mourir un jour et notre civilisation s’effondrera. C’est dans l’ordre des choses. Notre monde judéo-chrétien a démarré par un récit de la Création qui ne peut s’achever que par un récit de la Fin. En droite ligne : dans le monde occidental, la flèche du temps ne fait pas de cercle. Toutefois, depuis que le changement climatique est apparu évident à (presque) tous, et qu’ainsi a été réalisée l’acculturation en matière de contingences environnementales et énergétiques, le temps s’est singulièrement tassé. Nous allons finir, certes, mais plus tôt que prévu. Par un monde qui nous sera devenu impropre tant nous l’aurons abîmé. À force d’avoir voulu jouer à Prométhée, ou à Dieu, nous avons usé ce qui nous a fait vivre alors que la réparation n’est possible que sur une échelle de temps infiniment plus longue que celle de l’humaine condition.

L’apocalypse arrive donc, et Dieu, ou Gaïa, ou dame nature, ou un hypothétique futur gouvernement mondial à costume vert reconnaîtra les siens. Seuls seront sauvés les Terriens qui auront condescendu à juste effleurer le monde pour survivre. Heureux sont déjà les pauvres ! Leur frugalité obligée est la voie de la rédemption. Imposons-nous l’indigence énergétique ! Éteindre la lumière en sortant, c’est le début de la pénitence. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) est le prophète de notre fin proche.

Un discours catastrophiste

Bien que disparu des écrans de l’actualité pour cause de crise et d’élections ainsi que du rejet d’une opinion ne supportant plus un discours catastrophiste, culpabilisant et abstrait, le changement climatique est aujourd’hui une sourde inquiétude. Il fait peur. Il est cinématographique : les images que l’on s’en fait, nourries du contenu de notre vieux pot culturel religieux, du cinéma, des documentaires télévisuels, des publicités, des campagnes d’information, puisent aux canons de l’eschatologie. Aux climats qui changent sont associés les incunables de l’inondation, de la sécheresse, de la migration des damnés, de la faim, de la soif, de la pauvreté, de l’épidémie, de la guerre pour ce qui reste à exploiter, de l’autoritarisme pour tenter en dernier lieu de s’adapter.

Dans les esprits les moins contaminés par l’iconographie catastrophiste, apparaissent des images de l’impensable retour en arrière : le monde de demain sera forcément celui d’avant la parenthèse de l’énergie pas chère, un passéisme d’avant-guerre, d’avant les trente glorieuses, un voyage dans le temps où l’on comptait tout parce qu’il y avait peu, que tout était cher, à l’époque où l’on ne dépassait que rarement un rayon de 5 km autour de son village, en vêtements rêches faits pour durer, quand on gardait même l’eau des légumes pour arroser le jardin et que l’on ne prenait pas de douche tous les jours. Non ! Pour que l’acquisition, au frais de la planète, de notre extraordinaire confort ne soit pas qu’une parenthèse, faisons confiance en notre religion laïque, la science et la technologie. Du Giec, nous interprétons tout selon notre façon très manichéenne de canaliser nos peurs.

Que nous disent les gens qui savent ? Que la seule incertitude réside dans le degré de l’inéluctable changement auquel nous allons devoir nous adapter. Et que plus tard nous nous adapterons, plus douloureuse sera cette adaptation. Faudra-t-il par exemple se mettre à migrer, nous autres Français qui n’avons jamais quitté nos terres au cours de notre histoire ? Ou bien des hordes de réprouvés affamés, assoiffés par le climat bouleversé, viendront-ils s’entasser à nos frontières ? Sans doute pas. Les migrations climatiques sont une splendide story telling. Tout d’un coup, en quelques mois, des dizaines de millions d’humains quitteraient leur habitat rendu invivable en espérant atteindre le nôtre.

La légende des migrations

Les bons scénarios reposant sur les mêmes solides bases, les migrants de demain sont ceux d’aujourd’hui : les pauvres, l’Afrique, le Bangladesh, le Tiers-Monde. Ces gens habitués depuis leur naissance à la difficulté et à la surprise de vivre encore seraient donc tellement pris au dépourvu par l’avancée des eaux et la sécheresse des terres qu’ils en décideraient de partir tous pour s’en aller vers le Nord, région censée être épargnée par le changement climatique, dont ils connaissent par ailleurs l’évidente générosité de l’accueil ! « On » parle, jusqu’à l’Agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR), de 500 millions de migrants climatiques au mitan de ce siècle. Et de risque majeur pour la sécurité intérieure américaine, devant le terrorisme, à cause des bouleversements géopolitiques et de l’entassement aux frontières que déclencheraient les hordes de laissés-pour-compte. Risque d’ailleurs moqué par Roland Emmerich, qui l’a inversé dans son blockbuster climatique The Day after Tomorrow (Le Jour d’après, 2004) : ce film montre des masses d’Américains, paniqués par le gel de leur pays, se pressant à la frontière du Mexique qui ne se presse pas pour les accueillir.

La légende des migrations, c’est avant tout un moyen de rendre plus effrayant le changement climatique pour le grand public, et les élus qui sont tentés de voter de nouveaux budgets militaro-policiers. Tout est bon pour multiplier les caméras et les murs. Pourtant, lors de l’immense sécheresse du milieu des années 1980 (« We are the world »), il est indéniable qu’il y eut des migrants, photographiés, comme s’il illustrait la Bible, par Sebastiao Salgado. Mais ce furent là des hommes et des femmes qui sont restés pour leur écrasante majorité à l’intérieur de leurs frontières. Les ONG ont vu les ruraux partir pour les villes, les pères ou les premiers fils errer pour gagner des sous, mais elles n’ont compté que très peu de vaillants partis se cacher sous un camion dans l’espoir de trouver un emploi de cuistot clandestin à Paris ou Londres. Abandonner son village envahi par le sable, c’est une chose, fuir son pays, c’est un désordre culturel d’un tout autre niveau.

