Le carrefour impérial

À propos de :

STANZIANI Alessandro (2012], Bâtisseurs d’empires. Russie, Chine et Inde à la croisée des mondes, 15e-19e siècle, Paris, Raisons d’agir.

En 1690, un candide extraterrestre qui aurait visité notre planète aurait-il su quel en serait le destin ? Aurait-il deviné l’ascension à venir de l’Europe ? Évidemment que non, répond Alessandro Stanziani dans le premier chapitre de ce bref ouvrage, un magnifique texte qui condense nombre des interrogations de l’histoire globale.

Évidemment que non, car les grandes puissances en expansion terrestre de l’époque n’étaient pas européennes – si l’on fait abstraction de l’Empire ottoman. Elles se déployaient en Eurasie et avaient nom Empire qing (en Chine), Empire moghol (en Inde) et Empire des tsars (en Russie). Elles étaient capables de projeter des troupes nombreuses sur des milliers de kilomètres. Mais quel était leur secret ? Comment ces empires acheminaient-ils les approvisionnements nécessaires aux campagnes et à la stabilité des conquêtes ? Où puisaient-ils ces ressources ?

Une critique salutaire

À partir de ces questions, Stanziani entreprend une critique salutaire des thèses qui ont précédé la sienne. Car nombre d’entre elles prennent la fin pour le commencement. Se baser sur le postulat que l’Europe va gagner la compétition, c’est prendre l’issue du match pour son déroulé. Ainsi, il est de bon ton, dans l’historiographie nationale chinoise, de dire que la Chine a toujours été unifiée, pays de concorde où prirent place un certain nombre d’inventions fondamentales. Des historiens européens ont retourné ce grand récit de la nation chinoise. Pourquoi la Chine fut-elle dépassée au 19e siècle ? Simplement parce qu’elle aurait toujours été stable, quand les pays européens se déchiraient en guerres incessantes qui les obligeaient à une compétition économique et technologique pour la suprématie… Un simple regard sur l’histoire chinoise suffit à détruire cet argument à double visage, défendant un pays tantôt irénique tantôt figé dans un despotisme éternel et mortifère : la Chine a rarement été unifiée, a connu autant de guerres que l’Europe, et les frontières des différents États qui l’ont composée ont considérablement varié.

C’est donc l’histoire de la construction impériale, de ses fondements sociaux et économiques, de ses dynamiques qu’entend étudier Stanziani en portant un regard large sur le fonctionnement des organisations militaires de ces États. « Ce n’est pas dans le pouvoir du nombre (la population chinoise ou indienne), ni dans l’étendue du territoire (cette dernière étant plutôt le résultat que la cause) et encore moins dans leur caractère “despotique” qu’il faut chercher la force des empires russe, chinois et moghol, leurs différentes évolutions ainsi que le résultat de leur confrontation avec l’Occident. Ainsi, certains éléments sont communs aux trois empires : leur capacité à intégrer des ethnies et des religions différentes, leur aptitude à mobiliser des ressources agricoles et militaires, l’importance du commerce, des organisations bureaucratiques complexes. Les différences sont tout aussi remarquables : les Chinois développent davantage le marché afin d’approvisionner l’armée ; les Russes ont recours aux soldats-colons et procèdent à un centralisation importante de leur administration, tandis que les Moghols misent sur la décentralisation de la fiscalité et de l’armée. »

Dans ces conditions, le comparatisme peut se passer de l’aune européenne, défend l’auteur, et se limiter au triumvirat Russie-Inde-Chine. Du coup, « l’Occident omniprésent […] demeure à l’arrière-plan » et « c’est un monde nouveau qui s’ouvre : la relation entre guerre, économie et dynamique sociale ; la signification même de la frontière. Vues d’Asie et suivant des comparaisons entre steppes d’Asie centrale, Moscovie, Chine et Empire moghol, ces comparaisons n’aboutiront pas aux mêmes réponses qu’en suivant les axes habituels Delhi-Londres, Yangzi-Lancashire ou Paris-Moscou. »

Guerre aux poncifs

Il faut alors faire table rase des poncifs, s’abstenir de penser en termes d’États-nations, de monopole de la violence (un empire pouvait déléguer cette composante de son pouvoir), chercher le capitalisme sous les formes oubliées qu’il a pu prendre ailleurs. Rappeler que ce même capitalisme n’est pas synonyme de droit, que l’urbanisation n’entraîne pas mécaniquement la liberté, que les peuples des steppes n’étaient pas des barbares jouissant d’une économie de pillage mais pouvaient se fédérer dans des entités administratives complexes. Que les religions n’ont jamais dicté l’éthique ou le fonctionnement du marché. Et enfin que ces empires n’ont jamais été monolithiques – la multiplicité des autorités et des juridictions y a toujours été la règle.

Un exemple : les armes à feu n’étaient réellement efficaces que dans des circonstances données. Dire que l’Occident s’est conféré un avantage crucial en les perfectionnant, c’est méconnaître le fait qu’elles ont aussi connu des évolutions ailleurs. Chinois, Indiens, Russes y ont eu recours quand les circonstances l’autorisaient. Mais la guerre dans les steppes se jouait avec la cavalerie, et ce sont les chevaux, plus que les canons, qui étaient l’objet de toutes les attentions en Asie. Autre exemple : le servage, pense-t-on couramment, aurait fourni à l’Empire russe les troupes disciplinées dont il avait besoin. Mais ce sont des soldats-colons, capables de manier les armes comme de cultiver la terre, qui ont procédé aux conquêtes. Et le pouvoir des tsars se négociait constamment avec les autres échelons de la société. Pour se limiter à une dernière illustration, autour du commerce en Asie centrale, l’auteur souligne que les marchands ouzbeks, chinois ou persans n’avaient rien à envier à leurs homologues européens, que ce soit en terme de performances, de foires, d’infrastructures de transports disponibles, de dispositifs d’arbitrage des contentieux, de liberté par rapport aux pouvoirs politiques, d’accès aux crédits ou de techniques comptables.

Passé le premier chapitre, Stanziani consacre un chapitre au cas particulier de chacun des trois empires. Il y expose la multitude des compromis qui ont permis à ces empires de perdurer tout au long de l’époque moderne. Les processus militaires, techniques, économiques, administratifs, etc., connurent en Inde, en Chine comme en Russie nombre d’adaptations différentes, souvent simultanées, adaptées aux contextes locaux. Les tactiques militaires russes étaient différentes dans le Caucase et en Asie centrale. Les Qing géraient différemment la Chine du Sud et celle du Nord ; et pour coloniser les steppes, ils eurent recours, en complément à la mobilisation massive des soldats-paysans, à une solution similaire à l’indenture britannique ou l’engagisme français : l’État – puis ensuite des intermédiaires privés – anticipait les frais de transport et d’habillement des migrants, bénéficiant en échange de cinq ans de leur travail sur place. Et toujours, dans ces empires, il existait une dialectique entre privé et public : les marchands ont très souvent approvisionné les armées ; et les pouvoirs impériaux ont encadré plus ou moins strictement les modalités de ce marché.

En conclusion, Stanziani plaide pour que les historiens cessent de prétendre prédire le futur « dans une relation mécanique avec le passé ». Ce qui permettra accessoirement de réécrire l’histoire du succès de l’Occident qui, pour être indéniable, est « à relativiser dans l’espace comme dans le temps ».

Hégémonie occidentale : une histoire longue, un avenir sombre

À propos de :

MORRIS Ian [2010], Why the West rules… For now, trad. fr. Jean Pouvelle, Pourquoi l’Occident domine le monde… Pour l’instant. Les modèles du passé et ce qu’ils révèlent sur l’avenir, L’Arche, 2011.

Pourquoi l’Occident domine-t-il le monde ? La question est souvent présentée comme fondatrice de l’histoire globale, puisque nombreux sont ceux qui considèrent l’ouvrage de William H. McNeill The Rise of the West: A History of the Human Community [1963] comme pierre fondatrice de ce courant. L’archéologue et historien Ian Morris s’attaque à nouveaux frais à la question, dans un livre démesurément ambitieux qui évoque irrésistiblement Jared Diamond et son De l’inégalité parmi les sociétés. Une passionnante histoire du monde, renforcée d’un argumentaire plutôt déterministe, se concluant de façon inquiétante…

Comme Diamond, Morris multiplie les récits issus de ses lectures, et pratique une interdisciplinarité revendiquée, contre une multidisciplinarité qui serait l’apanage de l’ouvrage collectif compilant des articles de spécialistes. Il campe une fresque haletante qui nous fait parcourir des millénaires d’histoire, et esquisse ce faisant une logique sous-jacente à la marche du monde. Cette logique repose sur 3 piliers :

• la biologie, qui conditionne les possibilités du développement de l’espèce humaine ;

• la sociologie, qui étudie les causes et les résultats du changement social, en vertu d’un théorème maintes fois souligné par l’auteur, inspiré par une boutade de l’écrivain de science-fiction Robert Heinlein : « Le changement est apporté par des gens paresseux, avides et apeurés, recherchant des moyens plus faciles, plus avantageux et plus sûrs de faire les choses. Et ils sont rarement conscients de ce qu’ils font. »

• la géographie, ou plus largement l’environnement, qui fournit le cadre dans lequel se peint l’histoire.

Passons sur les détails encyclopédiques de millénaires d’histoires brassés en 750 pages, de l’homme de Neandertal à la Chimerica, et concentrons-nous sur les prémisses et la conclusion.

La grande saga des idiots gaffeurs

Morris s’est penché sur la foultitude d’auteurs qui, de Karl Marx à Jack Goldstone, ont posé le diagnostic d’une domination de l’Occident sur le reste du monde et essayé de l’expliquer. Il les scinde en deux courants : les partisans d’un « verrouillage à long terme » (typiquement Diamond et ses contraintes environnementales, conditionnant les ressources auxquelles les sociétés, dans un espace donné, avaient accès) et ceux de l’« accident à court terme » (comme Kenneth Pomeranz et sa « grande divergence »).

Morris estime que sa thèse transcende les deux camps qu’il a discernés. Disons qu’on le rangerait plus volontiers dans une histoire verrouillée au long terme, puisque son analyse repose avant tout sur l’idée que l’environnement de l’Occident était plus favorable à l’innovation que le milieu oriental, du biface paléolithique (immense progrès conceptuel dans la taille de la pierre) à la révolution industrielle. Avec une petite place pour l’accident, puisque pour lui, l’histoire est aussi écrite par les erreurs des « idiots gaffeurs » (davantage que par les idées des grands hommes), en bien ou en mal : le successeur de l’empereur Yongle sur le trône de Chine, en interdisant la navigation hauturière au 15e siècle, condamnait ses lointains héritiers à se faire humilier par les canons britanniques en 1840 ; et Christophe Colomb, se trompant dans ses calculs et trébuchant sur le Nouveau Monde, offrait à l’Europe les moyens de son expansion.

