Pourquoi l’histoire globale ?

Cahiers d’histoire, « Pourquoi l’histoire globale ? », n° 121, avril-juin 2013 [texte intégral en ligne]

couv_ch121Dans son introduction « Pourquoi l’histoire globale ? », Chloé Maurel fait le constat de la multiplication des publications et de l’institutionnalisation de cette histoire par la création de chaires, essentiellement dans le monde anglo-saxon. Mais d’emblée, un doute surgit lorsqu’elle cite la World History Association, fondée en 1982, et le Journal of World History, créé en 1990. S’agit-il là bien d’histoire globale ? Les exemples cités pour la France, des Traites négrières. Essai d’histoire globale (2004) au numéro de la revue Actuel Marx consacré à l’histoire globale (2013) sont plus probants, quoiqu’on puisse discuter de la dimension globale de l’ouvrage d’Olivier Pétré-Grenouilleau. Qu’est-ce alors l’histoire globale ? On pourrait assez facilement agréer la réponse apportée : « Un ensemble large de méthodes et de concepts, incluant plusieurs sous-courants comme l’histoire comparée, l’histoire des transferts culturels, l’histoire connectée, l’histoire croisée, l’histoire transnationale… » [p. 14]. Que l’histoire globale emprunte à d’autres histoires, il n’y a aucun doute. Si on considère la mondialisation comme un processus complexe de mise en interconnexions des différentes parties du globe, il est tout à fait normal que l’histoire globale recoupe, outre les champs de recherches déjà cités, ceux d’histoire culturelle, d’histoire économique, d’histoire sociale, d’histoire politique ou d’histoire environnementale. Les méthodes et les facettes de l’histoire globale sont nombreuses et on pourrait jusqu’à dire qu’elle est doublement globale : globale au sens ancien du terme, dans la lignée de l’école des Annales, et globale aussi dans un sens que Chloé Maurel délaisse quelque peu. Car quelle est donc cette globalité ? La question demeure en suspens. Selon elle, l’histoire globale serait d’abord « une boîte à outils utile » : par le décentrement du regard, par les comparaisons, par l’échelle mondiale. C’est vrai ; mais si la mondialisation n’est évoquée, ce n’est qu’en passant, à propos des délocalisations, des multinationales. Pourtant, on pourrait défendre l’idée que l’essence même de l’histoire globale est dans son objet d’étude. Ce qui fait, en passant, qu’elle ne prétend pas être toute l’histoire. Aussi constatons-nous encore une fois ce désaccord qui s’installe entre ceux qui ne voient dans l’histoire globale qu’une manière d’approcher l’histoire mondiale, au risque de la rendre complètement floue, et ceux qui défendent l’idée que l’histoire globale, née de la mondialisation, est le rétroviseur de notre société : la volonté d’expliquer la mondialité contemporaine.

L’article de Christophe Charle, « Jalons pour une histoire transnationale des universités », illustre assez bien les travers d’une absence de définition rigoureuse de l’histoire globale. Le propos se concentre en réalité seulement sur les universités européennes et leur histoire depuis le 19e siècle. La transnationalisation, qui est effectivement une dynamique forte dans la mondialisation, n’est ici étudiée qu’à l’échelle européenne. On ne comprend pas très bien en quoi ce texte constitue un exemple d’histoire globale. Sinon, en lisant les articles suivant, par l’accent mis en réalité sur l’histoire transnationale.

Katja Naumann propose de revenir sur « L’enseignement de l’histoire mondiale aux États-Unis avant William H. McNeill et son premier ouvrage The Rise of the West (1963) ». La question est celle de la nouveauté, réelle ou exagérée, de l’histoire globale. Y a-t-il rupture ou bien continuité ? Selon l’analyse de Patrick Manning, l’ouvrage de William H. McNeill The Rise of the West a constitué un tournant historiographique dans l’étude des connexions entre les civilisations en faisant la preuve qu’une histoire à l’échelle mondiale est possible et n’est pas seulement du domaine de la philosophie de l’histoire. Au contraire, l’auteure montre bien l’évolution qui s’est produite aux États-Unis depuis le début du 20e siècle dans le récit de la civilisation occidentale tel qu’il avait été écrit en Europe au cours de siècles précédents avec un élargissement aux civilisations non européennes et aux différentes facettes de l’humanité. Elle rappelle notamment l’impact des études anthropologiques durant l’entre-deux-guerres dans une remise à plat des relations entre les différentes cultures. Elle étudie de façon assez détaillée les changements qui ont lieu dans trois collèges universitaires : Columbia, Chicago et Harvard. C’est à Chicago, notamment, qu’on trouve dès les années 1940, Louis Gottschalck, Marshall G.S. Hodgson et William H. McNeill. Les deux premiers contribuèrent après guerre à L’Histoire de l’humanité de l’Unesco. En minimisant la rupture entre histoire mondiale et histoire globale, et en retraçant cette généalogie de l’histoire globale comme un processus proprement états-unien, Katka Naumann entend surtout montrer que le polycentrisme programmatique de l’histoire globale serait contredit par son élaboration au sein de la puissance hégémonique. Elle en arrive ainsi à la conclusion que d’autres histoires mondiales/globales sont possibles, en accord avec les traditions historiographiques nationales, régionales ou locales. N’est-ce pas réduire la dimension transnationale qui a préposé à l’élaboration d’une histoire globale au demeurant multiple ?