La question ne se pose pas de la même façon pour les îliens qui, selon la topographie et la surface de leur nation, seront forcés de partir. Se pose-t-elle également pour nos concitoyens vivant au plus près de la mer ? Le drame de La Faute-sur-Mer a réveillé la peur réflexe de la submersion. On a oublié que ce n’est pas la mer qui a tué, mais les maisons posées sous son niveau par une certaine envie de nature que ni les préfets ni les élus n’ont voulu dissuader en rappelant la loi littoral et les PPRI (plan de prévention du risque inondation). La bêtise est toujours mortelle lorsque les éléments réclameraient un peu de bon sens. La mer montera, elle va monter de plus en plus vite, mais à un rythme que l’on connaît : lent, de toute façon, il nous autorise à prendre notre temps pour reculer, nous protéger derrière du béton ou apprendre à construire autrement. Le climat change lui aussi à un rythme encore lent, selon une tendance que l’on apprécie de mieux en mieux localement. Pourquoi donc au Niger et en Croatie, où il fait de plus en plus sec, les populations attendraient-elles pour faire leur sac de tourner de l’œil sous l’ardent soleil ?

Un avenir contrasté

Il y aura des migrations, assurément, mais d’une qualité différente. Le changement climatique assèche chaque année un peu plus le pourtour méditerranéen, en particulier les Balkans et le Maghreb. L’eau est de moins en moins disponible en été, alors que ses usages, notamment le premier de tous, l’agricole, augmentent. Les touristes accepteront-ils de venir encore dans des pays où la pratique de la douche et de la piscine sera sans doute bientôt limitée ? Les personnes âgées viendront-elles toujours exciter le marché immobilier de la Côte d’Azur, alors que la canicule sera certainement une habitude à partir de 2050 ? Ou bien le touriste pas cher décidera-t-il de visiter ailleurs, et l’aîné de « migrer » dans la vallée du Rhône et la moyenne montagne rendue plus clémente par le changement climatique ? La réalité des migrations est là… Elle appelle des décisions politiques lourdes, en termes à la fois d’allocation de la ressource en eau (l’eau de boisson des résidents sera privilégiée contre tout autre usage, au Maghreb comme dans l’Hérault, dans les Alpes-Maritimes comme à Zagreb) et d’aménagement du territoire – et donc, de politique foncière (accueillir des populations plus jeunes à Nice, aménager la montagne pour un usage estival, reculer derrière le littoral ou rester, mais se protéger, tout cela exige de coûteux changements d’infrastructures).

Les chercheurs nous promettent un avenir contrasté. Sous nos latitudes, des saisons plus marquées, avec des étés plus durs, des hivers plus mous, des intersaisons plus précoces et plus variables. Moins d’eau quand il fera plus chaud, plus de pluie lorsque la neige est attendue. En montagne, moins de neige, tombant plus tardivement, avec une fonte avancée : les rivières ne descendront pas comme aujourd’hui. La saison végétative des plantes, allongée et elle aussi plus précoce, leur productivité, augmentée tant qu’il y aura de l’eau dans le sol, ne laisse rien présager de mauvais si ce n’est une fragilité plus grande d’arbres et de plantes qui auront grandi trop vite et seront soumis à des parasites tout autant favorisés par la hausse de la température et celle, concomitante, du taux de dioxyde de carbone dans l’air. Déjà, il neige beaucoup moins et il fait beaucoup moins froid dans la fameuse station jurassienne de Mouthe, réputée pour son froid sibérien. On n’y skie presque plus. Partout en France et en Europe, les arbres, les plantes, les animaux remontent. Le pin maritime empiète sur l’habitat du hêtre, lequel, sur les sommets, contraint le sapin à s’installer sur les prairies d’altitude. Nos paysages, demain, n’auront plus le même visage. En 2050, la Provence aura des allures marocaines et la Normandie ressemblera au Poitou.

Le stress des écosystèmes

Quant aux régions viticoles, elles profitent. Le vin tiré est de meilleure qualité, ainsi que nous le démontre chaque année le Guide Hachette des vins : depuis une trentaine d’années, les années exceptionnelles s’accumulent. Les mauvais crus s’améliorent, les grands, de par leur complexité organoleptique et l’étroitesse de leurs terroirs, ont du mal à se maintenir. Les jus récoltés quinze à vingt jours plus tôt qu’il y a quarante ans, au cours de journées trop chaudes, ne sont plus les mêmes, ce qui exige des maîtres de chais une grande inventivité pour les conduire selon leur cahier des charges. Des vignerons, il faudrait s’attendre à quelques révolutions. Mais c’est un milieu par nature conservateur. Voudront-ils effeuiller le sommet des vignes en été et laisser l’herbe pousser entre les ceps afin de limiter l’évaporation ? L’Inao (Institut national de l’origine et de la qualité) acceptera-t-il que l’on arrose au goutte-à-goutte ? Les Bordelais se satisferont-ils de l’implantation du sidi-brahim entre leurs cailloux ? Que diront-ils de celle du cabernet sauvignon en Champagne ?

Les mêmes questions se posent pour l’agriculture en général. Les plantes profiteront du changement climatique tant qu’il y aura de l’eau dans le sol. L’essentiel est donc de posséder demain un sol vivant, qui sait conserver l’eau, ce qui n’est pas le cas des terres soumises aujourd’hui à la production intensive. Notre avenir sera agricole, il dépendra en grande partie de notre ressource la plus menacée, le sol. Une belle révolution agronomique en perspective, si le monde agricole l’accepte.