Morris résume ainsi sa démonstration : « Au cours des 15 000 ans passés, l’Orient et l’Occident ont connu les mêmes étapes de développement social et dans le même ordre (…). Mais ils n’ont pas accompli ces choses aux mêmes époques ni au même rythme. » Pour lumineuse que soit la proposition, elle comprend plusieurs biais gênants : d’abord en matière terminologique. Morris définit l’Occident comme toute civilisation qui, du Croissant fertile (terme auquel il préfère le mot arabe Jazira) à l’Empire romain, puis à l’Islam, jusqu’à l’Europe industrielle, a incarné à un moment donné le « noyau », soit le système social le plus développé présent à l’ouest de l’Himalaya. Et en miroir de cet Occident mobile, sur l’autre versant de l’Himalaya, l’Orient serait articulé exclusivement autour du noyau chinois, et non indien, indonésien ou néo-guinéen.

Entre Rome et Chine, l’indice de développement social

Ensuite et surtout, la principale innovation de Morris est aussi sa plus grande faiblesse. Dans sa recherche des lois de l’histoire, il lui faut mesurer le degré de développement respectif des sociétés qu’il compare. Or calculer des Produit intérieurs bruts ou des Indices de développement humain aux temps d’Auguste et de la dynastie chinoise des Han ne va pas de soi. Il a donc recours à un indice maison, ou « Indice de développement social », mêlant le degré d’urbanisation (estimé en nombre d’habitants de la ville la plus importante de la zone considérée à la date considérée) et l’énergie consommée par personne mesurée en kilocalories (extrapolée sur base de la nourriture, des ressources caloriques et agricoles mobilisées, etc.). Diagnostic : l’Occident a toujours été en avance sur l’Orient de quelques millénaires ou siècles, sauf dans la période courant du 8e au 15e siècle de notre ère.

Et cette avance a pu varier dans le temps, car quand une société atteint un seuil de ressources donné, le piège malthusien se referme sur elle et elle implose – effondrement méditerranéen vers 1250 avant notre ère lors des invasions des peuples de la mer, fin des empires han et romain, etc. ; l’auteur qualifie ces épisodes de « ruptures historiques ». Les « cinq cavaliers de l’Apocalypse » – faillite étatique, famine, pandémie, migration et surtout changement climatique – expliquent ainsi les écarts très variables séparant, à différents moments, les sociétés d’Occident de celles d’Orient. Le livre se retrouve ponctué de courbes de développement comparé Occident/Orient, commentées période par période. Même si on peut critiquer la validité du procédé, il a le mérite de matérialiser les évolutions et de structurer l’appréhension de l’histoire de part et d’autre de l’ensemble eurasien.

Le problème, et l’auteur le reconnaît à demi-mot, est qu’à cette aune-là, l’Occident étant beaucoup plus riche que la Chine en données archéologiques, son avance est inévitablement surestimée. Le développement d’une archéologie préventive en Asie, et son affranchissement souhaitable des ingérences politiques, poussera peut-être à réviser les données de Morris dans une ou deux décennies. En attendant, la conclusion est sans surprise : « La domination occidentale ne fut jamais ni verrouillée, ni accidentelle. » Elle fut simplement « le résultat le plus vraisemblable, au cours de la plus grande partie de l’histoire, d’un jeu dans lequel la géographie a pipé les dés en faveur de l’Occident. »

L’historien face aux ténèbres

Aujourd’hui l’Orient rattrape son retard à pas de géant, et dans moins d’un siècle (avant 2103, pour reprendre la date extrapolée précisément par les courbes de Morris), c’en sera définitivement fini de l’hégémonie occidentale. Car arrivé au terme de l’ouvrage, Morris ne peut s’empêcher de jouer son Hari Seldon – ce personnage de science-fiction à la base du cycle Fondation d’Isaac Asimov, qui invente une science, dite psychohistoire, capable de prévoir le futur à partir du passé, et permettant donc de prendre des mesures pour améliorer l’avenir.

À ce stade, le sympathique archéologue se transforme en prêcheur d’Apocalypse. Sur fond de réchauffement climatique, ses courbes annoncent un avenir intenable, tant en termes d’urbanisation que de ressources énergétiques disponibles : « Des cités de 140 millions d’habitants ne fonctionneraient pas. Il n’y a pas assez de pétrole, de charbon, de gaz ou d’uranium au monde pour fournir 1,3 million de kilocalories par jour à des milliards de personnes. (…) Et quant à coupler nos cerveaux avec des machines (conséquence « prévisible » de la révolution de l’information en cours)…, nous cesserions d’être humains. » Alors ? « Nous approchons de la plus importante rupture historique jamais observée », qui fera des effondrements sociétaux passés autant de plaisanteries. Le moyen de l’éviter ? Contre les ténèbres qui menacent, « seuls les historiens peuvent construire la grande narration du développement social ; seuls les historiens peuvent expliquer les différences qui divisent l’humanité et les manières dont nous pouvons les empêcher de nous détruire. » Bigre, quelle responsabilité !

Diaspora, histoire d’un terme polysémique…

À propos de

La Dispersion. Une histoire des usages du mot diaspora

Stéphane Dufoix, Paris, Amsterdam, 2012.

« L’Éternel vous dispersera parmi les peuples… », est-il écrit dans le Deutéronome, le cinquième livre de la Bible hébraïque que les chrétiens appellent Ancien Testament. Si le judaïsme a été, jusqu’à la création de l’État d’Israël en 1948, associé à l’idée d’un peuple sans terre, on apprend dans le livre de Stéphane Dufoix, sociologue à l’université de Nanterre (et par ailleurs contributeur de ce blog), que le terme grec de diaspora fait irruption dans l’histoire avec la Septante. La Septante est une traduction en grec du livre sacré hébraïque à laquelle auraient contribué, selon la légende, septante-dix (ou soixante-douze) sages juifs à Alexandrie, au 3e siècle avant l’ère commune. Débuts mouvementés, puisque ce néologisme traduit d’emblée plusieurs termes hébreux, dont galouth – dispersion négative infligée par Dieu. Il revêt aussi, dans le contexte hellène et a posteriori, un sens positif associé aux colonies de peuplement grec dans l’Antiquité. Dans un premier temps, si la diaspora désigne l’ensemble des juifs hors de Judée, qu’ils soient à Babylone, en Grèce, en Égypte, elle peut donc se voir comme une bonne, ou une mauvaise chose.

Ces avatars sont précurseurs de la suite, puisque ce mot connaîtra, au fil des siècles, de multiples récupérations politico-communautaires, qui nourriront autant de glissements sémantiques. Ceux-ci sont si nombreux que Dufoix réussit, dans cette « histoire des usages du mot diaspora », à remplir presque 600 pages denses nourries de dix années d’investigations – et encore juge-t-il l’entreprise inachevée. Linguisticiens, historiens, philosophes, anthropologues, politologues… Nombreux sont les spécialistes qui trouveront dans cet ouvrage érudit matière à enrichir leur réflexion.

Après une introduction consacrée à la notion d’histoire de mot, sous-discipline qu’il inscrit à la croisées des traditions des Annales, de l’école de Cambridge et de la Begriffsgeschichte, l’auteur explore dans une 1re partie l’entreprise de « production de réalité sociale » dessinée en filigrane par les projections sémantiques du terme. Suite à la scission entre juifs et chrétiens qui s’opère dans les décennies suivant la destruction du second Temple de Jérusalem en 70 de notre ère, les chrétiens abandonnent le mot, qui n’est plus qu’occasionnellement employé par les juifs. Jusqu’au 18e siècle, où les frères moraves, branche du christianisme qui se réclame des prêches du théologien tchèque Jan Hus mort sur le bûcher en 1415, s’en servent pour qualifier leur mission de prédication en terres protestantes. Tour à tour mobilisée par les Afro-Américains, les sionistes, puis les sciences sociales, diaspora dessine un champ de force sémantique qui ne prend sa forme actuelle que lorsque la globalisation, à partir 1980, s’impose comme un cadre incontournable de la pensée.

Entretemps, le terme a été annexé à deux rhizomes sémantiques distincts. Le premier est celui de la diaspora comme un phénomène structurellement juif, en résonance avec le retour promis en Terre sainte – et encore S. Dufoix estime-t-il que « le même mot recouvre non seulement deux termes hébreux – galouth et tfoutsoth – mais aussi qu’il englobe quatre significations fondamentalement différentes les unes des autres ». Puis lors de la concrétisation des possibles de ce retour avec la création de l’État d’Israël, diaspora désigne cette communauté hors frontières ayant vocation à entretenir des liens privilégiés avec un centre, qui est Israël. Galouth se comprend donc comme la diaspora non centrée préexistant à l’État d’Israël, tfoutsoth la diaspora périphérique articulée autour de son cœur.

Tout peut faire diaspora

Le second rhizome sémantique est celui de l’appropriation du terme biblique. Un tournant crucial prend place avec la déportation de millions d’esclaves africains vers le Nouveau Monde. Diaspora, pour les descendants des victimes de la Traite atlantique, qualifie une communauté culturelle partageant un héritage, en état de dispersion et en attente du retour au continent des origines. Dufoix consacre la 2e partie de l’ouvrage à cette évolution, qui en entraîne d’autres… Ainsi dès l’ouverture de cette partie signale-t-il un usage du terme holocauste, issu du vocabulaire religieux avant de qualifier la Shoah. Est-il approprié pour désigner le génocide dont furent victimes, simultanément à leur déportation, les populations noires dont descendent les Afro-Américains ? La concurrence des victimes fait rage aussi outre-Atlantique. Et la rhétorique consistant à comparer les destins juifs et noirs-américains est vieille de plusieurs siècles. Dès le début, qui vit leur christianisation sur fond de justification théologique à la malédiction des descendants de Cham par Noé, les esclaves pensèrent leur épreuve en termes bibliques – entre références à Babylone (les Blancs) et retour à Sion (l’Afrique, mythifiée en Éthiopie), la simple audition d’une chanson de Bob Marley suffit à s’en convaincre. Dufoix souligne, avant de les disséquer, trois logiques qui souvent cohabitèrent : analogie (les Noirs se voyant comme les Juifs) ; substitution (les Noirs se percevant comme les vrais Juifs) ; opposition (les Noirs se présentant comme l’opposé des Juifs).

Le terme de diaspora va sortir du champ religieux, se séculariser à partir du début du 20e siècle, se disséminer – on parle de diaspora arménienne, chinoise, palestinienne… pour désigner d’importantes communautés nationales émigrées. Voire s’appliquer à la diffusion d’un style architectural ou d’une langue… Car tantôt mouvement, tantôt groupe, « tout peut faire diaspora, les choses comme les êtres », de l’exil des écrivains allemands en littérature dans les années 1930 aux migrations animales en biologie. Les sciences sociales investissent progressivement le terme. Ainsi l’historien Arnold Toynbee, qui verra d’abord dans les diasporas des « fossiles » de communautés dispersées, avant d’en faire les formes politiques dominantes d’un futur âge des diasporas succédant à celui des États.