Matthias Middell s’interroge quant à lui sur « L’histoire mondiale/globale en Allemagne ». Le titre même de son article révèle l’ambiguïté soulevée au début de notre critique, mais pour s’y attaquer. Les premiers paragraphes sont très fermes là-dessus. La question de la pertinence à parler d’histoire globale à propos des nouvelles recherches sur la guerre de Sept Ans est très juste. Comme il l’écrit, « ce qui fait des auteurs de ces études des global historians, ce n’est évidemment pas seulement leur connaissance des pays lointains et de leurs interdépendances, mais le fait de poser des questions qui ne relèvent pas seulement de leur statut d’expert en exotisme, mais d’apporter une contribution au problème non encore résolu de savoir jusqu’où faire remonter la mondialisation actuelle que nous scrutons si attentivement, et ce que nous pouvons faire d’une telle tradition ». Cependant, il pointe du doigt d’une part les réticences politiques que certains peuvent avoir à l’égard de l’histoire globale, comme instrument de légitimation politique pour les acteurs qui appellent à davantage de mondialisme contre les nationalismes de tous poils, d’autre part le manque de reconnaissance par les historiens eux-mêmes qui reprochent aux chercheurs en histoire globale de ne faire que du travail de seconde main et d’enfreindre ainsi les règles établies de la recherche historique, à savoir l’analyse minutieuse d’archives dans un champ clos dont l’historiographie est parfaitement maîtrisée – sans parler des craintes que les historiens du global ne nourrissent des ambitions hégémoniques sur l’ensemble de l’histoire ! Après cette introduction, Matthias Middell s’attarde plus précisément sur l’histoire globale en Allemagne, sur son institutionnalisation tardive, mais réelle, et sur sa subsomption par l’histoire mondiale. Mais c’est sur l’histoire transnationale qu’il conclut. Celle-ci apparaît finalement comme un moyen de résoudre les tensions épistémologiques créées par l’histoire globale. Si le cadre national est appelé à être dépassé, le travail historique, quant à lui, n’est pas fondamentalement remis en question. L’étude des sociétés ne peut plus se faire sans prendre en considération les interactions avec les autres sociétés. Difficile de ne pas souscrire à un tel programme, mais si l’histoire globale peut se nourrir de telles recherches et appelle à un tel dépassement, elle ne s’y réduit pas.

On retrouve le même glissement dans le texte d’Akira Iriye, « Réflexions sur l’histoire globale et transnationale ». L’article commence par une réflexion anecdotique mais intéressante sur l’utilisation relativement tardive par l’auteur de la notion de « globalization ». Il paraît en effet nécessaire de remettre au centre la notion de mondialisation pour expliquer l’émergence de l’histoire globale. L’auteur rappelle bien également les enjeux qu’il y a à développer un enseignement d’histoire globale permettant de dépasser les perspectives uniquement nationales, au risque de créer des tensions, ce qu’on connaît bien ici (cf. la tribune que j’avais publiée dans les Carnets d’Aggiornamento, « L’oubli du monde »). On restera toutefois plus réservé lorsque l’auteur reprend l’idée que la Première Guerre mondiale marque le début d’une démondialisation, analyse qui s’appuie sur une définition essentiellement économique de la mondialisation quand il faudrait, à mon sens, prendre en considération l’ensemble des flux qui mettent en interconnexion les différentes parties de l’espace-Monde. Toujours à propos de ce premier temps de la mondialisation qui irait, en gros, du milieu du 19e siècle au milieu du 20e, Akira Iriye s’interroge par ailleurs sur les liens qui existent entre mondialisation, occidentalisation, modernisation et impérialisme : peut-on parler de mondialisation pour désigner le processus de domination européenne/occidentale sur le reste du Monde et de transformation socio-économique de celui-ci ? Aussi, selon lui, n’est-ce qu’à la fin du 20e siècle que « la mondialisation s’étendit à l’ensemble de la planète » et que, corrélativement, l’intérêt pour l’histoire globale se développa et qu’on distingua celle-ci de l’histoire mondiale. Il n’est pas anodin qu’Akira Iriye et Bruce Mazlich aient assuré ensemble le cours d’histoire globale à l’université de Harvard de 2001 à 2003. Tous deux défendent l’idée que l’histoire globale porte avant tout sur l’histoire récente. L’auteur, qui, avec Pierre-Yves Saunier, a codirigé le Palgrave Dictionary of Transnational History (2006), en vient alors à développer la pertinence de l’histoire transnationale, qu’on peut considérer comme faisant partie de l’histoire globale, ou comme un champ historiographique en soi, sécant avec l’histoire globale. « L’émergence d’une histoire transnationale suggère une prise de conscience que la nation n’est plus (si elle l’a jamais été) l’unique paramètre de l’identité humaine ou le cadre principal des affaires humaines. Tout individu est un être local et global, avec des identités multiples, dont certaines se comprennent mieux dans le cadre de la nation, et d’autres à travers les appartenances de sexe, de religion, de race, de classe sociale ou d’âge. » L’histoire transnationale peut donc être considérée comme transcalaire, mais aussi ascalaire, elle n’a pas pour objectif premier de comprendre le Monde comme espace et comme société globale. Elle est surtout une méthode pour casser le carcan des nations, ce qui amène Akira Iriye à plaider en faveur de la notion d’« hybridité », qui correspondrait dans l’historiographie française à celle de « métissage ».