Tout cela, nous le savons, car c’est l’observation de la nature qui nous le dit, et la science de laboratoire qui le soutient. La France glisse vers le sud. Paris se retrouvera-t-il à Bordeaux, Avignon, Florence ou Barcelone en 2050 ? C’est la seule interrogation des chercheurs. Qui n’a pas le même impact en termes d’actions politiques. Les élus feraient bien de regarder le prix du pétrole pour s’exercer à réfléchir plus loin que le énième rond-point dont ils ont su décorer nos villes. Le changement climatique amplifie les conséquences des autres problèmes d’environnement, parce qu’il stresse les écosystèmes : ressource en eau, cycle de l’eau, état des sols, de la biodiversité, intensité et fréquences des inondations et des glissements de terrains, voilà des paramètres de la vie d’une génération dont le premier facteur de dégradation est l’étalement urbain. Lotissements, thuyas, Zac, parkings ont altéré les sols, le cycle de l’eau, fragmenté les milieux naturels, uniformisé les paysages. Avec des conséquences environnementales que l’on sait maintenant mesurer pécuniairement.

Changer de civilisation

« Et alors ? », entendait-on il y a peu encore tant l’« environnement » passait derrière les considérations d’emploi et de réélection. L’imparfait est de mise, car depuis que la peur de la hausse irrépressible de l’essence s’est installée dans l’esprit de l’électeur, les élus prennent conscience que l’étalement urbain se paiera d’abord, et à un prix très élevé, par la précarité énergétique de la majorité des gens qui auront plus ou moins choisi d’habiter loin de leurs lieux de travail. Les ghettos énergétiques seront des ghettos sociaux, empêcher leur installation exige de revoir en profondeur l’organisation des territoires, d’intensifier les agglomérations, de maîtriser le prix du foncier, de conserver des terres agricoles, de privilégier les transports en commun, tous les transports en commun ; c’est-à-dire, in fine, le geste politique. Créer des lotissements basse consommation à 20 km en voiture du bassin d’emploi n’a pas de sens. Favoriser l’achat de véhicules peu émetteurs de CO2, c’est juste engorger les centres urbains avec des pots différents et maintenir un temps encore, par un coût plus faible au kilomètre, l’assujettissement du périurbain. Or, agir sur l’usage de l’auto et les distances à parcourir, c’est apprendre à lutter contre le changement climatique parce que cela contribue à désincarcérer des écosystèmes, à libérer de la terre agricole qui, bien tenue, a en plus le mérite d’être un bon puits de carbone, à réduire aussi notre facture énergétique, bien entendu.

L’énergie, justement, voilà le point crucial par lequel le politique peut montrer qu’il existe encore. Il nous faut réduire nos émissions de gaz à effet de serre ? Consommons moins ! Les énergies renouvelables n’ont pas un grand rendement ? Produisons au plus près des lieux de consommation, afin de limiter les pertes en ligne, et de créer un lien de responsabilité. Cela signifie abandonner, pour l’énergie de tous les jours, le principe sacro-saint de l’organisation centralisée des lieux de production, obliger le consommateur à être responsable de ce qu’il fait, considérer le citoyen en adulte apte à s’organiser avec ses voisins pour échanger de l’énergie. Le changement climatique est en réalité un défi à notre culture, car il nous impose de bouleverser totalement notre philosophie du monde, notre organisation politique et administrative, sans parler de notre modèle économique. C’est une opportunité de changer de civilisation sans la pression d’une guerre.

Il n’y a rien de catastrophique dans le changement climatique. Si ce n’est l’irrépressible propension humaine à ne rien faire quand rien ne se détache à l’horizon, et celle de la nature à rapprocher subitement l’horizon dès qu’un seuil a été passé. Nous avons le temps, mais le temps presse.

Article publié dans Les Grands Dossiers des sciences humaines, n° 28, sept.-oct.-nov. 2012.

L’agenda de l’histoire globale – 4e trim. 2012

Cet agenda couvre la période de septembre à décembre 2012. Ce sera le dernier publié sur le blog. À partir de fin septembre 2012, ce service basculera sur le site www.histoireglobale.com. Le pari de produire tous les trimestres un agenda sur le blog « Histoire globale », pendant deux ans, a montré ses limites : les annonces nous parvenaient trop tard, et nombre de manifestations intéressantes n’ont pas été annoncées. Nous espérons qu’une mise en ligne, actualisée plus régulièrement, offrira davantage de réactivité.

Colloques

Les sources de la mondialisation : pour une approche réflexive

Mercredi 19 et jeudi 20 septembre 2012.

Guyancourt (78280). 47 Boulevard Vauban.

Contacts : Lamia Missaoui, lamia.missaoui [at] libertysurf.fr ; Olivier Roueff, o.roueff [at] free.fr

Thématique émergente des sciences humaines et sociales il y a encore une vingtaine d’années, la mondialisation est devenue une interrogation majeure de l’ensemble de leurs disciplines. Question à la fois récente et transversale, son étude a ainsi donné lieu à une pluralité d’approches. Économistes, sociologues, anthropologues ou historiens ont ainsi découpé l’objet mondialisation selon les catégories que leur fournissait l’histoire de leurs disciplines. Cette diffraction se complexifie, par ailleurs, si l’on met en regard différents champs scientifiques nationaux : l’analyse de la mondialisation y est non seulement menée par des disciplines aux traditions différentes, mais aussi en fonction des principes propres qui structurent chaque espace national. Un sociologue allemand, indien ou français verra sa compréhension de la mondialisation orientée par certaines caractéristiques de la sociologie allemande, indienne ou française ; mais aussi de la place de la sociologie dans son pays, du rôle qu’elle a pu avoir dans l’étude des phénomènes globaux par rapport à d’autres disciplines, de l’existence ou non d’espaces interdisciplinaires du type globalization studies, etc. Objet diffracté, la mondialisation appelle cependant une compréhension unifiée et moins segmentée. À question globale analyse globale, pourrait-on dire, la mise en lumière des angles morts qu’implique le double biais disciplinaire et national revêtant ici une importance plus grande. C’est à une telle réflexion sur la pluralité des perspectives sur la mondialisation, mais aussi sur les moyens de les reconfigurer et de les dépasser, qu’invite le colloque. Les différents intervenants sont ainsi invités à présenter concrètement ce qui a constitué les étapes d’une recherche sur l’un des objets de la mondialisation, et à expliciter les choix théoriques et méthodologiques qui ont été opérés par rapport à d’autres possibles. Tout autant que le cœur de leurs recherches, ils en aborderont les à-côtés, préciseront l’histoire de leurs disciplines et les principes qui structurent les champs scientifiques nationaux auxquels ils appartiennent, pour donner à voir ce qui a orienté leur démarche.