Le nom du global

Depuis la fin des années 1980, le champ sémantique du mot diaspora connaît une inflation qui fait dire à l’auteur que « le sens de diaspora est lui-même très dispersé ». En atteste le nombre de références que Dufoix cite à l’appui de sa démonstration. À donner le vertige. Mais surtout, selon le titre de la 3e et dernière partie, le terme diaspora est devenu « Le nom du global ». À partir des années 1990 se construit le champ académique des diaspora studies, alors que les journalistes, les ONG, les agences gouvernementales et les migrants eux-mêmes investissent le mot. Désormais « le terme dépasse le champ pourtant large des thématiques liées aux migrations, aux identités dont la logique ne peut être enfermée dans le cadre national. (…) Un mot à la mode (…) associé à des valeurs contradictoires – positives ou négatives –, à des historicités différentes – il est prémoderne, moderne ou postmoderne – ainsi qu’à des prises de position antagonistes. »

En conclusion, l’auteur cite August W. von Schlegel : « Les mots ont leur histoire comme les hommes. (…) Les mots voyagent, ils s’établissent comme des colons loin de leur patrie, et il n’est pas rare de les voir faire le tour du globe. » À cette aune-là, le terme de diaspora est le symbole d’une mondialisation réussie.

L’agenda de l’histoire globale – 2e et 3e trimestres 2012

Cet agenda couvre la période début avril à fin août 2012. Le prochain sera publié en septembre 2012. Si vous organisez ou avez connaissance d’un événement susceptible d’être relayé par ce blog, envoyez un courriel à sh.testot [at] wanadoo.fr en mettant en sujet : Agenda histoire globale.


Colloques

Science et développement durable :
20 ans après Rio, quelles perspectives ?

Paris, 75016, campus Gérard-Mégie, CNRS, 3 rue Michel-Ange.

Mercredi 4 et jeudi 5 avril 2012, à partir de 16 h le 4 avril, et toute la journée le 5 avril.

Contact : Agathe Euzen, agathe.euzen [at] cnrs-dir.fr

Inscription gratuite mais obligatoire dans la limite des places disponibles.

Organisé conjointement par l’Institut Écologie et Environnement du CNRS (InEE) et l’Iddri dans le cadre de la semaine du développement durable du 1er au 7 avril 2012, ce colloque a pour objectif de réinterroger la « notion » de développement durable afin de préparer la conférence Rio + 20 de juin 2012. Plusieurs tables-rondes permettront d’engager un dialogue entre scientifiques et acteurs sur la contribution de la science dans le concept de développement durable vis-à-vis des multiples enjeux qu’il soulève pour les socio-écosystèmes, les ressources et les territoires.

S’engager dans les espaces publics,
participation politique et engagements multiples

Paris, 75006, Ceri, 56 rue Jacob.

Jeudi 5 et vendredi 6 avril 2012, le jeudi de 9 h à 18 h 30, le vendredi de 9 h 30 à 18 h.

Contact : anrpalapa [at] gmail.com

Information : www.afsp.msh-paris.fr/activite/2012/coll050412bis.pdf

Organisé dans le cadre du projet « Processus et acteurs latino-américains de la participation politique » financé par l’Agence nationale de la recherche (ANR) et par l’Institut de recherche du développement (IRD), ce colloque vise à analyser les formes diverses de la participation politique, en interrogeant les articulations entre acteurs engagés, structures d’encadrement et de mobilisation (partis, associations) et pouvoirs publics, dans une perspective comparée. En deux journées de travail, on s’interrogera sur la pluralité des espaces publics en démocratie, au-delà des cas latino-américains. Plutôt que de discuter la qualité de la démocratie, on observera les manières dont les formes de participations se structurent, s’inscrivent dans des relations de pouvoir spatialisées et éventuellement les modifient, notamment dans les interactions avec les autorités, que ce soit pour prendre part à la prise de décision ou pour contester.

Napoleon’s Empire:
European politics in global perspective

Paris, 75003, 8 rue du Parc-Royal.

Du mercredi 18 au vendredi 20 avril 2012.

Colloque international organisé par l’université de Wuppertal et l’Institut historique allemand.

Contact : Dunja Houelleu, dhouelleu [at] dhi-paris.fr

Information et inscription : event [at] dhi-paris.fr

Langue de conférence : anglais et français avec traduction simultanée.

De 9 h à 18 h mercredi et jeudi, de 9 h à 12 h vendredi, le colloque se clôturant sur une conférence de Michael Broers (University of Oxford), « Imperialism in Transition – between Rom and the Raj », le vendredi 20 avril à 14 h.

Y a-t-il du sacré dans la nature ?

Paris, 75005, centre Panthéon, Présidence salle 2, 12 place du Panthéon.

Vendredi 27 et samedi 28 avril 2012, de 9 h à 17 h 30.

Contact : Bérengère Hurand, berhurand [at] yahoo.fr

Protéger la nature, la valoriser, est-ce la sacraliser ? Ce colloque nous invite à rouvrir la question philosophique de la nature, et à la repenser à la lumière de la crise environnementale. À travers les savoirs de l’écologie, des sciences humaines et des religions, il s’agit, plutôt que de juger du contenu écologique des religions, de mettre au jour la teneur religieuse de la pensée écologique, et en analyser la signification.

Archéologie de l’esclavage colonial

Paris, 75007, musée du quai Branly, 218, rue de l’Université.

Du mercredi 9 au vendredi 11 mai 2012.

Contact : Nathalie Mercier, tél. : 01 56 61 70 20, nathalie.mercier [at] quaibranly.fr

Confrontant études récentes aux États-Unis, à Cuba, à la Jamaïque, aux Antilles, en Amérique latine, en Guyane, en Afrique, à la Réunion et à l’île Maurice, ce colloque international vise à faire le point sur les avancées récentes de la connaissance de la traite, de l’esclavage et du marronnage, et propose une meilleure prise en compte du patrimoine archéologique du système esclavagiste.

La fin de la faim en 2050 ?
Sans tabous, ni verrous

Paris, 75019, auditorium de la Cité des sciences et de l’industrie, 30, avenue Corentin-Cariou.

Vendredi 11 et samedi 12 mai 2012.

Contact : conferences [at] universciences.fr

Organisé par Universcience, en partenariat avec l’Académie des sciences, AgroParisTech, AgroParisTech Alumni, le Cirad, le Campus Condorcet, l’Inra et l’Iddri.

Un grand nombre de risques pèsent sur la sécurité alimentaire mondiale : l’augmentation de la population humaine, l’épuisement des ressources et des sols, le changement climatique, la volatilité des prix des denrées, la compétition entre cultures alimentaires et non alimentaires, les inégalités Nord-Sud, etc. Comment prévenir les crises alimentaires ? Quelles réponses sanitaires, technologiques, politiques faut-il imaginer ? Quels modes de prises de décision et de négociation faut-il mettre en place ? Sous forme de tables-rondes, les spécialistes réagiront à la présentation des recommandations et animeront par ailleurs des sessions plénières sur : « L’ampleur du défi international » ; « Et si la solution venait des marchés et de la consommation ? » ; « Quelles sont les limites environnementales et comment adapter la gouvernance ? » ; « L’avenir se construit aujourd’hui : constat, synthèse et perspective des experts et décideurs. »

Les ports atlantiques français, la traite des Noirs
et l’esclavage (18e-19e siècles). Approches comparées

Le Havre, 76600, hôtel Dubocage de Bléville 1, rue jérôme-Bellarmato.

Mardi 15 et mercredi 16 mai 2012, à partir de 10 h.

Organisation : Université du Havre.

Renseignements : tél. : 02 35 41 69 15 / 02 35 41 69 17.

Entrée : libre.


Transformation ou rupture des équilibres internationaux :
repenser la structure du système international contemporain
Congrès annuel de la Société québécoise de science politique 2012

Université d’Ottawa, Ontario, Canada.

Du mercredi 23 au vendredi 25 mai 2012.

Contacts : Kim Fontaine-Skronski, kim.fonatine-skronski.1 [at] ulaval.ca ; Irving Lewis, irwing.lewis.1 [at] ulaval.ca


Regards transatlantiques sur l’intégration de la Bourgogne
au royaume de France à l’époque moderne

Dijon, 21000, Académie des sciences, arts et belles-lettres, 5, rue de l’École de Droit.

Jeudi 24 et vendredi 25 mai 2012, à partir de 9 h 30 (jeudi) et 9 h (vendredi).

Contacts : Dominique Le Page, do.le-page [at] wanadoo.fr ; Jérôme Loiseau, jeromeloiseau [at] club-internet.fr

Entrée libre.

Depuis les travaux pionniers de Robert Forster (1971), la Bourgogne s’est installée durablement dans le paysage historiographique de langue anglaise où elle jouit d’une notoriété souvent insoupçonnée des Bourguignons eux-mêmes. De nombreux historiens, anglo-saxons et français, vont confronter leurs travaux.

L’invention de la « race ». Représentations scientifiques
et populaires de la race, de Linné aux spectacles ethniques

Lausanne, Suisse, Université de Lausanne.

Jeudi 24 et vendredi 25 mai 2012.

Renseignements : Université de Lausanne / www.unil.ch / uniscope [at] unil.ch

Ce colloque souhaite analyser la genèse des conceptions scientifiques de la « race » et leurs conséquences sur les taxonomies des collections humaines, dans les musées d’ethnographie et les exhibitions ethniques. Il est organisé par l’Université de Lausanne, s’inscrit dans le prolongement du colloque du musée du quai Branly « Autour des zoos humains »  de janvier 2012 et dans le cadre du programme « Zoos humains » à la suite des colloques de Marseille (CNRS / Université Marseille I, juin 2001), Londres (Université de Liverpool & Centre culturel français, novembre 2008) et Paris (Musée du Quai Branly, janvier 2012). Il est organisé en partenariat avec Le Groupe de recherche Achac, L’Institut d’Histoire économique et sociale, L’Institut d’histoire de la médecine, Le collège des humanités de l’École Polytechnique fédérale de Lausanne, avec le soutien du Fonds national pour la recherche scientifique (FNS).

La France et la Russie dans l’Europe des 19e et 20e siècles
9es Journées de l’histoire de l’Europe

Paris, 75017, centre Malesherbes, La Sorbonne, 108 boulevard Malesherbes.

Vendredi 1er et samedi 2 juin 2012, de 10 h à 20 h.