Dans « Histoire globale et organisations internationales », Thomas G. Weiss présente la vaste histoire intellectuelle des Nations unies qu’il a coordonnée entre 1999 et 2010. La question posée est assez intéressant, la réponse pas toujours convaincante, mais probablement par manque de place. Les idées de l’Onu ont-elles influencé le monde ? L’argumentation contrefactuelle, originale et rarement utilisée dans l’historiographie française, est peu probante. Si l’Onu n’avait pas été créée en 1945, elle l’aurait été plus tard sous une forme ou sous une autre… Soit. Il y a une nécessité à mettre en place une gouvernance mondiale. Comme il le reconnaît lui-même, ce besoin existe dès la fin du 19e siècle, moment où sont fondées par exemple l’Union postale universelle et l’Union internationale des télécommunications. Dans la diffusion des idées qui ont participé à mettre en forme nos représentations du monde, les différents Rapports sur le développement humain ont sans doute joué un rôle certain, mais les exemples concrets manquent et l’auteur renvoie essentiellement à l’ouvrage auquel il a participé : UN Ideas That Changed the World (2009). On pourrait penser à la notion de développement durable, définie dans le rapport Bruntland de 1987 et dont on connaît le succès planétaire. Les droits de l’homme, avec la Déclaration universelle de 1948, sont un autre exemple de ces idées qualifiées d’« onusiennes ». Même s’il est évident que la question des droits essentiels communs à tous les êtres humains s’inscrit dans une réflexion pluriséculaire, la mise en œuvre de ceux-ci à l’échelle mondiale reste un projet pour lequel l’Onu constitue une référence centrale. Cependant, Thomas G. Weiss n’est pas naïf et c’est un regard critique qu’il porte sur cette organisation internationale. Au-delà de l’influence que celle-ci a eu, la question est bien celle de l’influence qu’elle aurait pu avoir davantage si l’institution fonctionnait mieux et était plus indépendante des États.

Pour terminer ce dossier, Chloé Maurel dresse un panorama des « récents développements en histoire globale dans le monde ». Sans surprise, la confusion demeure entre histoire mondiale et histoire globale, considérées comme équivalentes. Plusieurs objets transnationaux sont listés comme autant de problématiques possibles : les maladies, la faim et la famine, les maladies, les océans, les contacts entre aires de civilisation, les migrations, le fait colonial… On ne reprendra pas ici la liste des œuvres citées. La fragmentation de l’histoire globale nous ramène à la question de ce qu’elle est. On l’avait souligné ailleurs : l’histoire globale ne peut pas avoir pour unique visée la production d’histoires à l’échelle du globe, elle est aussi une perspective géohistorique donnée à de multiples travaux obéissant à d’autres logiques. Les interactions entre les deux démarches sont potentiellement très riches et c’est ce à quoi appelle Chloé Maurel en prenant deux exemples : l’histoire comparée d’une part, l’histoire sociale d’autre part. Cependant, cet enrichissement ne pourra fonctionner que si le cadre théorique et épistémologique de l’histoire globale est clarifié. Les concepts ne sont des passerelles que s’ils sont définis. Celui de Monde reste malheureusement encore trop souvent flou et incertain.

L’histoire-tunnel en diapositives : l’Atlas historique d’Edward Quin

Dans mon précédent billet, j’évoquai la scission qui s’était peu à peu faite, à partir du 16e siècle, entre la géographie ancienne et la géographie moderne. Les Grandes Découvertes rendirent rapidement obsolètes la géographie des Anciens, qui devenait ainsi un outil pour l’histoire. C’est ainsi, par exemple, qu’après Abraham Ortelius, Pierre Bertius publiait en 1618 un Theatrum geographiæ veteris, dans lequel il reproduisait l’édition en grec et en latin de la Géographie de Ptolémée avec les annotations de Mercator, ainsi que d’autres œuvres, comme la Table de Peutinger ou l’Itinéraire d’Antonin. La compilation d’œuvres cartographiques passées, d’abord sans ordre chronologique, mettait en lumière le progrès des connaissances cartographiques européennes et aboutit à la « géographie triomphante » du 19e siècle déjà évoquée. Mais ce croisement de l’histoire et de la géographie fut l’occasion d’une autre innovation : l’atlas historique [Hofmann, 2000 ; Goffart, 2003].