 

Passeurs de culture et transferts culturels

 

Vendredi 5 et samedi 6 octobre 2012.

Nancy. Université Nancy-2.

Contacts : Elsa Chaarani, Elsa.Chaarani [at] univ-nancy2.fr ;  Catherine Delesse, Catherine.Delesse [at] univ-nancy2.fr ; Laurence Denooz, Laurence.Denooz [at] univ-nancy2.fr

http://ticri.inpl-nancy.fr/wicri-lor.fr/index.php/Passeurs_de_culture_et_transferts_culturels_2012_Nancy

Toute langue traduit et véhicule une identité culturelle spécifique, collective ou personnelle, selon l’histoire du locuteur, de l’écrivain ou de l’artiste. Toutefois, au travers des mariages mixtes, des migrations, du déracinement, des exils, des expatriations, des redécouvertes identitaires dans les peuples postcoloniaux, se créent de nouvelles synergies qui, de nouveau, agissent sur la langue et la culture, générant ainsi une (des) nouvelle(s) langue(s) et une (des) nouvelle(s) culture(s) à l’intersection de deux ou plusieurs cultures originelles. Il se crée ainsi un nouvel espace interculturel en perpétuelle évolution et construction.

Le patrimoine archéologique et son droit : questions juridiques, éthiques et culturelles

Mardi 9 et mercredi 10 octobre 2012.

Paris, 75007, Théâtre Claude Lévi-Strauss, musée du quai Branly, 218, rue de l’Université.

Entrée libre et gratuite. Renseignement et inscription auprès du Cecoji : cecoji [at] ivry.cnrs.fr ; tél. 01 49 60 41 91 ; fax 01 49 60 49 36.

Coproduit par le Centre d’études sur la coopération juridique internationale (Cecoji/CNRS), le ministère de la Culture et de la Communication (direction générale des patrimoines/sous-direction de l’archéologie), et le musée du quai Branly.

Les facettes du paysage : nature, culture, économie

23e Festival international de géographie

Du jeudi 11 au dimanche 14 octobre 2011.

Saint-Dié-des-Vosges (88).

Contact : Freddy Clairembault, fclairembault [at] ville-saintdie.fr

www.fig.saint-die-des-vosges.fr

La fabrique et la genèse des paysages seront au cœur des débats. On s’interrogera aussi bien sur le « beau » paysage que sur le paysage « ordinaire ». Les valeurs du paysage, qu’elles soient environnementales (nature/culture ; services éco-systémiques), économiques (tourisme, immobilier), culturelles ou sociales seront évoquées. L’aménagement du territoire et l’impact paysager aussi : comment construire, aménager, gérer les paysages contemporains aussi bien au plan local qu’à l’échelle mondiale ? Le rôle des acteurs et des règlementations sera abordé ainsi que celle de la gouvernance paysagère. La Turquie, pays invité d’honneur, centralisera les réflexions autour de sa position géopolitique, de la question du modèle turc mais également de son dynamisme.

Les paysans

14e Rendez-Vous de l’histoire

Blois (41).

Du jeudi 18 au dimanche 21 octobre 2011.

www.rdv-histoire.com

Plus de 300 débats et 800 intervenants, une cinquantaine de films, un salon du livre d’histoire et un du livre ancien, des rencontres pédagogiques, des expositions, des cafés et dîners historiques… D’un programme pléthorique, retenons quelques-unes des manifestations liées à l’histoire globale :

• Jeudi 18 octobre 2012, de 14 h 30 à 16 h, Maison de la Magie : « La naissance de l’agriculture », avec Jean-Paul Demoule, Jean Guilaine, Éric Huysecom, Danièle Lavallée, Laurent Nespoulous.

• Vendredi 19 octobre 2012, de 15 h à 16 h 30, Hémicycle de la Halle aux grains : « Comment l’idéologie vient aux programmes d’histoire », avec Henri Guaino (sous réserve), Emmanuel Laurentin, Michel Lefebvre, Nicolas Offenstadt, Vincent Peillon (Sous réserve).

• Vendredi 19 octobre 2012, de 19 h 30 à 20 h 30, Hémicycle de la Halle aux grains : « Nourrir le monde, hier, aujourd’hui et demain : pour une agriculture durable », conférence de Sylvie Brunel.

• Samedi 20 octobre 2012, de 9 h 30 à 11 h, Maison de la Magie : « Les racines du monde global », avec Jean-Paul Demoule, Christian Grataloup, Philippe Norel, Laurent Testot, à l’occasion de la parution de Une histoire du monde global, coordonné par P. Norel et L. Testot, Édition Sciences Humaines, 2012.

• Samedi 20 octobre 2012, de 11 h à 12 h 30, Amphi 1, Université : « Les grandes étapes historiques de l’agriculture depuis dix mille ans », avec Mathieu Calame, Marc Dufumier, Olivier de Schutter (sous réserve), Michel Vanderpooten.