Inscription : 40 €, tarifs réduits 35 €, – 26 ans 20 €. S’inscrire sur le site de l’Association des historiens, http://association.histoire.free.fr ou au +33 (0)1 48 75 13 16 ; entrée libre pour le Salon européen du livre d’Histoire.

Nombreuses conférences d’histoire et d’histoire de l’art, tables-rondes thématiques et conférences panoramiques, avec la participation notamment de Lucien Bély, Marie-Pierre Rey, Lorraine de Meaux, Korine Amacher, Jacques Frémeaux, Claire Mouradian, Sabine Dullin, Emilia Robin, Anne de Tinguy…

Inégalités et violences sociales : dire l’injustice

Université de Poitiers.

Vendredi 1er et samedi 2 juin 2012.

Contacts : Raphaëlle Guidée, raphaelle.guidee [at] univ-poitiers.fr ; Patrick Savidan, patricksavidan [at] gmail.com

Ce colloque international est organisé par le CRHIA et le Forell B3 de l’Université de Poitiers, en partenariat avec l’Observatoire des inégalités et la revue Raison publique (Presses de l’Université Paris-Sorbonne) seront partenaires de l’événement.

Richesse et sociétés

Nanterre, 92000, Université Paris-Ouest-Nanterre-La Défense, bâtiment B, salle des conférences, 200 avenue de la République.

Du mercredi 6 au vendredi 8 juin 2012, de 9 h à 18 h.

Contacts : Catherine Baroin, catherine.baroin [at] mae.u-paris10.fr ; Cécile Michel, cecile.michel [at] mae.cnrs.fr ; Carine Constans, carine.constans [at] mae.u-paris10.fr

À l’heure où le public s’interroge de plus en plus sur le bien-fondé des politiques de croissance, liées à l’économie de marché, c’est le thème du don, à partir de l’essai de Marcel Mauss, qui lui fait en contrepoint le plus large écho. Il existe pourtant d’autres formes d’échange, et l’étude de la richesse, dans les sociétés « autres » en particulier, ne saurait se limiter au don. Elle peut s’aborder de bien d’autres manières, que ce 9e colloque de la Maison René-Ginouvès, archéologie et ethnologie, se propose de développer afin d’élargir le débat.

La migration en héritage dans les Amériques

Paris, 75013, Université Paris-Diderot, 5 Rue Thomas-Mann.

Du mercredi 6 au vendredi 8 juin 2012.

Contact : colloquemigrations2012 [at] institutdesameriques.fr

Ce colloque annuel de l’Institut des Amériques explorera l’histoire des migrations vers les Amériques en privilégiant 4 axes : les temporalités, les trajectoires, les expériences individuelles, et la transmission.

Gouvernance globale contre régulation ?
Quelle normativité pour les relations internationales ?

Université catholique de Louvain, Louvain-la-Neuve, Belgique.

Jeudi 7 et vendredi 8 juin 2012.

Contact : Yves Palau, palau [a] u-pec.fr

Le Laboratoire de recherche sur la gouvernance publique (Largotec) organise un colloque sur la gouvernance globale, en partenariat avec le Réseau d’études sur la globalisation et la gouvernance internationale et les mutations de l’État et des nations (Regimen), l’Association des internationalistes et le Centre d’études des crises et des conflits internationaux (Cecri).

Colloques importants du monde non francophone

Linnean Worlds: Global Scientific Practice
during the Great Divergence

World History Center, University of Pittsburgh, Pennsylvanie, États-Unis.

Les 4 et 5 mai 2012.

Informations : www.worldhistory.pitt.edu/PreliminaryConferenceProgram1.htm


Distributing Human Resources for Health:
Ethics and Health Policy
Brocher Summer Academy in Global Population Health 2012

Genève, Suisse.

Du 18 au 22 juin.

Informations : www.brocher.ch/pages/programme.asp

Contact : Brocher Foundation, Summer Academy in Global Population Health, route d’Hermance, 471, CP 70, CH-1248 Hermance / Suisse.


Frontiers and Borders in World History
Indigenous Peoples in World History
Summer’s 21st Annual World History Association
dual theme conferences

Albuquerque, Nouveau-Mexique, États-Unis.

Du 27 au 30 juin 2012.

Informations : www.thewha.org


The Asia-Pacific Maritime World:
Connected Histories in the Age of Empire

Heidelberg University, Allemagne.

Du vendredi 6 au dimanche 8 juillet.

Contact : Martin Dusinberre, martin.dusinberre [at] ncl.ac.uk


The Reshaping of Planet Earth:
Connections Between Humans
and the Environment in World History
3rd Annual Midwest World History Association Conference

Grand Valley State University, Allendale, Michigan, États-Unis.

Du 2 au 5 août 2012.

Contact : Paul Jentz, paul.jentz [at] nhcc.edu

Plus d’info : www.mwwha.org


Teaching and Researching Big History:
Exploring a New Scholarly Field
1rst international big history conference
from the International Big History Association (IBHA)

Grand Valley State University, Grand Rapids, Michigan, États-Unis.

Du 3 au 5 août 2012.

Plus d’info : www.ibhanet.org, cliquez sur « Conference ».


Conférences, débats, tables rondes et journées d’étude

La mesure du temps
Cycle de conférences du Campus Condorcet

Aubervilliers, 93304, théâtre de la Commune, 2 rue Édouard-Poisson.

Aubervilliers, 93533, lycée Le Corbusier, 44 rue Léopold-Réchossière.

Entrée libre.

Avant que la globalisation du monde et les technologies modernes n’exigent et ne permettent la mesure universelle d’un temps de plus en plus abstrait des rythmes naturels du soleil, de la lune et des étoiles, chaque civilisation s’est dotée de calendriers appropriés à ses usages pratiques et symboliques du temps : qu’il s’agisse des cycles annuels ou du découpage égal ou inégal des mois ou des heures, la variété des solutions proposées n’a d’égal que le raffinement stupéfiant des spéculations élaborées dans chaque culture par les prêtres ou les astronomes. Un regard historique et comparatif s’impose pour éclairer les énigmes que le temps et sa mesure ne cessent de poser aux hommes et aux sociétés.

• Lundi 2 avril, à 19 h, lycée Le Corbusier : intervention de Jean-Jacques Glassner, historien, CNRS, « Les calendriers mésopotamiens ».

• Lundi 4 juin, à 19 h, théâtre de la Commune : intervention de Christian Chardonnet, physicien, CNRS, Paris-13, « La mesure du temps de la révolution industrielle à nos jours ».

Y a-t-il une histoire universelle ?
Café historique

Tours, 37000, Le Palais, 15, place Jean Jaurès.

Organisation : Les Rendez-Vous de Blois.

Information : François Barré, tél. : 02 38 53 08 27 ou 02 54 56 84, cafes.region.rvh [at] wanadoo.fr

Entrée libre.

La vogue récente de l’histoire mondiale semble remettre en selle l’ambition qu’eurent pendant longtemps certains historiens de saisir l’universalité du devenir humain. Mais peut-on encore croire à un temps universellement orienté ? L’élargissement des horizons de l’histoire travaille plutôt aujourd’hui à désorienter nos certitudes…

• Mercredi 3 avril à 20 h : avec Patrick Boucheron, maître de conférences en histoire médiévale à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne.

Révolutions dans le monde musulman :
l’actualité au regard du passé
Cycle de conférences IISMM / EHESS et Collège de France

Paris, 75006, Amphithéâtre de l’EHESS, 105 bd Raspail.

Contact : Marie-Hélène Bayle, marie-helene.bayle [at] ehess.fr

Ce cycle de conférences publiques veut aborder les événements en cours à travers une vision globale, ancrée dans l’histoire des pays d’Islam. En se situant dans la longue durée, au sein d’un espace élargi à l’ensemble du monde musulman, il offrira une réflexion sur les phénomènes révolutionnaires, les aspirations démocratiques et la mise en place des nouveaux régimes.

• Mardi 3 avril 2012, de 18 h à 20 h : intervention de Nora Benkorich, Collège de France, « Révolution en Syrie ? ».

• Mardi 10 avril 2012, de 18 h à 20 h : intervention de Federico Cresti, Université de Catane, Italie, « La Libye, de la colonisation italienne au renversement de Kadhafi ».

• Mardi 15 mai 2012, de 18 h à 20 h : intervention de Michel Boivin, CNRS, « La révolte des Cipayes, 1857: lectures plurielles d’un événement fondateur de l’histoire de l’Inde ».

• Mardi 22 mai 2012, de 18 h à 20 h : intervention d’Élisabeth Allès, CNRS, Centre d’études sur la Chine moderne et contemporaine/EHESS, « Les révoltes ouïgoures en Chine depuis les années 1990 ».

• Mardi 29 mai 2012, de 18 h à 20 h : intervention de François Burgat, CNRS, Iremam Aix-en-Provence, Institut français du Proche-Orient, « La sortie de l’autoritarisme dans le monde arabe : quels acquis et quels défis ? ».

Journée antimafia

Paris, 75007, IEP, 27, rue Saint-Guillaume.

Mardi 3 avril 2012, de 10 h 15 à 21 h 15.

Inscription : www.sciencespo.fr/evenements/inscription/inscription_multiple.php?code=k5k7kj&id=1015

Contact : lastrada.scpo [at] gmail.com

Organisée par l’association La Strada, Sciences Po Paris, en partenariat avec Flare France, cette journée d’étude vise à comprendre les défis posés par la criminalité organisée en Europe et dans le monde. Elle se déroulera en 3 parties : une matinée consacrée aux « Mafias dans le monde » ; un atelier juridique en première moitié d’après-midi ; une seconde moitié d’après-midi intitulée « Le crime organisé en France ».

L’histoire mondiale de la colonisation
Cycle de conférences du musée du quai Branly

Paris, 75007, musée du quai Branly, 206, rue de l’Université.

Contact : Nathalie Mercier, nathalie.mercier [at] quaibranly.fr

Informations : www.quaibranly.fr

• Jeudi 5 avril 2012, à partir de 18 h 30 : conférence-débat en présence de Simon Imbert-Vier, historien, spécialiste de l’Éthiopie, « Ménélik II et Hailé Sélassié ».

• Jeudi 3 mai 2012, à partir de 18 h 30 : conférence-débat en présence de Romain Bertrand, politologue spécialiste de l’Indonésie, « Sukarno ».

• Jeudi 21 juin 2012, à partir de 18 h 30 : conférence-débat en présence de Pierre Deléage, anthropologue américaniste, « Sitting Bull ».

Les Sujets de l’Empire :
écritures du sujet en situations coloniale et postcoloniale
Journées d’étude

Le Mans, 72085, bibliothèque universitaire, salle Pierre-Belon, Université du Miane, UFR Lettres, Langues et Sciences humaines, avenue Olivier-Messiaen.

Les 5 et 6 avril 2012.