Le principe fondamental d’un ouvrage géographique dont le feuillettement même supplée la narration historique a été utilisé pour la première fois en 1651, dans le livre de Philippe de La Rue, La Terre Sainte, mais à une échelle très modeste, puisqu’il n’est composé que de six cartes, ordonnées selon le temps, de l’Exode jusqu’à « la Sourie [Syrie] d’aujourd’hui ». On retrouve le même procédé en 1705 dans le livre de Nicolas de La Mare, Traité de police, où l’auteur retrace en huit plans l’histoire de la ville de Paris, de l’époque romaine au présent. Le premier Atlas explicitement qualifié d’« historique » parut en 1705, à Amsterdam, d’un auteur anonyme, « M.C««««« », probablement Zacharie Châtelain, un huguenot ayant fui la répression de la fin du règne de Louis XIV. Toutefois, si le titre est nouveau, le contenu ne l’est guère et n’est constitué que d’une présentation conventionnelle des pays du monde. En 1705 également, parut une double carte intitulée Theatrum historicum ad annum christi quadringentesimu, « Théâtre historique en 400 de l’ère chrétienne », divisée en une Pars occidentalis et une Pars orientalis. Elle était l’œuvre de Guillaume de L’Isle (1675-1726). Comme celui-ci l’annonçait en marge, « cette carte doit être accompagnée de quelques autres, qui serviront toutes ensemble à faire voir l’état du monde connu dans les différents temps » ; mais une mort quelque peu prématurée n’a pu permettre l’achèvement de cet atlas. Dans les années 1730-1740, le cartographe Johann Matthias Hase (1684-1742), ou Johannes Hasius, réalisa plusieurs ouvrages géographico-historiques qui s’apparentent à des atlas. En 1739, il publia à Nuremberg une Regni Davidici et Salomonaei descriptio geographica et historica, una cum delineatione Syriae et Aegypti pro statu temporum sub Seleucidis et Lagidis regibus mappis luculentis exhibita, et probationibus idoneis instructa ; et en 1742, Phosphorus historiarum, vel Prodromus theatri summorum imperiorum : « Lumière de l’histoire, ou Prodrome du théâtre des plus grands empires ». Témoin également de cette dynamique historico-cartographique, un manuscrit conservé à la Bibliothèque nationale de France, daté de 1747 et attribué à Gilles Robert de Vaugondy (1688-1766), qui s’intitule Atlas des révolutions du globe [*]. L’ouvrage est composé de 66 cartes occupant chacune une double page et couvrant l’Eurasie, de l’Espagne à la Corée. La réalisation en reste cependant assez grossière avec de nombreuses fautes. Enfin, notons, également à l’état de manuscrit, l’œuvre de Michel Picaud de Nantes, par ailleurs inconnu, réalisée en 1763 sur la base d’un mémoire rédigé par un certain Dupré un Atlas des révolutions de l’univers représentées en trente cartes, et qui mériterait une étude approfondie.

Les atlas historiques se multiplièrent au cours du 19e siècle et s’imposèrent comme un genre en soi, bien établi aujourd’hui. Christian Grataloup dans Lieux d’histoire a souligné l’intérêt à étudier ce type d’ouvrages pour le discours géohistorique dont ils sont porteurs [Grataloup, 1996]. Parmi les atlas du début du 19e siècle, l’un se démarque par l’originalité du traitement graphique. Publié en 1830, il a été réalisé par Edward Quin (1794-1828). Le dessein de l’auteur est clairement de proposer un nouveau support à l’enseignement de l’histoire grâce à un ensemble de cartes réalisées à la même échelle afin de montrer la continuité d’un récit mondial qui est celui de l’extension de la domination européenne.

« L’idée directrice de ce volume est de présenter l’histoire connue du Monde comme un tout, plutôt que sous la forme de fragments ; et comme un ensemble cohérent et uniforme, au lieu de parties dessinées selon des proportions variables, et des plans différents, voire opposés.

Quel a été le système commun dans l’instruction de la jeunesse en ce qui concerne cette partie du savoir humain ? Habituellement, on met dans les mains d’un jeune étudiant une Histoire de la Grèce, une autre de Rome, peut-être une de l’Angleterre, et parfois un ou deux volumes d’Histoire universelle, qui, de par son caractère compressée, n’a que peu d’intérêt. Il arrive même que ces récits puissent être accompagnés de quelques cartes, chacune dessinée selon une échelle différente, et se rapportant à une période différente. Et après avoir traversé cette courte formation, dont il est à craindre qu’elle comprenne tout ce que le plus grand nombre des écoliers reçoit, quelles idées de l’histoire du Monde l’écolier garde-t-il ? […]  En bref, quelle idée générale peut-il avoir des grandes lignes de l’histoire, quand son attention a été dirigée seulement vers un ou deux points de la surface terrestre, et ce durant une période donnée ?