• Samedi 20 octobre 2012, de 14 h 15 à 15 h 45, Amphi 2, Université : « Des premiers agriculteurs aux rurbains », avec Hervé Hennezon, Christine Bousquet, Christophe Chandezon, Jocelyne Peigney.

• Dimanche 21 octobre 2012, de 11 h 30 à 12 h 30, Salle des conférences, Château royal : « Naissance de l’histoire du climat », conférence d’Emmanuel Le Roy Ladurie.

• Dimanche 21 octobre 2012, de 11 h 30 à 13 h, Amphi rouge, Campus de la CCI : « Produire plus ? Les mutations de l’agriculture du Moyen Âge à nos jours », avec Laurent Feller, Llorenc Ferrer-Alos, Anne-Lise Head-König, Laurent Herment, Cédric Perrin.

• Dimanche 21 octobre 2012, de 14 h à 15 h 30, Amphi vert, Campus de la CCI : « Les paysans : racines et sève des civilisations ? », avec Laurent Guerreiro, Éric Janvier, Brigitte Lion, Théophile M’Baka.

• Dimanche 21 octobre 2012, de 14 h à 15 h 30, Amphi 2, Université : « Disettes et famines », avec Guido Alfani, Gérard Béaur, Laurent Feller, Cormac o’Grada, Gilles van Kote.

• Dimanche 21 octobre 2012, de 14 h 30 à 16 h, Amphi 1, Université : « Les révoltes paysannes », avec Korine Amacher, Laurent Bourquin, Jean Garrigues, Pierre-François Souyri.

Révoltes et transitions dans le monde arabe : vers un nouvel agenda urbain ?

Mercredi 7, jeudi 8 et vendredi 9 novembre 2012.

Le Caire (Égypte). Centre d’études et de documentation économiques, juridiques et sociales (CEDEJ).

Contacts : Pierre-Arnaud Barthel, barthelp [at] enpc.fr ; Roman Stadnicki, roman.stadnicki [at] cedej-eg.com

Ce colloque international vise à débattre de la dimension urbaine des grands changements qui touchent actuellement le monde arabe, depuis les origines des épisodes révolutionnaires de 2011 jusqu’aux expériences actuelles de démocratisation, en passant par les phases de transition politique et de crise économique et sociale plus ou moins longues dans lesquelles les États sont encore pris.

L’invention de la « valeur universelle exceptionnelle »

Mercredi 14, jeudi 15 et vendredi 16 novembre 2012.

Dijon (21000). Université de Bourgogne, 36 rue Chabot-Charny.

Contact : Alain Chenevez, alainchenevez [at] gmail.com

http://colloque-patrimoinemondial.u-bourgogne.fr

L’inscription sur la Liste du patrimoine mondial est aujourd’hui un label très recherché par les Etats pour identifier, conserver et valoriser les biens culturels et/ou naturels. Une demande sociale s’est fortement développée et nous interroge sur l’émergence d’une valeur exceptionnelle universelle. Quelle est son histoire, quelles sont ses évolutions, ses difficultés, ses écueils ? Dans une perspective critique et pluridisciplinaire, ce colloque, organisé par le laboratoire Cimeos, le Centre Georges-Chevrier et la Maison des Sciences de l’Homme de l’Université de Bourgogne à l’occasion du 40e anniversaire de la Convention du patrimoine mondial de l’Unesco, vise à rendre compte de la diversité des approches pour appréhender la notion de patrimoine universel.

Le commerce du luxe – le luxe du commerce

Production, exposition et circulation des objets précieux du Moyen Âge à nos jours

Mercredi 21, jeudi 22 et vendredi 23 novembre 2012.

Lyon (69005). Musées Gadagne, 1, place du Petit-Collège.

Contact : Natacha Coquery, natacha.coquery [a] wanadoo.fr

Comment se produisent, s’exposent, se diffusent et se consomment les produits du luxe ? Le but de ce colloque est de revenir sur la question de la spécialisation progressive d’un commerce voué aux objets précieux qui concourent à l’embellissement de la personne ou du cadre de vie. Le luxe a souvent été cantonné aux productions des beaux-arts ; il s’agira ici de montrer la richesse et la diversité de ce qui était (et reste) compris sous cette appellation et d’observer comment se sont progressivement mis en place des marchés spécialisés.

L’âge d’or des cartes marines

 

Lundi 3 et mardi 4 décembre 2012.

Paris (75002). Amphithéâtre Colbert, INHA, 2, rue Vivienne.

Contacts : Emmanuelle Vagnon, evagnon [at] yahoo.fr ; Catherine Hofmann, catherine.hofmann [at] bnf.fr

Ce colloque organisé par la Bibliothèque nationale de France et le programme de recherche de l’ANR Median, avec la collaboration du Comité français de cartographie et de l’International Society for the History of Maps, vient apporter un éclairage scientifique complémentaire à l’exposition « L’âge d’or des cartes marines », qui aura lieu à la BnF d’octobre 2012 à janvier 2013. Les communications porteront sur la fabrication et l’usage des cartes marines, puis sur les représentations cartographiques de l’océan Indien de l’Antiquité à l’époque moderne.

Entrée libre dans la limite des places disponibles.

Les traumatismes de l’Empire : expressions, effets et usages des violences (post)coloniales

Jeudi 6 et vendredi 7 décembre 2012.

Montpellier (34090). Maison des sciences de l’homme, 17, rue de l’Abbé de l’Épée.