Contact : Benaouda Lebdai, benaouda.lebdai [at] univ-lemans.fr


La fin des frontières ?
Cycle de conférences
de la Bibliothèque universitaire des langues et civilisations (Bulac)

Paris, 75013, auditorium du Pôle des langues et civilisations, 65, rue des Grands-Moulins.

Informations : Tél. : 01 81 69 18 38, action.culturelle [at] bulac.fr

• Mardi 10 avril, à 18 h 30 : « Afrique, permanence et artificialité des frontières », conférence-débat en présence de Pierre Boilley (historien, université Paris-I) et Camille Lefebvre (Cemaf).

• Mardi 15 mai, à 18 h 30 : « La Chine et ses frontières maritimes », conférence-débat en présence de Sébastien Colin (géographe, Inalco) et Jean-Marc Sorel, avocat (Panthéon-Sorbonne).

• Mardi 19 juin, à 18 h 30 : « De la carte au territoire : les nouvelles frontières de l’Asie centrale », conférence-débat en présence de Julien Thorez (CNRS) et Sébastien Colin (Inalco).

Action ou vérité : les géographes face à la société
Journée d’étude

Paris, 75005, Institut de géographie de Paris, 191 rue Saint-Jacques.

Mercredi 11 avril 2012, de 9 h 45 à 17 h 30.

Entrée libre.

Informations : https://sites.google.com/site/journeeigparis/edition-2012

Avec Jean-François Staszak, Christian Grataloup, Pierre Pech, Anne Jégou, Laura Péaud, Nashidil Rouaï, Marianne Blidon, Bastien Sepúlveda, Karine Duplan, Maud Verherve, Magali Coldefy, Arthur Devriendt, Sylvain Séguret…

Décalages : les autres et nous
Cycle de conférences du musée du quai Branly

Paris, 75007, musée du quai Branly, 206, rue de l’Université.

Contact : Nathalie Mercier, nathalie.mercier [at] quaibranly.fr

Informations : www.quaibranly.fr

• Jeudi 12 avril 2012, à partir de 18 h 30 : conférence-débat en présence de Julien Bonhomme, anthropologue africaniste, et de Jeanne Favret-Saada, ethnologue auteure de travaux sur la sorcellerie, « La sorcellerie en Afrique et en Europe ».

• Jeudi 24 mai 2012, à partir de 18 h 30 : conférence-débat en présence d’Irène Théry, sociologue, et de Sudhir Kakar, écrivain et psychanalyste indien, « Le mariage en Europe et en Inde ».

• Jeudi 7 juin 2012, à partir de 18 h 30 : conférence-débat en présence de Jérôme Bourgon, historien spécialiste de l’histoire du droit chinois, et d’Antoine Garapon, magistrat et secrétaire général de l’Institut des hautes études sur la Justice, « Le châtiment en Chine et en Europe ».

• Jeudi 28 juin 2012, à partir de 18 h 30 : conférence-débat en présence de Catherine Clément, philosophe et romancière, « L’extase et la transe ».

« Thawra » / Les soulèvements arabes
Cycle de conférences Iremam / Cherpa

Aix-en-Provence, sur divers sites.

Cette série de tables-rondes est destinée à exposer, débattre, expliquer les mécanismes des mouvements du monde arabe. Plutôt que de produire des analyses ad hoc, il s’agit pour nous de saisir cette fenêtre d’opportunité pour reformuler d’anciennes questions, en proposer de nouvelles, ou nous interroger sur les ressorts possibles du comparatisme. Ces séances, introduites par un court texte assorti de questions, s’adressent à un large public.

• Jeudi 12 avril 2012, de 18 h à 20 h, Salle Georges-Duby, MMSH, 5, rue du Château-de-l’Horloge : Séance « Activistes, combattants et insurgés. Les acteurs des soulèvements arabes », introduite et présentée par Amin Allal, Cherpa/Iremam, avec les interventions de Claire Beaugrand, Institut français du Proche-Orient, « Bahreïn, qui veut en découdre ? », d’Arthur Quesnay, Paris-1– Panthéon-Sorbonne, « Libye. Au cœur d’une Katiba (unité de combattants) », de Youssef al-Chazli, Université de Lausanne, Ceri/IEP Paris, « Égypte. La nuit où “tout fout le camp” au Caire », et de Sélim Smaoui, IEP Paris, « Maroc. La coordination casablancaise du Mouvement du 20 février au péril des Baltajiyya ».

• Jeudi 10 mai 2011, de 18 h à 20 h, IEP, 25, rue Gaston-de-Saporta : séance « La question islamiste dans le printemps arabe », introduite et présentée par Alix Philippon, Cherpa, avec les interventions de Jean-Pierre Filiu, IEP Paris, François Burgat, IFPO, CNRS, et Patrick Haenni, Institut Religioscope, Fribourg.

Historiographies d’ici, historiographies d’ailleurs
Cycle de conférences

Paris (75000). Grands Moulins (Inalco) et Olympiades (Université Paris-Diderot) et musée du quai branly.

Contact : Nathalie Kouamé, nakouame [at] yahoo.fr

Comment écrit-on l’histoire en-dehors du monde occidental ? Des historiens s’interrogent sur la manière dont les sociétés non occidentales qu’ils étudient font le récit de leur passé. Ces conférences sont organisées en partenariat par le laboratoire HSTM de l’Inalco, le laboratoire Sedet de l’Université Paris-Diderot et le musée du quai Branly.

• Jeudi 12 avril 2012 de 17 h 30 à 19 h, salle de cinéma du musée du quai Branly : intervention de Faruk Bilici, Inalco, « Empire ottoman : l’historiographie ottomane et l’Europe, 16e-19e siècles ».

• Jeudi 3 mai 2012 de 17 h 30 à 19 h 30, Inalco – Grands Moulins : intervention d’Emmanuel Poisson, Université Paris-Diderot, « Viêtnam : “De l’utilité de la traîtrise”, historiographie et légitimité dans le Traité sur l’An Nan (1335) de Lê Trac ».

• Jeudi 10 mai 2012 de 17 h 30 à 19 h, salle de cinéma du musée du quai Branly : intervention de Jacques Pouchepadass, CNRS, EHESS, « Inde, 1982-2012 : pour une relecture des subaltern studies indiennes ».

Bousculer la nation ?

Paris, 75004, Mairie, 2 place Baudoyer.

Samedi 14 avril.

Informations : Patricia Legris, patricia.legris [at] wanadoo.fr

Journée d’études organisée par le collectif Pour l’aggiornamento de l’histoire et de la géographie.

Avec Suzanne Citron, Patricia Legris, Cécile Gintrac, Sarah Mekjian, Micheline Roumegous, Antoine Savoye, Charles Heimberg et Laurence de Cock.

Acteurs émergents et gouvernance mondiale :
défis et opportunités

Liège, 4000, Belgique, Université de Liège, faculté de droit et de science politique, département de Science politique, Boulevard du Rectorat, 7, bâtiment 31.

Mercredi 25 avril 2012, de 13 h à 18 h.

Contacts : Sophie Wintgens, sophie.wintgens [at] ulg.ac.be ; Geoffrey Grandjean, geoffrey.grandjean [at] ulg.ac.be

Ce 5e après-midi de recherche du département de science politique de l’Université de Liège (ULg) se penchera sur les changements fondamentaux et rapides se produisent à l’échelle planétaire. Les multiples défis mondiaux et la montée en puissance des acteurs émergents dans l’économie mondiale ont une incidence sur les relations internationales. De nouveaux modes de partenariat Sud-Sud se dessinent, entraînant une remise en cause majeure des stratégies de développement actuelles et une recomposition progressive du système international. L’analyse portera sur, d’une part, l’impact de l’émergence de ces « nouveaux » acteurs sur l’économie et la politique mondiales, ainsi que sur les relations Nord-Sud, tout en intégrant, d’autre part, la question de leurs faiblesses internes.

Séminaires et ateliers de recherche

Empires. Histoire des colonisations
Séminaire

Paris, 75005, salle de réunion de l’IHMC, École Normale Supérieure, 45 rue d’Ulm.

Contact : Emmanuelle Sibeud, esibeud [at] gmail.com

Ouvert à toutes les chercheurs travaillant sur les colonisations et sur les empires, ce séminaire entend être un lieu de réflexion collective et de débat autour des objets, des concepts et des démarches qui renouvellent et élargissent actuellement les perspectives de recherche. Après avoir pris pour sujet les circulations, qui sont une des manifestations concrètes des empires, nous avons engagé la réflexion sur la notion d’empire, à la fois centrale et polysémique.

• Lundi 2 avril 2012, de 18 h à 20 h : intervention de Xavier Huetz de Lemps, Université de Nice, « Peut-on parler d’un renouveau “impérial” de l’Espagne au 19e siècle (1808-1930) ? ».

• Lundi 14 mai 2012, de 18 h à 20 h : intervention de Marie-Karine Schaub, Université de Créteil, « L’Empire russe : idée et construction impériale, 16e-fin 18e ».

• Lundi 11 juin 2012, de 18 h à 20 h : intervention d’Éric Jennings, Toronto University, « Un empire sans métropole : la France libre en AEF, 1940-1942 ».

Histoire transnationale des pensées raciales, 18e-20e siècles
Séminaire

Paris, 75016, New York University, 56 rue de Passy.

Contact : Carole Reynaud-Paligot, c.reynaud-paligot [at] orange.fr

Le discours scientifique autour de la notion de race, qui émerge dans la seconde moitié du 18e siècle, s’est développé au siècle suivant et a donné lieu, au 20e siècle, aux dramatiques usages politiques que l’on connaît. À l’ère contemporain de la globalisation ces discours s’avèrent résilients, occupant des brèches ouvertes par les brassages, déplacements, et transformations radicales du monde actuel. C’est dans une perspective de longue durée mais aussi dans un cadre transnational que son étude nous semble devoir être entreprise.

• Lundi 2 avril, de 17 h à 19 h : intervention de Camille Hamidi, « Catégorisations ethniques ordinaires et rapport au politique dans les quartiers populaires ».

• Lundi 21 mai, de 17 h à 19 h : intervention de Richard Fogarty, University d’Albany, « Race et guerre, 1914-1918 : visions comparatives des sujets coloniaux dans l’armée française ».

• Lundi 4 juin, de 17 h à 19 h : intervention de Vincent Vilmain, EPHE-GSRL et Université de Lyon-3, « Penser le judaïsme comme race ? Les Juifs face au défi du racialisme (1860-1920) ».

Penser la guerre :
autour des recherches et des publications récentes
Séminaire

Paris, 75006, EHESS, salle 4, 105, boulevard Raspail.