Il n’est pas souhaitable de sous-évaluer ou de rejeter le fait de présenter à la jeunesse des histoires magnifiques et animées de la Grèce antique et de Rome. Mais dans le même temps, il faut concéder que les passages intéressants ne sont que des fragments, et que si l’attention de l’élève est occupée complètement ou en partie avec eux, il est probable qu’il ne conçoive qu’une idée très imparfaite ou erronée de l’histoire universelle. »[1]

Pour pallier cet enseignement fragmentaire, à la fois discontinu et difforme, Edward Quin proposait une série de vingt-et-une cartes réalisées selon la même échelle, mais partiellement couvertes de nuages noirs selon une logique de dévoilement afin de montrer l’élargissement progressif de la Civilisation, confondue avec une histoire européenne. Les choix graphiques explicitent cette dichotomie civilisation / barbarie :

« Il y a toujours eu, à chaque âge du monde, des parties de la terre non pas inconnues, mais classées, par leur manque de civilisation, de gouvernement régulier, et aux limites connues et reconnues, sous le terme général de pays barbares. Telle était la Scythie durant toute l’Antiquité, tel est l’intérieur de l’Afrique aujourd’hui.

Maintenant, en distinguant les royaumes successifs de la terre dans nos cartes par des couleurs appropriées, il était évidemment impossible d’assigner une couleur distincte à ces parties. Les couleurs que nous avons utilisées généralement pour désigner et distinguer un État ou un Empire d’un autre, et à montrer leurs limites respectives et l’étendue de leur domination, étaient inutilisables pour les déserts peuplés de tribus n’ayant aucune forme stable de gouvernement, ou d’existence politique, ou de limites territoriales connues. Ces types de pays cependant, nous les avons couverts de la même manière à toutes les périodes par un ombrage olivâtre, que l’œil de l’étudiant repérera vite sur les marges de toutes les cartes, et qui désigne à travers toute l’œuvre, les pays barbares et non civilisés auxquels nous avons fait allusion. »[2]

L’atlas se présente ainsi :

Quin, 1830, An Historical Atlas

Figure 1. L’Atlas historique animé (cliquez pour agrandir), légende des cartes en annexe, David Rumsey Map Collection.

L’animation donne à voir l’atlas comme aucun feuilletage ne pourrait le faire et révèle véritablement l’intention de son auteur : un discours géohistorique du monde. Le terme de « géohistoire » n’est pas un abus ici ; l’auteur lui-même souligne sa volonté de combiner les deux disciplines, ce qui est au demeurant le propre des atlas historiques :

« Chaque carte successive combine donc, en un seul regard, à la fois la Géographie et l’Histoire de l’âge auquel elle se réfère, montrant par son étendue les limites du monde connu, et par ses couleurs les empires respectifs en lesquels le monde est distribué. » [3]

Reste l’originalité même de cet atlas, à savoir le choix de masquer une partie des cartes par des nuages. L’auteur s’en explique dans la préface :

« En faisant ainsi, nous n’oublions pas que les faits réels de la géographie de la terre à ces périodes sont les mêmes qu’aujourd’hui, que la Chine et l’Amérique existaient autant à l’époque de Cyrus qu’à présent, bien qu’inconnues de la plus grande partie des êtres humaines civilisés. Aussi, nous ne devons pas omettre ces pays de nos cartes, bien qu’ils n’eussent pas d’existence, et pourtant nous n’avons pas à les montrer, comme formant une partie du monde connue à l’âge délimité. »[4]

Cette présentation appelle deux critiques. La première est inspirée de la réflexion séminale de Christian Grataloup, à l’orée de Lieux d’histoire :

« L’intention est de ne point se satisfaire d’une sorte de projection de diapositives : l’Histoire produisant de nouvelles configurations géohistoriques que des images, des cartes, enregistrent et donnent à voir. Peut-être les configurations mêmes sont-elles des facteurs de ces changements comme elles peuvent l’être des permanences. Cette hypothèse de l’espace en tant qu’acteur, nous allons l’éprouver. »[5]

La géographie n’est pas simplement l’« œil de l’histoire », pour reprendre l’expression d’Abraham Ortelius, elle ne se limite pas au travail cartographique et à la simple localisation des lieux de l’histoire. La spatialisation doit au contraire aboutir, parfois par l’abstraction et par l’expression schématique, à une véritable géographicisation de l’analyse historique, c’est-à-dire à la mise en lumière des différents facteurs (espaces, milieux, territoires) et des différents acteurs (individus, groupes sociaux, États…) qui constituent le système spatial d’un lieu. De ce point de vue, un atlas historique est un outil pratique, mais il n’est que cela.