Contact : Éric Soriano, eric.soriano [at] univ-montp3.fr

Les recherches sur les dynamiques impériales permettent, depuis quelques années, de renouveler l’appréhension des questions coloniales et postcoloniales. Elles engagent en effet à s’affranchir d’une histoire strictement nationale pour mieux approcher la dynamique des sociétés et des groupes en déplacement, et incitent à approcher les politiques d’États en rendant mieux compte de l’espace de négociation qui les anime dans leurs relations avec les populations placées sous domination coloniale et postcoloniale. L’usage de la notion d’Empire permet ainsi de ne verser ni dans la vision unilatéralement « par le bas » des subaltern studies, ni dans la vision parfois trop textualisée ou trop centrée sur les seules représentations et imaginaires des études postcoloniales. Elle invite à penser le contact des populations de manière symétrique et à le situer dans leur espace social de pratiques. Elle invite également à repenser le lien métropole-colonie et à rompre avec l’idée souvent inconsciente d’un « âge zéro » de l’histoire correspondant à la conquête ou la gestion coloniales, en prenant également en considération les dynamiques sociales antérieures à la colonisation.

Sortie de la religion : racines chrétiennes et modèles chinois

Jeudi 6 décembre 2012.

Paris (75006). Auditorium, Centre Sèvres, 35bis, rue de Sèvres.

Contact : Sylvie Taussig, sylvie.taussig [at] gmail.com

Cette journée d’étude est consacrée aux inventions et productions religieuses de la modernité. Selon Marcel Gauchet, le christianisme est la religion de la sortie de la religion. Cependant pour certains sinologues, l’évolution du fait religieux en Chine indiquerait que le christianisme ne serait pas unique en l’espèce. Il s’agit donc d’évaluer si et comment la Chine remet en cause les théories occidentales en sciences sociales des religions et si les religions chinoises (confucianisme, bouddhisme, taoïsme, religion locale) sont compatibles avec nos modèles théoriques, en interrogeant notamment lien social et religion en Chine et en Occident.

Ailleurs

Religion in a globalized context: The Mediterranean and the World

Cesnur 2012 International Conference

Jeudi 20, vendredi 21 et samedi 22 septembre 2012.

El Jedida, Maroc. Chouaîb Doukkali University .

www.cesnur.org/2012/el_programme.html

Co-organized with Intercultural Studies and Research Laboratory (URAC 57) and Moroccan Culture Research Group (MCRG) at Chouaîb Doukkali University, El Jadida, Morocco, and the International Society for the Study of New Religions, the 2012 CESNUR (Center for Studies of New Religions) Conference will scan the world of globalized religions…

Integrating Research and Teaching: Africa in World History

NERWHA Fall symposium

Samedi 22 septembre 2012.

Boston, MA, États-Unis. African Studies Center, Boston University 232 Bay State Road.

Contact : Dane Morrison, dmorrison [at] salemstate.edu

www.nerwha.org

Organised by the Nerwha (New England Regional World History Association), this event will be headlighted by Trevor Getz, San Francisco State University, co-author of Abina and the Important Men: A Graphic History (2012).

 

New Directions in Global History

Jeudi 27, vendredi 28 et samedi 29 septembre 2012.

Oxford, Royaume-Uni, St. Antony’s College.

Contact : global [at] history.ox.ac.uk

www.history.ox.ac.uk/global

Global History has established itself over the last ten years as a powerful and dynamic sector in historical research with wide appeal to an informed lay readership outside the academy. Now is the time to take stock. This is partly to ask what have been the most fruitful lines of inquiry and the most productive approaches. But it is also to speculate on which new directions global history is likely to follow and what we should see as the most urgent or important new lines of inquiry. For its Founding Conference, Oxfords new Centre for Global History will engage with these questions across the whole chronological range from Ancient to Late Modern History. We have invited some of the foremost practitioners in the field to debate these issues. We expect that among the major themes to emerge will be how global history can connect with – and serve – different kinds of history, how it can benefit both from a dialogue across chronological periods and from cross-disciplinary research, and whether conceptual innovation should be a major priority. Plenary speakers include Nicholas Purcell, Arjun Appadurai, Kenneth Pomeranz, Linda Colley, Chris Bayly, Ian Morris, Bob Moore, Kevin ORourke, John McNeill, Maxine Berg, Jurgen Osterhammel, Francis Robinson, Chris Wickham and James Belich.

Aid, Emerging Economies and Global Policies

Conference on the launch of the 4th issue of International Development Policy

Mercredi 3 octobre 2012, après-midi.

Berne (3012), Suisse. Room 501, University of Berne, Hochschulstrasse 4.

Contact : Marie Thorndahl, marie.thorndahl [at] graduateinstitute.ch

http://graduateinstitute.ch/corporate/resources/events_types/calendarofevents_en.html?evenementId=144403

The emergence of new donors and development aid actors from the global South coupled with an increased focus on global public goods are challenging long-established aid agencies and policies. Emerging economies are turning into significant aid players… A panel of policy makers, scholars and practitioners from a diversity of backgrounds will discuss these complex issues in a lively roundtable moderated by a renowned journalist.

The Environment in World History: Seeing through a local or global lens

 

Portland, Oregon, États-Unis.

Vendredi 12 et samedi 13 octobre 2012.

http://public.wsu.edu/~nwwha

Histoire du capitalisme

37th annual meeting of the Social Science History Association

Du jeudi 1er au dimanche 4 novembre 2012.

Vancouver, Canada.

Contacts : Stefan Bargheer, sbargheer [at] mpiwg-berlin.mpg.de ; Emily Barman, eabarman [at] bu.edu ; Victoria Johnson, vjohnsn [at] umich.edu

www.ssha.org

Global Commodities: The material culture of early modern connections, 1400-1800

Mercredi 12, jeudi 13 et vendredi 14 décembre 2012.

Université de Warwick, Royaume-Uni.

Contacts : Anne Gerritsen, a.t.gerritsen [at] warwick.ac.uk ; Giorgio Riello, g.riello [at] arwick.ac.uk

Registration fee : £100 (£45 for students) till 15 October 2012.