Informations : www.ehess.fr/fr/enseignement/enseignements/2011/ue/963

Contact : Jean-Vincent Holeindre, jvholeindre [at] gmail.com

• Mardi 3 avril, de 19 h à 21 h  : intervention de Beatrice Heuser (Université Reading) : autour de son livre The Evolution of Strategy: Thinking War from Antiquity to the Present, Cambridge University Press, 2010.

• Mardi 22 mai, de 19 h à 21 h  : intervention de Jean-Baptiste Jeangène Vilmer (McGill University), autour de son livre La guerre au nom de l’humanité ? Tuer ou laisser mourir, Presses universitaires de France, 2012.

Nations, nationalismes, identités nationales
Séminaire

Paris, 75006, salle de conférence du Ceri, 56 rue Jacob.

Contacts : Vincent Martigny, vincent.martigny [at] sciences-po.org ; Audrey Célestine, audrey.celestine [at] gmail.com

Entrée libre.

Ce séminaire interdisciplinaire s’adresse aux chercheurs et aux doctorants intéressés par le phénomène nationalitaire entendu au sens large, et par les questions qui s’y rattachent. Son objet est de fédérer les chercheurs pour qui la nation, le nationalisme ou le sentiment national sont les ou l’un des thèmes de recherche, afin de constituer un groupe de réflexion scientifique autour de cette question.

• Mercredi 3 avril, de 14 h à 16 h 30 : intervention de Herman Lebovics (New York University), « Les non-dits de la France postcoloniale ». Discutantes : Anne-Marie Thiesse (CNRS, ENS), et Angéline Escafré-Dublet (Ceri).

Le Printemps arabe et la place des émotions
dans les mouvements sociaux
Séminaire

Paris, 75013, Salle du Conseil B, MSH – EHESS, 190 avenue de France.

Organisé par l’Association française de sociologie, RT 21 « Mouvements sociaux ».

Contact : Geofrrey Pleyers, geoffrey.pleyers [at] uclouvain.be

Informations : http://mvtsociaux.hypotheses.org

• Mercredi 4 avril, de 15 h à 19 h : avec les interventions de Fahrad Khosrokhavar (EHESS), « Quatre émotions dans le Printemps arabe : la peur et son dépassement, la jubilation, la colère et l’ironie », et de James M. Jasper (University of New York), « Leçons du printemps arabe : microfondations de l’imprévisible », cette séance sera consacrée à la théorie des mouvements sociaux, à la place des émotions dans les sciences sociales contemporaines et à une analyse du printemps arabe à partir de cette perspective. Discutants: Nonna Mayer (Cevipof) et Geoffrey Pleyers (UC Louvain et Cadis).

• Vendredi 4 mai, de 15 h à 18 h, salle 2, même adresse : avec une intervention de Hakan Thörn (Université de Goteborg) « Restructuration urbaine, mouvements sociaux et politique de l’espace ouvert ».

Atelier pluridisciplinaire
de recherche sur la guerre et la paix

Paris, 75005, salle Perroy, Centre Sorbonne, 1 rue Victor-Cousin.

• Mercredi 4 avril, de 18 h à 20 h : intervention de Pierre Salignon (Médecins du Monde), « Les opérations de secours en ex-Yougoslavie, 1991-1999 : enjeux humanitaires et militaires ».

• Mercredi 2 mai, de 18 h à 20 h : interventions de Xavier Lapray (historien, Université de Paris-1), « Violences de guerre : une approche historique du combat, des batailles ; perspectives historiographiques et méthodologiques à partir du cas romain » ; et d’Alex Watson (historien, Université de Varsovie), « Motivation, violence et résilience dans les armées britanniques et allemandes en 1914-1918 ».

• Mercredi 16 mai, de 18 h à 20 h : intervention de Joël Candau (anthropologue, Université de Nice), « Tragédies, mémoire et métamémoire ».

• Mercredi 6 juin, de 18 h à 20 h : Séance de bilan.

Histoire mondiale
Séminaire

Paris (75005). Salle de séminaire de l’IHMC, 3e étage, escalier D, École normale supérieure, 45 rue d’Ulm.

Contact : Chloé Maurel, chmaurel [at] yahoo.fr

Quels sont les enjeux de l’histoire mondiale/globale ? Quels nouveaux chantiers de recherche ouvre-t-elle ? Comment les historiens de ce courant abordent-ils leur objet d’étude et que leur apporte cette approche mondiale ? Les chercheurs invités à ce séminaire et les discussions tenteront d’apporter des éléments de réponse.

Ce séminaire est ouvert à tous.

• Jeudi 5 avril 2012, de 18 h à 20 h : intervention d’Olivier Grenouilleau, Université de Nantes, « Abolir l’esclavage, un projet global ».

• Jeudi 19 avril 2012, de 18 h à 20 h : intervention de Sandrine Kott, Université de Genève, « “Global Labour” et l’OIT (1947-1973) dans une perspective post-guerre froide ».

• Jeudi 3 mai 2012, de 18 h à 20 h : interventions d’Aurélie Élisa Gfeller, Université de Princeton, Fonds national suisse de la recherche scientifique, Institut de hautes études internationales et du développement, Genève, « Des sept merveilles du monde vers un concept holistique ? Le patrimoine mondial de l’Unesco : débats et réformes, 1972–1994 » ; et de Monique Constant, directrice adjointe des archives du ministère des Affaires étrangères, « Les archives de la SDN ».

Les Empires, et après…
Dire et écrire les expériences coloniales et post-coloniales
Séminaire

Montpellier, 34090, Maison des sciences de l’homme, 17 rue Abbé-de-l’Épée.

Informations : www.histoiredroitcolonies.fr/?Les-Empires-et-apres-Dire-et,321

• Jeudi 5 avril, de 14 h à 17 h : intervention de Jean-François Klein (Inalco), « Le patronat impérial français : entre puissance supposée et efficacité de terrain (fin 18e– mi-20e siècle) ».

• Jeudi 10 mai, de 14 h à 17 h : intervention de Laurent Dubreuil (Cornell University, Ithaca), « L’empire de la littérature, ou la critique postcoloniale entre histoire et théorie littéraire ».

• Jeudi 7 juin, de 14 h à 17 h : intervention de Anne-Sophie Bruno (Paris-13), « Les migrants de Tunisie sur le marché du travail parisien : effets de nationalité et transposition de situations coloniales », avec Philippe Rygiel (Paris-1).

Ni guerre, ni paix :
arrangements et réarrangements du droit et de la violence
Séminaire

Paris, 75006, EHESS, salle 4, 105, boulevard Raspail.

• Jeudi 5 avril 2012, de 13 h à 15 h : intervention de Bruno Karsenti (EHESS), « Le criminel, le patriote, le citoyen ».

• Jeudi 3 mai 2012, de 13 h à 15 h : intervention de Cédric Moreau de Bellaing (ENS) et Dominique Linhardt (CNRS), « Comment décrire la violence dans l’action ? ».

• Jeudi 7 juin 2012, de 13 h à 15 h : intervention de Danny Trom (CNRS), « De la guerre nationale à la guerre civile européenne ».

• Jeudi 21 juin 2012, de 13 h à 15 h : séance conclusive du séminaire.

L’altérité
Séminaire

Paris, sur divers sites.

Information : www.geographie.ens.fr/-Alterite-.html

L’autre est-il ailleurs ? Certaines formes d’altérité et de catégories portent explicitement un lien à l’espace. La bizarrerie du sauvage, de l’exotique, des étrangers, des sans domicile fixe, des touristes ou des extra-terrestres passe d’abord par leur inscription spatiale. Mais elle se glisse aussi de manière plus discrète, dans les découpages de genre, de classes sociales, de « race » ou d’espèces (humain/animal)… Comment l’espace participe-t-il de la construction de l’altérité ?

• Vendredi 6 avril, salle des Actes, 45 rue d’Ulm, à partir de 14 h : intervention de Dominique Lestel (philosophe et éthologue, ENS), « L’altérité animale ».

• Jeudi 3 mai, salle Weil, 45 rue d’Ulm, à partir de 18 h : intervention de Yann Calbérac (géographe, IUFM de Paris), « Le terrain, un ailleurs où rencontrer l’altérité ? ».

• Jeudi 7 juin, salle Weil, 45 rue d’Ulm, à partir de 18 h 30 : intervention de Jean-François Staszak (géographe, Université de Genève), « L’écran de l’altérité : Joséphine Baker et Anna May Wong ».

Les sciences sociales face au global
Séminaire

Nanterre, 92000, bâtiment T, salle 237, Université Paris-Ouest-Nanterre, 200 avenue de la République.

Contacts : Axel Barenboim, axel.barenboim [at] gmail.com ; Stéphane Dufoix, stephane.dufoix [at] wanadoo.fr ; Adèle Momméja, adele.mommeja [at] gmail.com

Ce séminaire s’intéresse cette année à la période contemporaine, que l’on considère souvent comme étant « l’ère du global », de la mondialisation et de la globalisation.

• Mardi 10 avril 2012, de 17 h à 19 h : intervention de Tristan Mattelart, Paris-8, « Médias et mondialisation culturelle ».

• Mardi 15 mai 2012, de 17 h à 19 h : intervention de Julie Allard, Fonds National de la Recherche Scientifique, Université libre de Bruxelles, « La globalisation du droit : les prémisses d’une justice universelle ? ».

• Mardi 22 mai 2012, de 17 h à 19 h : intervention de Monika Salzbrunn, Université de Lausanne, « Locating global migration processes through festive events: Nouvelles perspectives pour les recherches sur les migrations internationales ».

Intégrations régionales comparées :
Asie du Sud-Est, Amérique latine, Europe
Séminaire

Paris, 75006, Ceri, 56 rue Jacob.

Mardi 10 avril 2012, à partir de 9 h.

Contact : Rachel Guyet, tél. : 01 58 71 70 07, reseau.coesionet [at] sciences-po.fr

Séminaire de recherche organisé par le Centre d’études et de recherches internationales (Ceri), sous la présidence de Jingjai Hanchanlash (EU Economic Council). Avec les interventions de Ruth Banomyong (université Thammasat, Thaïlande), « Asie du Sud-Est. Le développement de la sous-région du Grand Mékong » ; Alvaro Artigas (IEP-Paris), « Amérique latine. Intégrer le développement, développer l’intégration » ; François Bafoil (CNRS/Ceri) eet Gilles Lepesant (CNRS/IEP-Paris), « Europe. Analyse comparée avec l’expérience européenne ».

L’Europe des guerres lointaines :
représentations et sensibilités, 1820-1930
Séminaire

Paris, 75005, salle Picard 1, escalier C, 3e étage, couloir droite, Université Paris-1, 17 place de la Sorbonne.