La deuxième critique s’appuie sur la réflexion d’un autre géographe, James M. Blaut, développée dans The Colonizer’s Model of the World. L’Atlas historique de Quin fournit en effet une magnifique illustration de ce que Blaut a appelé l’« histoire-tunnel », fondée sur une logique dedans/dehors.

« C’est l’idée que le Monde a un intérieur et un extérieur. Jusqu’à présent, l’histoire mondiale a été, pour l’essentiel, l’histoire de l’intérieur. L’extérieur a été, généralement, considéré comme sans importance. L’histoire et la géographie historique, telles qu’elles ont été enseignées, écrites et pensées par les Européens jusqu’à l’époque de la Seconde Guerre mondiale, et encore (comme nous le verrons) à bien des égards aujourd’hui, se situent, en quelque sorte, dans un tunnel de temps. Les murs imaginaires de ce tunnel sont les limites de la Grande Europe. L’histoire consiste à chercher, dans un sens ou dans l’autre, à l’intérieur de ce tunnel temporel européen et à décider de ce qui arrive, où, quand et pourquoi. “Pourquoi” évidemment implique des connexions avec des événements historiques, mais seulement les événements qui se situent dans le tunnel européen. À l’extérieur de ces murs, tout semble réduit à une tradition immuable, sans temps, sans changement. J’appellerai cette manière de penser “la vision historique tunnel”, ou tout simplement “l’histoire tunnel”. »[6]

Au final, l’Atlas historique de Quin est autant un document pour l’historiographie globale que pour l’histoire globale. D’une part, il montre comment s’est écrit un Grand Récit de la civilisation européenne, un « roman civilisationnel » qui continue de former l’arrière-plan de l’appréhension occidentale de l’histoire du Monde. D’autre part, ce récit cartographique participe de l’histoire globale elle-même comme discours justificateur de l’impérialisme européen. Ce billet complète donc bien le précédent dans l’étude de la place de la cartographie européenne dans ce « vol de l’histoire » dénoncé par Jack Goody [Goody, 2010].

Alors bien sûr, aujourd’hui, ce document doit être pris avec la distance qui s’impose et qui sied à l’historien. Deux siècles, ou presque, après, cet atlas est un objet d’histoire. L’Europe a tourné la page de la colonisation. C’est un fait. Pourtant, comparons un instant ce récit géohistorique aux programmes actuels de collège.

Classe de sixième
I. L’Orient ancien
II. La civilisation grecque
III. Rome
IV. Les débuts du judaïsme et du christianisme
V. Les empires chrétiens du haut Moyen Âge
VI. Regards sur les mondes lointains
Classe de cinquième
I. Les débuts de l’islam
II. L’Occident féodal, XIe – XVe siècle
III. Regards sur l’Afrique
IV. Vers la modernité, fin XVe – XVIIe siècle
Classe de quatrième
I. L’Europe et le monde au XVIIIe siècle
II. La Révolution et l’Empire
III. Le XIXe siècle
Classe de troisième
I. Un siècle de transformations scientifiques, technologiques, économiques et sociales
II. Guerres mondiales et régimes totalitaires (1914-1945)
III. Une géopolitique mondiale (depuis 1945)
IV. La vie politique en France

Dans le détail, le contenu de l’enseignement est bien sûr différent, mais dans ses grandes lignes, si on laisse de côté l’histoire du 20e siècle qui ne peut pas être prise en compte dans la comparaison, le récit s’inscrit dans la même logique. On observe même des reculs, comme l’attention portée aux invasions mongoles et à la « pax mongolica » ; lorsqu’on voit toute l’importance accordée aujourd’hui à un événement comme la mort de Tamerlan en 1405 [Darwin, 2007], on peut émettre ne serait-ce qu’un regret…. Tout juste, a-t-on fait un peu de place à des « regards », c’est le terme utilisé, vers l’extérieur du tunnel : la Chine, l’Afrique. Et pourtant, ce petit pas de côté a été critiqué, l’Inspection générale a été attaquée, accusée de brader l’histoire nationale[7]. Ceci rappelle, il y a près d’un demi-siècle, les difficultés à mettre en œuvre le programme de terminale de 1957, modifié en 1959, qui était défini par l’étude de plusieurs civilisations : le monde occidental, le monde communiste européen, le monde musulman, le monde de l’océan Indien et de l’océan Pacifique, le monde africain noir. Ceci avait été l’occasion pour Fernand Braudel de rédiger un chapitre de manuel, « Une grammaire des civilisations » [Braudel, 1963], qui connut un regain de notoriété après sa réédition à part en 1987. Mais à l’époque, ce programme fut rapidement allégé des questions portant sur les civilisations extra-européennes dès 1966-1967 pour des raisons soi-disant d’évaluation [Legris, 2010].