Organised by Global History and Culture Centre University of Warwick, this conference seeks to explore how our understanding of early modern global connections changes if we consider the role material culture played in shaping such connections. In what ways did material objects participate in the development of the multiple processes often referred to as globalisation? How did objects contribute to the construction of such notions as hybridism and cosmopolitanism? What was their role in trade and migration, gifts and diplomacy, encounters and conflict? What kind of geographies did they create in the early modern world? What was their cultural value vis-à-vis their economic value? In short, we seek to explore the ways in which commodities and connections intersected in the early modern world.

 

Conférences

L’autre en question

 

Jeudi 13 septembre 2012.

Paris, 75007, musée du quai Branly, 218, rue de l’Université.

Entrée libre. Réservation obligatoire au 01 58 71 01 01 ou au 01 81 69 18 38, ou par email : rencontres [at] festival-idf.fr (précisez vos nom, prénom et adresse postale afin de pouvoir recevoir les billets correspondant à votre réservation).

• À partir de 18 h 30 : Table ronde avec Catherine Wihtol de Wenden, directrice de recherche au CNRS (Ceri/Sciences-Po), Pap Ndiaye, historien, maître de conférences à l’EHESS, et Yvan Gastaut, historien, maître de conférences à l’Université de Nice Sophia Antipolis. Animée par Marie Poinsot, politologue, rédactrice en chef de la revue Hommes et migrations, responsable du département Éditions de la Cité nationale de l’histoire de l’immigration.

Entre rejet et solidarité, la présence en France de populations venues d’un « ailleurs » plus ou moins lointain n’a cessé de façonner la société dans ses multiples dimensions. De quelle manière les diasporas et les migrants qui les composent ont-ils nourri l’imaginaire français à travers les différentes époques ? L’immigration, loin de concerner seulement la France, s’inscrit plus largement dans une problématique mondiale. Comment les politiques d’immigration (les politiques de contrôles des flux migratoires et les politiques d’accueil des étrangers) ont-elles évolué au cours de ces trente dernières années ?

Organisé dans le cadre du festival d’Île-de-France, en collaboration avec le musée du quai Branly.

Mémoires de diasporas, entre effacement et transmission

 

Lundi 17 septembre 2012.

Paris (75005). Grand auditorium du Collège des Bernardins, 24 Rue de Poissy.

Entrée libre. Réservation obligatoire au 01 58 71 01 01 ou au 01 81 69 18 38, ou par email : rencontres [at] festival-idf.fr (précisez vos nom, prénom et adresse postale afin de pouvoir recevoir les billets correspondant à votre réservation).

• À partir de 20 h : Table ronde avec Alexis Nouss, professeur à la School of European Studies de l’Université de Cardiff (Royaume-Uni), fondateur et directeur du groupe de recherche montréalais POexil, Michel Bruneau, géographe, directeur de recherche émérite au CNRS, Paul Alerini, psychanalyste, et Zad Moultaka, compositeur. Animée par Virginie Symaniec, chercheur et traductrice, et Alexandra Galitzine-Loumpet, anthropologue.

En quittant leur pays d’origine, les individus en situation de diaspora font face à un exil intérieur autant que physique. De ces expériences vécues directement ou de manière lointaine, épanouies ou subies, découlent des mémoires, traumatiques ou refoulées, ou au sein desquelles il est parfois possible « de nourrir la nostalgie d’un pays que l’on n’a jamais connu, d’éprouver le manque d’une langue que l’on n’a jamais parlée » (A. Nouss). La présence du compositeur d’origine libanaise Zad Moultaka à la table ronde mettra également en lumière le fait que la création artistique est tout autant un vecteur essentiel de transmission de ces mémoires de diasporas qu’un catalyseur de rencontres des cultures.

Organisé dans le cadre du festival d’Île-de-France, en partenariat avec le Collège des Bernardins et en collaboration avec les rencontres Non-lieux de l’exil (Réseau Asie, CNRS/FMSH).

L’histoire mondiale de la colonisation

Cycle de conférences du musée du quai Branly

Paris, 75007, musée du quai Branly, 218, rue de l’Université.

Contact : Nathalie Mercier, nathalie.mercier [at] quaibranly.fr

www.quaibranly.fr

• Jeudi 20 septembre 2012, à partir de 18 h 30 : conférence-débat en présence de Alain Testard, anthropologue, « L’esclavage dans les sociétés archaïques ».

• Jeudi 29 novembre 2012, à partir de 18 h 30 : conférence-débat en présence de Jean Andreau, historien, « L’esclavage dans l’Antiquité gréco-romaine ».

• Jeudi 13 décembre 2012, à partir de 18 h 30 : conférence-débat en présence de Myriam Cottias, historienne, « Mémoire(s) des esclavages  ».

Décalages : les autres et nous

Cycle de conférences du musée du quai Branly

Paris, 75007, musée du quai Branly, 218, rue de l’Université.

Contact : Nathalie Mercier, nathalie.mercier [at] quaibranly.fr

www.quaibranly.fr

• Jeudi 27 septembre 2012, à partir de 18 h 30 : conférence-débat en présence de Françoise Sabban, sinologue et anthropologue, et Noëlie Vialles, anthropologue, « La viande en Chine et en Europe ».

• Jeudi 11 octobre 2012, à partir de 18 h 30 : conférence-débat en présence de Marie-France Auzépy, historienne, et Anne-Marie Moulin, historienne et philosophe de la médecine, « Le poil en Islam et dans le monde chrétien ».

• Jeudi 22 novembre 2012, à partir de 18 h 30 : conférence-débat en présence de François Vatin, sociologue et économiste, et Carole Ferret, ethnologue, « Le lait en Europe et en Inde ».