Contact : Hervé Mazurel, hmazurel [at] hotmail.com

Les « guerres lointaines » : on en parlait beaucoup dans l’Europe du 19e siècle. Elles avaient pour cadre les confins du continent, de la Grèce à la Crimée ; le Nouveau Monde des armées de Bolivar, des volontaires garibaldiens, de l’intervention française au Mexique ou de la guerre de Sécession ; l’immense Asie, depuis l’Afghanistan jusqu’à la Chine et à la guerre russo-japonaise ; l’Afrique mal connue, de l’expédition d’Alger à la guerre des Boers ; les mers du Sud, enfin, où un certain nombre de conflits accompagnèrent la désignation nouvelle de l’océan dit « Pacifique ». Ce séminaire se propose d’étudier, non pas exactement les guerres elles-mêmes, mais l’écho qu’elles eurent en Europe.

• Mercredi 11 avril, de 16 h à 18 h : intervention de Farid Ameur, Paris-1, « “Comme c’est étrange…” Regards français sur la guerre civile américaine. 1861-1865 ».

• Mercredi 9 mai, de 16 h à 18 h : intervention de Luis Teixeira, Paris-1, « La “conquête du Sahara” : le récit des guerres françaises au Sahara par les historiens et les géographes européens (1830-1930) ».

• Mercredi 23 mai, de 16 h à 18 h : Conclusions.

Historiographies d’ici, historiographies d’ailleurs :
comment écrit-on l’histoire en dehors du monde occidental ?
Séminaire

Paris, sur divers sites.

Organisé par partenariat entre l’Inalco, l’Université Paris-Diderot et le musée du quai Branly.

• Jeudi 12 avril 2012, de 17 h 30 à 19 h, salle de cinéma du musée du quai Branly : intervention de Faruk Bilici (Inalco) , « Empire ottoman : l’historiographie ottomane et l’Europe, 16e – 19e siècles ».

• Jeudi 3 mai 2012, de 17 h 30 à 19 h 30, Inalco – Grands Moulins : intervention d’Emmanuel Poisson (Université Paris-Diderot) , « Viêtnam, de l’utilité de la traîtrise : historiographie et légitimité dans le Traité sur l’An Nan (1335) de Lê Trac ».

Les ethnologues et le fait colonial, 1920-1960
Séminaire

Paris (75006). Salle 1, EHESS, 105 Bd Raspail.

Contact : Christine Laurière, christine.lauriere [at] ehess.fr

Ce séminaire entend revenir de façon dépassionnée sur les rapports entre anthropologie et colonisation. Longtemps accusée d’être la fille du colonialisme, née « d’une ère de violence » (Lévi-Strauss), l’anthropologie des années 1960-1970 a vigoureusement battu sa coulpe et douloureusement pris conscience des relations complexes entre la constitution du savoir ethnographique et le pouvoir impérial. L’historiographie récente invite à étudier à nouveau frais cette question, en partant non pas des concepts, des théories, mais de situations particulières qui unissent un individu précis (l’ethnologue) à une situation contextualisée et des pratiques savantes. En somme, c’est à une anthropologie des savoirs ethnographiques en situation coloniale que ce séminaire souhaite apporter sa contribution.

• Jeudi 12 avril, de 15 h à 17 h : intervention de Benoît de l’Estoile, CNRS, « L’Afrique comme laboratoire : réforme coloniale et anthropologie sociale en Grande-Bretagne dans l’entre-deux-guerres ».

• Jeudi 10 mai, de 15 h à 17 h : intervention de Daniel Fabre, EHESS, et André Mary, CNRS, « Présentation du numéro 161 (2012) d’Archives des Sciences sociales des religions “Messianismes et prophétismes au regard de l’anthropologie italienne. Hommage à Vittorio Lanternari” ».

• Jeudi 24 mai, de 15 h à 17 h : intervention de Jean Jamin, EHESS, « Retour sur la révolte des Mau-Mau (Kenya, années 1950) ».

• Jeudi 14 juin, de 15 h à 17 h : séance conclusive.

Les fabriques impériales de la modernité :
l’épreuve des Indes
Séminaire

Paris, 75006. Salle du Conseil, 4e étage, Centre d’études et de recherches internationales (Ceri), 56 rue Jacob.

Contacts : Romain Bertrand, romain.bertrand [at] sciences-po.fr ; Stéphane Van Damme, stephane.van.damme [at] sciences-po.fr

Séminaire de recherche de 3e cycle, ouvert aux étudiants. Demande d’inscription requises.

Histoire culturelle, histoire comparée, histoire globale, histoire coloniale, histoire croisée ou histoire connectée… Depuis une dizaine d’années fleurissent des courants examinant à nouveaux frais le passé. Il s’agit ici d’en préciser les apports et les limites respectives dans les situations de premier contact entre les empires coloniaux et les sociétés concernées, au principe de la fabrique du Grand Partage entre « l’Occident et le reste ».

• Lundi 16 avril, de 10 h à 13 h : interventions de Michael Rosenthal, Université de Warwick, « Picturing colonisation: The British in Australia (c. 1788-1810) » et de Pascal Dubourg-Glatigny, EHESS, Centre Alexandre-Koyré, « Représenter l’espace dans la première colonie hollandaise du Cap », discutante Anne Lafont, INHA.

• Lundi 14 mai, de 10 h à 13 h : interventions de Giancarlo Casale, University of Minnesota, « The Age of Discovery and the Universal Caliphate », et de Joyce Chaplin, Harvard University, « Around-the-World travel and the history of planetary consciousness », discutant Wolfgang Kaiser, Paris-1.

• Lundi 4 juin, de 14 h à 17 h 30 : interventions de Federico Marcon, Princeton University, « How to make a commodity: Natural history in Early Modern Japan », et de Bruno Latour, SciencesPo, « Un remède à l’occidentalisme, cet exotisme du dedans », discutants Romain Bertrand, Ceri/SciencesPo, et Stéphane Van Damme, SciencesPo.

L’histoire de l’État :
États, savoirs et institutions
en perspective transnationale, 18e-20e siècle
Séminaire

Paris (75006). Salle Jean Monnet, SciencesPo, 56 rue Jacob.

Contact : Nicolas Delalande, nicolas.delalande [at] sciences-po.fr

L’histoire politique de l’État, l’histoire de l’expertise et l’histoire de la mobilisation des savoirs dans l’action publique ont fait émerger ces dernières années de nouveaux objets et déplacé les frontières entre des types d’histoire qui parfois dialoguaient peu entre elles. Par les propriétés des objets considérés, ce séminaire impliquera de mettre en œuvre une approche transnationale et une perspective de longue période, de l’époque moderne à nos jours.

• Lundi 30 avril 2012, de 16 h à 19 h : interventions de Quentin Deluermoz, Paris-13, et Nicolas Delalande, « La circulation des savoirs policiers et fiscaux aux 19e et 20e siècles », discussion introduite par Jakob Vogel.

• Lundi 14 mai 2012, de 16 h à 19 h : intervention de Marc Lazar, «  Les gauches françaises et l’État », discussion introduite par Claire Lemercier.

Capitalisme et marchés, 18e-19e siècles
Séminaire

Paris (75005). Salle d’histoire, escalier D, 2e étage, École Normale Supérieure, 45 rue d’Ulm.

Contact : Pierre Gervais, pgervais [at] univ-paris8.fr

La question du développement du capitalisme et de la construction des marchés fait l’objet d’un actif renouvellement, grâce aux dialogues noués entre l’histoire et les autres sciences sociales (sociologie, droit, notamment). Le séminaire cherchera à comprendre autrement les transformations qui ont affecté les économies d’Ancien Régime et engagé de nouvelles formes de consommation, de commercialisation et d’industrialisation.

• Vendredi 4 mai 2012, de 16 h 30 à 18 h 30 : intervention de Ghulam Nadri, « Indian indigo and the political economy of commerce in the Early Modern World ».

• Vendredi 1er juin 2012, de 17 h à 19 h, horaires modifiés : intervention de Marco Belfanti, « Marques et contrefaçon à l’époque pré-industrielle : réflexions prémiminaires ».

Catastrophes, risques et sciences sociales
Séminaire

Paris, 75006. Salle du conseil, 4e ét., Ceri, 56 rue Jacob.

Contacts : Sandrine Revet, revet [at] ceri-sciences-po.org ; Marc Élie, marc.elie77 [at] gmail.com ; Frédéric Keck, keck.fred [at] gmail.com

Ce séminaire interdisciplinaire, organisé par l’EHESS/GSPM et SciencesPo/Ceri, interroge la question des risques et des catastrophes.

• Vendredi 11 mai, de 10 h à 13 h : Gianna Salome, Università degli studi di Messina, « Enjeux locaux de la reconstruction en Haïti. Perspectives anthropologiques », discutante Sandrine Revet, Ceri.

• Vendredi 25 mai, de 10 h à 13 h : Jan Plamper, Max Planck Institute, Center for the History of Emotions, « Natural disasters and emotions: Some reflections » (séance en anglais).

• Vendredi 22 juin, de 10 h à 13 h : Frédéric Graber, CRH, EHESS, « L’anticipation savante entre prédiction et organisation (18e-19e siècles) », discutant Marc Élie, Cercec.

Le climat totalitaire (suite et fin)…

Nous avons clôt le billet de la semaine dernière par une rapide revue des solutions proposées par Frédéric Denhez pour sauver les meubles (la démocratie, notre petit confort, etc.) de l’incendie qui vient de s’amorcer dans la maison Terre. Propositions séduisantes, même si l’auteur ne faisait qu’amorcer le délicat sujet de leur mise en œuvre. Pour le constat, alarmiste, il n’est pas le seul à penser que les dés de l’anthropocène sont jetés depuis longtemps – il ressort même des modérés optimistes.

Cet enfer qu’on nous annonce

Injustement brocardé à sa sortie, le dernier opus du penseur écologiste James Lovelock, La Revanche de Gaïa [2006], sonnait ainsi parmi une escouade d’autres ouvrages sur le même thème, la fanfare de l’Apocalypse. Passons sur l’hypothèse Gaïa chère à l’auteur, au demeurant pas si farfelue que cela même si elle fleure bon le New Age, et tenons-nous en aux faits, selon les scénarios les plus couramment admis (le Giec, Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, en l’espèce). C’est simple : la planète se réchauffe, l’activité humaine est en cause, et dans quelques décennies, nous vivrons dans un monde plus chaud de 2 à 6 degrés centigrades. C’est peu, et beaucoup à la fois. Car au-delà du seuil de 4 °C, il est à craindre que nombre d’équilibres vitaux, sociaux et économiques soient rompus. Ce n’est pas le manque de carburant qui va nous arrêter, on a assez de réserves du seul pétrole pour aller au-delà de ce seuil. Sauf virement majeur, imminent et massif des opinions publiques, ce n’est pas la volonté politique qui va nous sauver ; les atermoiements des différentes conférences sur le climat en témoignent éloquemment. Ce ne sont pas non plus les gestes individuels de type tri des déchets, d’abord parce qu’ils sont indexés sur des idées aussi libérales qu’écologistes (ce n’est pas être contempteur du libéralisme que de dire qu’il n’a pas vocation à sauver la planète, mais à produire de l’argent), ensuite parce qu’ils sont soumis à la perversion de l’effet rebond exposé par Denhez (voir notre dernier billet).