On prend alors conscience de l’ampleur de la tâche pour ceux qui voudraient renouveler l’enseignement de l’histoire en France, ouvrir les fenêtres et y faire entrer un peu de globalité ; et pas seulement par l’extrémité du temps présent : la mondialisation est un processus beaucoup plus ancien et les intrications des sociétés, multiséculaires. L’histoire globale se doit de dissiper ces nuages qui continuent d’obscurcir notre vision pour permettre la « déclosion du monde » [Mbembe, 2010].

Annexe : légende des cartes

1) Carte recouverte de nuages montrant la terre connue de la Création jusqu’au Déluge, 2348 av. J.-C. (1646 Anno Mundi). Première période. L’Éden est montré à travers les nuages avec le mont Ararat et la Terre de Nod.

2) Carte recouverte de nuages montrant la terre connue du Déluge, 2348 av. J.-C., jusqu’à l’Exode des Israélites, 1491 av. J.-C. (de 1656 A.M. à 2513). Deuxième période. Au travers des nuages, la carte montre en couleurs les empires et les pays: l’Empire Assyrien, la Syrie, Canaan et l’Égypte.

3) Carte recouverte de nuages montrant la terre connue de l’Exode des Israélites, 1491 av. J.-C., jusqu’à la fondation de Rom, 753 av. J.-C. (de 2513 A.M. à 3251). Troisième période. Au travers des nuages, sont visibles en couleurs les régions précédentes ainsi que l’Asie Mineure, la Grèce et l’Italie.

4) Carte recouverte de nuages montrant la terre connue de la fondation de Rome, 753 av. J-C., jusqu’à la mort de Cyrus, 529 av. J.-C. (de 3251 A.M. à 3475). Quatrième période. Au travers des nuages, est visible en couleurs la Méditerranée, de l’Italie jusqu’à la Perse.

5) Carte avec des nuages laissant voir la terre connue de la mort de Cyrus, 529 av. J.-C., jusqu’à celle d’Alexandre de Macédoine, 323 av. J.-C. (de 3475 A.M. à 3681). Cinquième période. En couleurs avec l’Empire macédonien en cramoisi.

6) Carte avec des nuages laissant voir la terre connue de la mort d’Alexandre de Macédoine, 323 av. J.-C., jusqu’à la partition de l’Empire, 301 av. J.-C. (de 3681 A.M. à 3703). Sixième période. En couleurs avec la plus grande partie en bleu montrant l’étendue de l’Empire.

7) Nuages laissant voir la terre connue de la partition de l’Empire d’Alexandre, 301 av. J.-C., jusqu’à la fin de la Troisième Guerre punique. Septième période. En couleurs s’étirant de l’Espagne et du Maroc jusqu’à la Chine. La Grande Muraille de Chine est visible.

8 ) Nuages laissant voir la terre connue de la fin de la Troisième Guerre punique, 146 av. J.-C., jusqu’à la naissance du Christ (de 3853 A.M. à 4004). Huitième période. En couleurs s’étirant de l’Irlande et du Maroc jusqu’à la Chine. L’Empire romain est visible en jaune, l’Empire parthe en vert, l’Hindoustan en gris et la Chine en marron clair.

9) La Terre connue des Européens visible à travers des nuages de la naissance du Christ jusqu’à la mort de Constantin, 337 apr. J.-C. En couleurs de la Scandinavie et du Maroc jusqu’à la Corée.

10) La Terre connue des Européens visible à travers des nuages de la mort de Constantin, 337 apr. J.-C., jusqu’à la division de l’Empire romain en deux, à la mort de Théodose, 395 apr. J.-C. En couleurs, couvrant de la Scandinavie et du Maroc jusqu’à la Corée. L’Empire romain d’Occident et l’Empire romain d’Orient sont montrés par des couleurs différentes.

11) La Terre connue à travers des nuages de la division de l’Empire romain en deux, à la mort de Théodose, 395 apr. J.-C., jusqu’à la dissolution de l’Empire d’Occident, 476 apr. J.-C. Onzième période. L’Empire romain d’Occident est maintenant identifié en pourpre comme les « Nations nordiques ».

12) Le monde connu à travers des travers de la dissolution de l’Empire d’Occident, 476 apr. J.-C., jusqu’à la mort de Charlemagne, 814 apr. J.-C. Douzième période. Trois empires sont identifies: l’Empire de Charlemagne (jaune), l’Empire grec (jaune-vert) et l’Empire mahométan (vert).

13) Le monde connu montré à travers des nuages de la mort de Charlemagne, 814 apr. J.-C., jusqu’à la dissolution de son empire, 912 apr. J.-C. Treizième période. Des pays en Europe commencent à émerger et la masse terrestre au-dessus de la Scandinavie est montrée pour la première fois.

14) Le monde connu montré à travers des nuages de la dissolution finale de l’Empire de Charlemagne, 912 apr. J.-C., jusqu’à la Première Croisade, 1100 apr. J.-C., Quatorzième période. La carte est dominée par l’Empire germanique, les États mahométans et la Chine. Le Groenland peut être vu dans le coin supérieur gauche.