Repenser les phénomènes circulatoires

Journée d’études doctorales – Paris-1

Vendredi 28 septembre 2012.

Paris.

Contact : paris1jed2012 [at] gmail.com

Cette journée d’études sera l’occasion de questionner la manière dont on analyse aujourd’hui les phénomènes circulatoires, en proposant une approche pluridisciplinaire et une réflexion à plusieurs échelles afin de repenser ces processus.

Diasporas, une histoire en devenir : vers un monde transnational ?

Mardi 2 octobre 2012.

Paris (75013). Auditorium du Pôle des langues et civilisations, 65 rue des Grands-Moulins.

Entrée libre. Réservation obligatoire au 01 58 71 01 01 ou au 01 81 69 18 38, ou par email : rencontres [at] festival-idf.fr (précisez vos nom, prénom et adresse postale afin de pouvoir recevoir les billets correspondant à votre réservation).

• À partir de 18 h 30 : table ronde avec Stéphane Dufoix, maître de conférences HDR en sociologie (Université Paris-Ouest-Nanterre, laboratoire Sophiapol) et membre de l’Institut universitaire de France, auteur notamment de La Dispersion. Une histoire des usages du mot diaspora, Amsterdam, 2012, Dominique Schnapper, directrice d’études à l’EHESS, et El Mouhoub Mouhoud, professeur d’économie à l’Université Paris IX-Dauphine. Animée par François Durpaire, historien, Université de Cergy-Pontoise.

À partir d’une approche historique des diasporas et d’une tentative de définition de la notion, cette table ronde s’interrogera sur le(s) sens et la pertinence d’un terme, devenu un véritable phénomène, à l’heure de la mondialisation et d’un mode de vie de plus en plus transnational. Elle mettra également en lumière le poids incontestable de ces mouvements de populations dans les échanges économiques et politiques mondiaux.

Organisé dans le cadre du festival d’Île-de-France, en partenariat avec la Bibliothèque universitaire des langues et civilisations (Bulac). Dans le cadre du cycle de conférences Les Mardis de la Bulac.

Grands témoins

Cycle de conférences du musée du quai Branly

Paris, 75007, musée du quai Branly, 218, rue de l’Université.

Contact : Nathalie Mercier, nathalie.mercier [at] quaibranly.fr

www.quaibranly.fr

• Vendredi 14 décembre 2012, à partir de 18 h 30 : conférence-débat en présence de Maurice Godelier, anthropologue, spécialiste des sociétés d’Océanie.

Séminaires

Genre, mobilisations et dynamiques sociales en Asie du Sud

12e séminaire jeunes chercheurs de l’AJEI

 

Paris, 75006, Ceri, 56 rue Jacob.

Jeudi 8 novembre 2012.

Contact : seminaire [at] ajei.org

Public : étudiants en sciences sociales de niveaux master, doctoral ou post-doctoral, travaillant sur l’Asie du Sud.

 

Aux origines de la mondialisation : histoire économique comparée Asie Europe, 1500-2000

Paris (75013). salle 681, bât. Le France, 190-198 avenue de France.

Les 1er, 3e et 5e mardis du mois, de 11 h à 13 h, du mardi 6 novembre 2012 au mardi 18 juin 2013.

Renseignements : Isabelle Deron, ideron [at] ehess.fr

www.ehess.fr/fr/enseignement/enseignements/2012/ue/307

Niveau requis : Étudiants, projet de recherche écrit, connaissance du chinois ou du japonais souhaitée.

Ce programme d’enseignement propose d’explorer une histoire économique comparée (Chine/Europe) en prenant pour objet d’étude les institutions économiques et les pratiques commerciales. Il s’agit d’une investigation, entreprise sur une vaste échelle, portant sur des institutions économiques ayant joué un rôle crucial dans la première mondialisation (16e siècle) et sur la « grande divergence » qui est advenue par la suite entre l’Asie et l’Europe. Parmi ces institutions l’on peut citer les partenariats commerciaux, les diverses formes de mobilisation des capitaux, le développement de sociétés en commandite et les sociétés par action…

Le principal objectif de cette recherche est de comparer systématiquement la trajectoire d’institutions économiques et de pratiques d’affaires dans deux environnement bien différenciés – l’Europe occidentale et l’Asie (essentiellement la Chine et le Japon) –, sur une longue période, courant du 16e au 21e siècle, et en prenant pour fil directeur l’analyse des pratiques de trois grands réseaux marchands chinois : celui du Fujian, celui de Huizhou (Anhui), et celui du Shanxi.

Racialisation et mondialisation

Le lundi, de 17 h à 19 h, d’octobre 2012 à mai 2013.

Paris (75016). NYU Paris, 56, rue de Passy.

Organisé par Beth Epstein et Carole Reynaud-Paligot (Paris-1) en collaboration avec Ann Thomson (Paris-8), ce séminaire a pour objectif l’étude, dans la longue durée et au sein de différents espaces géopolitiques, des processus de racialisation et/ou d’ethnicisation dans différents contextes sociohistoriques. Les catastrophes du 20e siècle ont rendu la notion de race impensable, mais elle continue néanmoins à structurer les pensées et la politique dans un monde où les frontières d’antan deviennent pourtant de plus en plus fluides. Comment expliquer la permanence de ces catégories qui ont si fortement façonné le monde moderne, alors que l’intensification des échanges semble rendre les identités moins rigides ? En créant un réseau de chercheurs de disciplines différentes (histoire, sociologie, ethnologie, anthropologie, science politique, littérature, histoire de l’art), il s’agit de mobiliser des méthodes et des problématiques diverses à travers le temps et l’espace afin d’enrichir la compréhension de ces phénomènes dans une perspective comparatiste.

Ce séminaire est ouvert à tout chercheur qui de près ou de loin s’intéresse à ces sujets.