À la barre de l’accusation, l’économiste Jean-Paul Maréchal. Dans Chine/USA. Le climat en jeu [2011], il explique pourquoi les négociations internationales visant à limiter l’impact imminent du réchauffement climatique sont dans l’impasse. En cette matière comme en d’autres, le G2 s’impose comme l’axis mundi : la bipolarité de cet hybride, cette Chinamérique chère à l’historien Niall Ferguson, oppose deux géants, les États-Unis (première puissance économique planétaire, 19 % des émissions mondiales de CO2) à la Chine (deuxième puissance économique, première à l’horizon 2020-2030, pesant aujourd’hui 22,3 % des émissions de CO2). En gros, le premier compte le vingtième de la population mondiale, et rejette le cinquième des gaz à effet de serre, quand la seconde connaît des proportions exactement inverses… Et une croissance irrépressible, qui ne va que lui faire confirmer dans les années à venir sa place de premier pollueur mondial. Mais le premier aussi véhicule un lourd passif : sa prospérité est basée sur les émissions qu’elle a déjà effectuées au XXe siècle. D’où une rhétorique chinoise visant à faire payer les États-Unis pour leur passif, alors que les intéressés estiment que c’est à la RPC de porter le poids financier de la lutte contre ses actuelles émissions. Un dilemme planétaire, qui ne peut se résoudre que par un partage équitable du fardeau, ce qui nécessite l’élaboration d’une justice climatique internationale. En attendant, aucun des deux ne signe d’accord contraignant à une limitation des émissions. Conclusion de Maréchal, qui cite le politicien et sinologue Chris Patten : « La Chine ne bougera pas sans l’Amérique et l’Amérique ne bougera pas sans la Chine. Ils sont enfermés ensemble. Un accord entre eux est vital pour sauver le siècle. » Le climat, bien public mondial, est pris en otage par le G2, rivaux autistes obsédés par la défense de leurs intérêts immédiats.

La pétrocratie, ou l’essence du politique

Allons plus loin, pour suivre la pensée du géopoliticien Timothy Mitchell, qu’il introduit dans son récent Petrocratia [2011]. Cet essai étonnant, originellement titré Carbon Democracy [2011], est en passe d’être transmuté en un épais ouvrage à paraître cette année chez Verso. Sa thèse ? Les évolutions politiques que connaissent les sociétés sont liées à leur mode de consommation énergétique. Exploiter le charbon et le pétrole revient à consommer à une vitesse éclair les réserves en énergie que la Terre a accumulées depuis des centaines de millions d’années. La révolution industrielle a vu l’Angleterre s’extraire de la malédiction malthusienne en piochant dans le temps long des veines de charbon l’énergie nécessaire à la transformation de sa société : la civilisation de la vapeur libéra l’homme des limites de l’exploitation de la puissance dispensée par le Soleil. Concomitamment, il fallut alors exploiter ces hectares fantômes chers à Kenneth Pomeranz chez les autres, et y trouver les ressources nécessaires au mieux-être de ses nationaux. En découla logiquement la colonisation, pour exploiter les terres des Amériques afin de produire du sucre (un concentré de calories), du coton (la nourriture de cette révolution industrielle), etc. ; pour écouler les produits cotonniers, il fallut casser la production de l’Inde qui, d’atelier du monde, devint un simple marché…

En dériva aussi la démocratie, contrainte de l’intérieur. Les mineurs constituèrent rapidement un corps professionnel autonome et coordonné. Il fallait descendre dans un lieu dangereux, loin de la surveillance des décideurs, et y délibérer pour affronter le risque. Le syndicalisme moderne naquit au cœur des houillères britanniques, puis françaises, allemandes, etc., et s’imposa au fil de grèves à répétition, capables de bloquer la société tout entière.

Le pétrole marqua une nouvelle évolution : on l’extrait à la surface, et une fois les oléoducs installés, il est facile d’en garantir la chaîne de distribution. Les réparer est aussi rapide que les saboter. À partir du moment où on exploita l’or noir du tiers-monde, la perspective d’y voir émerger la démocratie s’éloigna : un régime fort, lié par un contrat tacite à ses clients occidentaux, était mieux à même d’étouffer les revendications sociales de ses travailleurs (au besoin en jouant des divisions ethnico-religieuses) et de garantir la perfusion énergétique dont le monde avait besoin. Et cette logique expliquerait pourquoi on ne saurait « implanter » aujourd’hui une démocratie en Irak.

Pour court qu’il soit, le livre abonde en exemples, et son solide argumentaire ne saurait être balayé d’un revers de main. Sa conclusion : nous vivons en pétrocratie. Notre mode de vie, énergivore, combinant politique de masse et redistribution plus ou moins égalitaire des ressources, conditionne les formes prises par le politique. Consommateurs, nous jouissons d’un État providence dérivé de notre passé minier, et avons relégué, géopolitiquement, la gestion des pays producteurs à des régimes autoritaires et extrêmement inégalitaires pour garantir notre approvisionnement. Or l’idée de l’avenir, telle que développée dans les démocraties, rimait avec croissance illimitée. Depuis les crises pétrolières (1967-1974), cette configuration a été bouleversée. Une transformation est en cours, visant sur fond de pénurie à préserver les dispositifs d’exploitation du pétrole, et à le mettre en scène par le spectacle – oserait-on dire de la même façon que le nazisme magnifiait cinématographiquement ses actions ? – : le militarisme américain s’évertuant à « démocratiser » tels des « dominos » les États du Proche-Orient à coup de « bombes intelligentes » incarnant l’archétype de ce modus operandi du show.

Demain, Le Meilleur des mondes ?

Tout récemment paru, le dernier ouvrage du philosophe Bertrand Méheust est titré La Nostalgie de l’Occupation [2012]. Il fait suite à La Politique de l’oxymore [2009]. Retour donc sur l’oxymore, figure de style associant dans une même proposition deux termes sémantiquement opposés, telle cette « dictature douce » du confort qui rythme nos vies. « Développement durable », « capitalisme vert », « croissance négative », « flexisécurité », « marché civilisationnel », « bombes intelligentes »… Allez, vous pouvez enrichir la liste de vous-mêmes, tant ces clichés, à l’image de cet oxymore métallique qu’est le 4×4 urbain, ont envahi notre quotidien.

« Toute société a vocation à persévérer dans son être », martèle le philosophe. Dût-elle pour cela faire en sorte que ses élites mobilisent moult oxymores afin d’en convaincre le bon peuple. Le développement durable, juge le philosophe, revient à graver dans l’opinion publique l’idée que la croissance est compatible avec la sauvegarde de notre planète. Alors que notre société globalisée, élevant toujours plus d’élus aux standards de vie jusqu’ici réservés aux seuls Occidentaux et Japonais, menace à court terme l’équilibre de la biosphère. Au nom du principe de précaution – et même si des penseurs minoritaires, se parant du costume galiléen du sage qui a raison seul contre tous, affirment qu’il n’y a pas lieu de craindre un hypothétique réchauffement –, le consensus croissant des experts exige que de toute urgence soient posées des entraves mondiales aux atteintes environnementales.

La Nostalgie de l’Occupation nous amène donc à inaugurer le questionnement de l’asservissement mis en œuvre dans nos sociétés. Au nom de notre bien à tous, l’humanité vogue vers une « apocalypse molle », faite de consensus banal faisant rimer bonheur et consommation, sur fond de soumission aux marchés, avec pour horizon prévisible le crime suprême dont n’auraient même pas rêvé les nazis. Leur échelle du mal était étalonnée sur le génocide. L’horizon logique de notre hubris consumériste, c’est l’écocide, la destruction du biotope planétaire.

En conclusion, poussons l’analogie jusqu’à ses extrêmes : faudra-t-il instaurer une dictature universelle pour permettre à notre humanité de survivre sans trop de casse ? Plus pernicieusement, se dirigerait-on insidieusement vers le développement d’une éthique de la soumission volontaire, thèse exposée entre autres par deux spécialistes en éthique médicale, Marc Grassin et Frédéric Pochard, dans La Déshumanisation civilisée [2012] ? Attention, le terrain est miné. Ce fantasme d’organisations internationales s’arrogeant tous les droits au nom de l’intérêt suprême de l’humanité – il faut sauver la Terre –, fossoyeuses de toute forme de démocratie et de souveraineté nationales, est mis en scène conjointement par les climatosceptiques et les partisans de la théorie du complot. Il constitue en reflet un tabou majeur de l’écologie, qui voudrait en logique que l’on puisse imposer la décroissance par la responsabilisation de chacun, par le consensus démocratique.

Dans vingt ans, au nom du maintien de notre civilisation même, il y aura sûrement eu quelques voix pour insidieusement convaincre l’humanité de se montrer « raisonnable », de même que les Grecs sont aujourd’hui amenés à passer sous les fourches caudines de l’équilibre financier : il faudra se contraindre à partager nos ressources mondiales limitées au prorata de leur disponibilité, et non en postulant qu’elles sont inépuisables. Car ce qui ressort de ces lectures, c’est que si la prospective est possible à une telle échelle, les États auront, en toute probabilité, échoué à négocier l’intérêt collectif alors que la température du globe flirtera avec un seuil anticipé comme celui de la catastrophe. Aurons-nous alors pour tout arbitrage la guerre de tous contre tous, ou la soumission raisonnée à une dictature mondiale en charge de notre survie ?

LOVELOCK James [2006], La Revanche de Gaïa. Pourquoi la Terre riposte-t-elle (et comment pouvons-nous encore sauver l’humanité) ?, trad. fr. Thierry Piélat [2007], Paris, Flammarion.

MARÉCHAL Jean-Paul [2011], Chine/USA. Le climat en jeu, Paris, Choiseul.

MITCHELL Timothy [2011], Petrocratia. La démocratie à l’âge du carbone, trad. fr. Nicolas Vieillescazes [2011], Alfortville, È®e.

MÉHEUST Bertrand [2012], La Nostalgie de l’Occupation. Peut-on encore se rebeller contre les nouvelles formes d’asservissement ?, Paris, La Découverte, coll. « Les Empêcheurs de penser en rond ».

MÉHEUST Bertrand [2009, rééd. 2010], La Politique de l’oxymore. Comment ceux qui nous gouvernent nous masquent la réalité du monde, Paris, La Découverte, coll. « Les Empêcheurs de penser en rond ».

GRASSIN Marc et POCHARD Frédéric [2012], La Déshumanisation civilisée, Paris, Cerf.