15) Le monde connu montré à travers des nuages du commencement des Croisades, 1100 apr. J.-C., jusqu’à la division de l’Empire mongol, à la mort de Kubilaï, 1292 apr. J.-C. Quinzième période. L’Empire de Kubilaï khan, en vert olive, domine plus de la moitié de la carte, s’étendant de la Hongrie jusqu’à la Mongolie et la mer de Chine.

16) La carte dépliée montre des nuages aux angles et décrit le monde connu depuis la division de l’Empire mongol, 1294 apr. J.-C., jusqu’à la découverte de l’Amérique, 1498 apr. J.-C. Seizième période. L’Afrique est montrée en entier pour la première fois et la côte oriental de l’Amérique, du Newfoundland jusqu’au bord septentrional de l’Amérique du Sud. Les Indes occidentales sont montrées en bleu.

17) La carte dépliée montre des nuages aux angles et décrit le monde connu depuis la découverte de l’Amérique, 1498 apr. J.-C., jusqu’à la mort de Charles V de Germanie, 1551 apr. J.-C. Dix-septième période. L’Amérique du Sud et les parties orientales et méridionales de l’Amérique du Nord ne sont plus couvertes de nuages. Les Philippines sont aussi visibles.

18) Des nuages sont seulement visibles en bordure de la carte, qui décrit le monde connu depuis la mort de Charles V de Germanie, 1558 apr. J.-C., jusqu’à la restauration des Stuarts en Angleterre, 1660 apr. J.-C. Dix-huitième période. L’Australie est incluse ainsi que les baies d’Hudson et de Baffin (avec d’importantes distorsions). La partie septentrionale de la Sibérie a été découverte.

19) Le monde entier est visible, sans nuage, pour la première fois. Les divisions politiques sont montrées depuis la restauration des Stuarts en Angleterre, 1660 apr. J.-C., jusqu’à l’indépendance des États-Unis d’Amérique, 1783 apr. J.-C. Dix-neuvième période. La région septentrionale du Canada n’a pas été explorée et a été laissée en blanc.

20) Le monde connu depuis l’indépendance des États-Unis d’Amérique, 1783 apr. J.-C., jusqu’à la plus extension de l’Empire français, 1811 apr. J.-C. Douzième période.

21) Le monde connu depuis la plus grande extension de l’Empire français, 1811 apr. J.-C., jusqu’à la fin de la paix générale, 1828 apr. J.-C. Vingt-et-unième période.


Bibliographie

Blaut J.M., 1993, The Colonizer’s Model of the World. Geographical Diffusionism and Eurocentric History, New York, The Guilford Press.

Braudel F., 1963, « Une grammaire des civilisations », in Baille S., Braudel F. & Philippe R., Le Monde actuel. Histoire et civilisations, Paris, Belin, pp. 143-475 ; réédition : Braudel F., 1987, Grammaire des civilisations, Paris, Arthaud/Flammarion.

Darwin J., 2007, After Tamerlane. The Global History of Empire, Londres, Allen Lane.

Goffart W.A., 2003, Historical Atlases. The First Three Hundred Years, 1570-1870, , Chicago/Londres, University of Chicago Press.

Goody J., 2010, Le Vol de l’histoire. Comment l’Europe a imposé le récit de son passé au reste du monde, trad. de l’anglais par F. Durand-Bogaert, Paris, Gallimard [éd. orig. 2006].

Grataloup C., 1996, Lieux d’histoire. Essai de géohistoire systématique, Montpellier, GIP / Reclus.

Hofmann C., 2000, « La genèse de l’atlas historique en France (1630-1800) : pouvoirs et limites de la carte comme “œil de l’histoire” », Bibliothèque de l’école des chartes, Vol. 158, N°1, pp. 97-128.

Legris P., 2010, L’Écriture des programmes d’histoire en France (1944-2010). Sociologie historique d’un instrument de politique éducative, thèse de doctorat, Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, disponible sur le site Hal-SHS.

Mbembe A., 2010, Sortir de la grande nuit, Paris, La Découverte.

Quin E., 1830, An Historical Atlas, Londres, L.B. Seeley & Sons.


Notes

[1] Edward Quin, 1830, An Historical Atlas, Londres, L.B. Seeley & Sons, p.1.

[2] Ibid.

[3] Ibid., p. 2.

[4] Ibid., p. 1

[5] Christian Grataloup, Lieux d’histoire. Essai de géohistoire systématique, GIP Reclus, Montpellier, 1996, p. 9.

[6] James M. Blaut, 1993, The Colonizer’s Model of the World. Geographical Diffusionism and Eurocentric History, New York, The Guilford Press, p. 5.

[7] Patricia Legris, « L’introduction controversée des civilisations extra-européennes dans les programmes d’histoire », sur le site Aggiornamento Histoire Géographie.